Lamarre c. Québec (Procureur général)

2014 QCCQ 5453

COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

TROIS-RIVIÈRES

LOCALITÉ DE

TROIS-RIVIÈRES

« Chambre civile  »

N° :

400-22-007593-128

 

 

 

DATE :

1 er mai 2014

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

NICOLE MALLETTE, J.C.Q.

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

ALAIN LAMARRE

Demandeur

c.

PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC

Défendeur

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]            Alléguant que le défendeur a fait défaut d’entretenir adéquatement la porte de sa cellule, le demandeur réclame 24 000 $ en compensation pour les dommages qu’il a subis au majeur de la main droite.

Les faits

[2]            Le 21 janvier 2009, le demandeur est emprisonné au Centre de détention de Trois-Rivières.

[3]            Lors du décompte des détenus tenu en matinée, le demandeur a regagné ses quartiers, soit la cellule 8 du secteur P3SC (secteur protection).

[4]            Le demandeur s’y est pris à trois reprises pour fermer sa porte qui était défectueuse, se sectionnant l’extrémité d’un doigt de la main droite qui n’a pu être recousue.

[5]            Il soutient avoir avisé les gardiens de la défectuosité de la porte avant l’incident du 21 janvier 2009, lesquels auraient fait défaut, de donner suite à cette plainte.

[6]            Ce n’est que le 27 janvier 2009 que le demandeur fait une plainte écrite.  Le défendeur y donne suite en faisant ajuster la porte le 30.

Ce que la preuve révèle

†    Dans ce secteur, les portes sont munies d’un mécanisme pneumatique électrique pour la fermeture.  Il n’y a pas de poignée à l’intérieur et les détenus qui les ferment eux-mêmes, alors qu’ils sont à l’intérieur de leur cellule, doivent passer le bras à l’extérieur, donner une poussée et vite remettre leur bras à l’intérieur avant qu’elle se ferme.  Il s’agit d’une porte en acier qui se barre automatiquement.

†    Les gardiens demandent aux détenus d’entrer dans leur cellule, mais il n’y a aucune demande ou directive qu’ils doivent fermer la porte.

†    Suivant le témoignage du demandeur, c’est l’usage que les détenus ferment eux-mêmes les portes, les gardiens ne le faisant jamais.  Ces derniers restent à l’extérieur de l’aire centrale derrière le mur vitré et c’est de là qu’ils font le décompte.

†    Le demandeur est dans cette cellule depuis six jours au moment de l’incident et il n’y a rien au registre des plaintes concernant la porte défectueuse avant cela.

†    Un serrurier est présent toutes les semaines à la prison pour entretenir les portes de l’établissement carcéral et aucun autre détenu ne s’est blessé avec une porte.

†    Le demandeur s’y est pris à trois reprises pour fermer la porte et selon son témoignage il est «  fru  » à sa troisième tentative.

†    Le demandeur ne soumet pas de preuve médicale relative à un déficit anatomophysiologique et sa réclamation ne vise que des dommages non pécuniaires.

Analyse

[7]            Essentiellement, le demandeur invoque que le défendeur a commis une faute en entretenant mal les portes des cellules.

[8]            Or, le Tribunal est d’avis que l’établissement carcéral prend les mesures raisonnables pour assurer l’entretien de ses équipements, le serrurier étant présent toutes les semaines.

[9]            Le demandeur n’avait pas l’obligation de fermer lui-même la porte de sa cellule, même s’il s’agit d’une pratique courante.

[10]         Sachant qu’elle était difficile à fermer, il aurait dû s’abstenir de le faire.

[11]         En s’acharnant, puisqu’il en était à sa troisième tentative, le demandeur a fait preuve de témérité et d’imprudence et s’est lui-même placé en situation de danger d’autant plus qu’il était frustré de la situation.

[12]         Le demandeur aurait dû pénétrer dans sa cellule et attendre qu’un gardien vienne fermer la porte.  En agissant impulsivement, le demandeur s’est trouvé l’artisan de son propre malheur.

POUR TOUS CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[13]         REJETTE la demande;

[14]         LE TOUT avec dépens.

 

 

__________________________________

NICOLE MALLETTE, J.C.Q.

 

Me Maurice Biron

Biron & Spain

Procureurs du demandeur

 

Me Stéphane Lepage

C hamberland Gagnon (Justice Québec)

Procureurs du défendeur

 

 

 

Date d’audience :

18 MARS 2014