Tremblay c. 9160-2318 Québec inc. (Autoultimax)

2014 QCCQ 4998

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-133361-123

 

DATE :

11 juin 2014

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

DANIEL DORTÉLUS

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STEVE TREMBLAY

Demandeur

c.

9160-2318 QUÉBEC INC. (f.a.s.n. AUTOULTIMAX)

Défenderesse

 

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JUGEMENT

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LE LITIGE

[1]            Le demandeur poursuit la défenderesse pour la somme de 3 466,62 $ dans le cadre d’un contrat de vente d’un véhicule usagé.

[2]            La réclamation porte sur :

·         Coûts de nettoyage pour enlever une odeur persistante de chien :          205 $;

·         Filtre à pollen intérieur :                                                                                     75 $;

·         Deux ceintures de sécurité et deux appuis têtes :                               1 565,31 $;

·         Coûts de remplacement du radiateur:                                                          743 $;

·         Coûts de remplacement des freins arrière :                                            378,31 $;

·         Troubles et inconvénients:                                                                             500 $.

[3]            La défenderesse conteste la réclamation. Elle soulève que le véhicule a été inspecté avant la vente.

[4]            Elle invoque le fait que le prix du véhicule ait été réduit et que le demandeur ait accepté d’acheter le véhicule avec la mention « vendu tel quel » font obstacles au recours du demandeur contre elle.

LES FAITS

[5]            Le 6 août 2011, la défenderesse, qui opère dans le secteur de la vente de véhicules usagés, vend au demandeur un véhicule de marque Honda Pilot EX-L 2005 à huit (8) passagers pour le montant de 10 500 $, incluant les taxes.

[6]            À l’audience, le demandeur relate essentiellement les faits allégués dans la mise en demeure datée du 24 octobre 2011 (Pièce P-6) qu'Il y a lieu de reproduire ici :

« Le 6 août 2011, j’ai acheté un Honda Pilot EX-L Wres 2005 huit passagers, no.Série : 2hkyf18655h002949, avec un kilométrage de 75 850 km, dans votre établissement.

Le lendemain matin, j’ai constaté qu’à l’intérieur du véhicule, il y avait une intolérable odeur de chien et qu’il manquait aussi deux ceintures de sécurité et deux appuis têtes.

Le 26 août 2011, un bris au radiateur est survenu, J’ai du le faire remplacer car j’avais besoin de mon véhicule le plus tôt possible.

Le 7 octobre 2011, j’ai fait vérifier les freins arrières suite à un bruit lors du freinage, résultat, les freins son saisies dans la rouille depuis longtemps, il faut les remplacer.

La Loi sur la protection du consommateur articles 37,38,40 et 53 prévoit certains recours lorsque le véhicule acheté ne peut servir à l’usage auquel il est normalement destiné (huit passagers et non six, car il manque deux ceintures de sécurité et deux appuis têtes), ou si l’on découvre un vice caché (odeur intolérable de chien, bris de radiateur et de freins arrière qui ne fonctionnent pas), c’est la garantie légale, elle prévoit qu’un bien doit pouvoir servir à un usage normal pendant une durée raisonnable.

Depuis le 8 août 2011, je vous ai contacté à maintes reprises pour corriger les situations et/ou en venir à une entente. Vous avez toutefois refusé de corriger les problèmes à ma satisfaction. Depuis que j’ai acheté le véhicule, j’ai subi 3 466,62 $ de dommages :

 

 

-                Nettoyage intérieur complet : 205$

-                Filtre à pollen intérieur : 75$

-                Deux ceintures de sécurité et deux appuis têtes : 1565.31$

-                Radiateur : 743$

-                Freins arrière : 378.31$

-                Vérifications mécanique, produits nettoyages, pertes de temps, stress et inconvénients : 500$

Je vous mets donc en demeure de me payer la somme de 3 466.62$ dans un délai de dix jours. À défaut d’entente, je devrai intenter un recourt judiciaire dans le district du Lac St-Jean, selon l’article 958 du code de procédure civil, sans autre avis ni délai. »

{SIC}

[7]            Il produit une estimation pour le coût de remplacement des ceintures et appuie-têtes. Il attend l’issu de ce recours pour les remplacer.

[8]            Quant aux freins arrière, il explique qu’ils étaient saisis à cause de la rouille, il produit des photos pour illustrer la situation. Il n’a pas encore changé les freins.

[9]            Il produit des photos pour indiquer l’état de l’ouverture du radiateur, dont la jointure à l’intérieur était brisée.

[10]         Quant à l’odeur persistante du chien, le demandeur explique que cette odeur était insupportable et qu’il s’agit d’un vice qui était caché.

[11]         Le représentant de la défenderesse, M. Hamid Pazouki Mehr, affirme avoir fait laver et nettoyer l’intérieur du véhicule avant la vente.

[12]         Il s’en remet au rapport d’inspection préparé par CAA qui indique que les ceintures et les appuie-têtes sont présents lors de l’inspection.

[13]         Il prétend que le véhicule a été livré avec les ceintures et les appuie-têtes.

[14]         Quant à l’état du radiateur, la défenderesse soutient qu’il s’agit d’usure normale. Il en est de même pour les freins et le filtre.

ANALYSE ET MOTIFS

[15]         Les principales questions auxquelles le Tribunal doit traiter afin de disposer de ce litige, sont les suivantes :

1.     L’inscription de la mention « véhicule vendu tel quel » peut-elle faire obstacle au recours du demandeur?

 

2.     La responsabilité de la défenderesse est-elle engagée pour le remplacement du radiateur, survenu quelques mois après la vente?

3.     La garantie légale de qualité couvre-t-elle l’état des freins arrière qui sont encore fonctionnels et plus de deux (2) ans après la vente?

4.     La responsabilité de la défenderesse est-elle engagée pour les deux (2) ceintures de sécurités et appuie-têtes manquants?

[16]         L'article 1732 du Code civil du Québec (« C.c.Q. ») permet aux parties de convenir de l'exclusion de la garantie légale, mais le vendeur ne peut en aucun cas se dégager de ses faits personnels. Cette renonciation doit être clairement exprimée pour produire ses effets.

[17]         L'article 1732 C.c.Q. [1] énonce :

« 1732.  Les parties peuvent, dans leur contrat, ajouter aux obligations de la garantie légale, en diminuer les effets, ou l'exclure entièrement, mais le vendeur ne peut, en aucun cas, se dégager de ses faits personnels. »

[18]         Dans l'ouvrage La garantie de qualité du vendeur en droit québécois [2] l'auteur, Me Jeffrey Edwards, maintenant juge à la Cour du Québec, traite des clauses d'exclusions de la garantie légale :

« Les tribunaux ont décidé que la clause d'acceptation du bien dans l'état où il se trouve n'exclut pas la garantie. Le même sort est réservé à la clause selon laquelle l'acheteur accepte le bien « tel que vu et examiné » ou « après l'avoir vu et visité ». Cette règle jurisprudentielle constitue une extension de la règle d'interprétation restrictive observée précédemment. Les déclarations de ce genre sont généralement des clauses de style qui ne possèdent ni la clarté ni le spécificité requise pour opérer l'exclusion. De fait, des déclarations semblables cohabitent même dans certains cas avec des clauses énonçant que la vente est conclue « avec garantie ». »

(Références et notes de bas de page omises)

[19]         Ces principes sont applicables dans la présente cause.

[20]         La réponse à la première question est négative, dans la mesure qu’il s’agit d’une clause qui est imposée par la défenderesse et que d’autre part le demandeur affirme que cette mention « véhicule vendu tel quel » ne visait que l’état de la carrosserie du véhicule.

[21]         Par ailleurs, la preuve n’est pas concluante que le demandeur ait renoncé à ses droits à la garantie légale, en contrepartie, d’une diminution de prix.

[22]         Le Tribunal estime que le remplacement du radiateur n’est pas dû à un vice caché, mais à l’usure normale de cette composante d’un véhicule ayant parcouru plus de 75 000 km, lors de la vente. Dans ce contexte, la responsabilité de la défenderesse ne peut pas être engagée pour les coûts de remplacement du radiateur.

[23]         Le même raisonnement s’applique pour les freins arrière du véhicule qui, par ailleurs, n’ont pas été remplacés par le demandeur.

[24]         Quant aux deux (2) appuie-têtes et aux ceintures de sécurité, que le demandeur a retrouvés sectionnés par terre dans le véhicule, le Tribunal croit la version du demandeur que cette situation remonte avant la vente.

[25]         La responsabilité de la défenderesse doit être engagée pour le montant de 1 565,31 $ pour remplacer ces composantes qui font partie intégrale d'un véhicule de huit passagers.

[26]         Le Tribunal accorde aussi le montant de 205 $ déboursé par le demandeur pour se départir de l’odeur de chien qui imprégnait l’intérieur du véhicule et 75 $ pour changer le filtre intérieur à pollen sur lequel des poils de chien étaient incrustés.

[27]         Aucun montant n’est accordé à titre de dommages pour troubles et inconvénients.

[28]         POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL  :

[29]         ACCUEILLE partiellement la demande;

[30]         CONDAMNE la défenderesse à payer au demandeur la somme de 1 845,31 $ avec intérêts au taux légal, et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter du 24 octobre 2011, plus les frais judiciaires de 129 $.

 

 

 

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DANIEL DORTÉLUS, J.C.Q.

 

Date d’audience :

5 juin 2014

 



[1]     Code civil du Québec , R.L.R.Q., c. C-1991, art. 1732.

[2]     Garantie de qualité du vendeur en droit québécois , Me Jeffrey Edwards, Wilson & Lafleur, par. 284 et ss.