|
2014 QCCQ 5746 |
Gauvin c. Girard |
|
|||||||||
COUR DU QUÉBEC |
||||||||||
« Division des petites créances » |
||||||||||
CANADA |
||||||||||
PROVINCE DE QUÉBEC |
||||||||||
DISTRICT DE |
QUÉBEC |
|||||||||
LOCALITÉ DE |
QUÉBEC |
|||||||||
« Chambre civile »
|
||||||||||
N° : |
200-32-058895-136 |
|||||||||
|
||||||||||
DATE : |
25 juin 2014 |
|||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||||
|
||||||||||
SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
ANDRÉ J. BROCHET, J.C.Q. |
||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||||
|
||||||||||
PIERRETTE GAUVIN […] , Cap-Santé (Québec) […] |
||||||||||
|
||||||||||
Demanderesse |
||||||||||
c. |
||||||||||
|
||||||||||
PASCAL GIRARD […] , Québec (Québec) […] |
||||||||||
|
||||||||||
Défendeur |
||||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||||
|
||||||||||
JB 3844
|
||||||||||
______________________________________________________________________ |
||||||||||
|
||||||||||
[1] La demanderesse, Mme Pierrette Gauvin, réclame à Me Pascal Girard, qui est avocat, le remboursement de 3 726,28 $ d’honoraires payés. Mme Gauvin allègue que cette somme devait servir à l’obtention d’un mandat de paix contre une personne qui lui causait du trouble et que le mandat n’a pas été réalisé par Me Girard.
[2] Elle dépose les factures payées à Me Girard en indiquant au Tribunal tous les items pertinents qui doivent être calculés dans sa demande.
[3] Me Girard conteste. Il a agi dans le meilleur intérêt de Mme Gauvin. Effectivement, si le mandat de paix n’a pas été émis par le juge de la Cour du Québec le matin de la présentation de la plainte, c’est qu’il a jugé qu’il était préférable de convenir d’une entente avec la partie adverse par laquelle cette dernière s’engageait à respecter les droits et la vie privée de sa cliente.
[4] De plus, suivant Me Girard, même si Mme Gauvin a manifesté un certain mécontentement, celle-ci a payé tous les honoraires qui lui étaient dus sur présentation des comptes.
[5] C’est à compter de septembre 2010 que Mme Gauvin consulte Me Girard relativement à des problèmes de voisinage notamment. Elle acquitte sur demande les honoraires que veut bien lui réclamer Me Girard, qui les dépose en fidéicommis pour ensuite procéder à une facturation et se payer à même ces avances.
[6] Le 2 septembre 2010, une convention de mandat intervient à l’origine des services professionnels rendus qui indique clairement le mandat, le taux horaire d’honoraires de 150 $ et les débours payables.
[7] Tout se déroule correctement jusqu’au 2 septembre 2011, date de présentation de la dénonciation visant l’obtention d’un mandat de paix devant le juge.
[8] Mme Gauvin a dûment préparé sa cause. Le voisin en question contre qui elle réclame une ordonnance de garder la paix est un type qu’elle craint. La veille de l’audience, elle rencontre Me Girard avec tous ses témoins, à son bureau.
[9] Au palais de justice, le 2 septembre 2011, Me Girard obtient du juge deux suspensions d’une heure pour discussion avec le procureur de l’accusé. Mme Gauvin ne comprend pas totalement cette démarche et il semble bien que Me Girard ne l’ait pas prévenue de cette possibilité de conciliation.
[10] À la fin des discussions, une entente est rédigée par laquelle la personne visée par Mme Gauvin s’engage à lui procurer la paix et ne pas l’importuner de quelque façon que ce soit, à défaut de quoi il y aura de nouveau dénonciation.
[11] Cette entente, qui en partie a été négociée en présence d’une amie de Mme Gauvin, est signée par cette dernière sur recommandation non seulement de cette amie, mais de M. Daniel Joyal. Toutefois, Mme Gauvin n’est pas satisfaite et lorsqu’elle est convoquée au bureau de Me Girard, le 21 octobre suivant, elle lui fait part de son mécontentement. Toutefois, elle accepte de payer tous les honoraires qu’il lui réclame sans mot dire.
[12] Relativement à ces honoraires réclamés et payés et dont elle demande le remboursement, Mme Gauvin ajoute qu’elle a tenté d’en tirer une déduction fiscale, mais sans succès.
[13] Me Girard explique au Tribunal sa démarche. Il insiste sur l’obligation de moyen de l’avocat et aussi sur le fait que le contexte de l’affaire ne le rendait pas certain d’obtenir une ordonnance de mandat de paix. Donc, il a accepté de négocier avec le procureur de l’accusé de Mme Gauvin, préférant avoir une entente écrite de bonne foi où la personne visée prenait des engagements concrets plutôt que de faire un procès devant le juge et risquer de ne rien obtenir. C’est la raison pour laquelle il a agi ainsi.
[14] Il s’est avéré que cet engagement a été insuffisant pour obtenir la paix réclamée et que Mme Gauvin a dû retenir les services d’un autre procureur pour, cette fois-là, aller jusqu’au bout de la démarche et obtenir un mandat de paix contre son voisin, ce qui lui a procuré satisfaction.
[15] L’avocat doit toujours agir dans l’intérêt primordial du client. S’il accepte un mandat, il doit s’assurer de sa compétence pour le réaliser et l’informer de ses objectifs ainsi que de la variation de ces derniers avec l’évolution du dossier.
[16] Le Tribunal n’entrera pas dans l’analyse de la facturation, des remises, des factures et des reçus qui, finalement, n’ont pas de pertinence à l’égard de la décision qu’il doit rendre. Les parties s’entendent sur le montant qui a été payé.
[17] Mme Gauvin témoigne que la somme de 3 000 $ qu’elle a payée le 21 octobre faisait référence à un autre dossier que le mandat de paix puisqu’elle avait remis 800 $ en argent à Me Girard auparavant. Ce dernier conteste cette remise, mais ne peut affirmer avec conviction qu’il a remis la facture datée du 21 octobre 2011 le même jour où il a reçu le paiement de 3 000 $.
[18] Le Tribunal est d’opinion que Mme Gauvin n’a pas manifesté avec la diligence raisonnable dans les circonstances qu’elle ne voulait pas payer les honoraires que lui réclamait Me Girard. En effet, non seulement a-t-elle accepté ses demandes de payer les honoraires réclamés, mais au surplus, elle a tenté d’en tirer un bénéfice fiscal.
[19] Le Tribunal peut comprendre que Mme Gauvin n’a peut-être pas été constamment informée de façon correcte sur les intentions définitives de Me Girard à l’égard du mandat de paix et de la façon dont il avait l’intention de régler ce problème avec le voisin. L’incompréhension de Mme Gauvin la journée de la comparution devant le juge s’explique par un manque d’information et d’explications de Me Girard.
[20] Les plaintes déontologiques déposées devant le Syndic du Barreau ont été retirées par Mme Gauvin. Il apparaît au Tribunal que s’il y a eu des manquements de Me Girard dans le dossier, elles ont trait à la déontologie, notamment sur l’obligation qu’il avait de tenir sa cliente informée de toutes les démarches qu’il entreprenait et du but visé par les demandes de suspension devant le juge et les négociations avec la partie adverse.
[21] Cette démarche de Me Girard de négocier une entente plutôt que de procéder à la preuve pour l’émission d’un mandat de paix a été entérinée par Mme Gauvin sur les conseils de personnes qui l’accompagnaient ce matin-là.
[22] Rien dans la preuve ne permet de croire que Mme Gauvin n’était pas apte à donner un consentement libre et éclairé pour cette entente. Elle a peut-être senti, avec raison, être un peu bousculée par son procureur, mais rien ne met en doute que ce dernier cherchait d’abord et avant tout la protection des intérêts de sa cliente.
[23] Dans les circonstances de la présente affaire, le Tribunal ne peut agréer à la demande de Mme Gauvin de procéder à un remboursement d’honoraires et sa réclamation sera rejetée sans frais.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
REJETTE la réclamation de la demanderesse, Mme Pierrette Gauvin, contre le défendeur, Me Pascal Girard.
SANS FRAIS.
|
||
|
__________________________________ ANDRÉ J. BROCHET, J.C.Q. |
|
|
||
|
||
Date d’audience : |
9 juin 2014 |
|