Section des affaires sociales
En matière de services de santé et de services sociaux, d'éducation et de sécurité routière
Référence neutre : 2014 QCTAQ 07785
Dossier : SAS-M-226606-1407
JACQUES BOULANGER
c.
SOCIÉTÉ DE L'ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC
[1] Le requérant conteste une décision rendue en révision le 4 juillet 2014 par l’intimée, la Société de l’assurance automobile du Québec.
[2] Le requérant demandait la levée de la suspension de son permis de conduire pour une durée de 90 jours, qui lui avait été imposée à la suite d’une arrestation pour conduite avec les facultés affaiblies le 1 er juillet 2014.
[3] En révision, l’intimée rejette la demande de la requérante. Dans sa décision du 4 juillet 2014, elle précise que le requérant devait prouver de façon prépondérante que son taux d’alcool ne dépassait pas 80 milligrammes par 100 millilitres de sang, ou qu’il ne conduisait pas ni n’avait la garde de son véhicule. L’intimée conclut que le requérant ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve et elle maintient la suspension de 90 jours.
[4] Le Tribunal a pris connaissance de l’ensemble de la preuve documentaire versée au dossier et a écouté le témoignage du requérant. Séance tenante, il rejette le recours du requérant et confirme le bien-fondé de la décision de l’intimée. Le Tribunal rend ici les motifs au soutien de sa décision.
La preuve documentaire et testimoniale
[5] Les faits sont relatés dans le rapport intitulé « Rédaction de narration du formulaire Enquête sur la capacité de conduite affaiblie » rédigé par l’agent J. Tremblay. Ce rapport est déposé au dossier par l’intimée comme pièce I-1.
[6] Soulignons que les faits relatés au rapport I-1 ne sont pas contestés par le requérant. Nous ne nous attarderons qu’à ceux pertinents à la solution du litige :
· Le 1 er juillet 2014, à la suite d'un appel d’urgence d’un citoyen qui informe les autorités qu’il suit un véhicule qui circule de manière erratique, le service de police de la Régie intermunicipale de police [de Ville A] localise le véhicule et l’agent Tremblay, accompagné de l’agente Pelletier, participent à l’interception du requérant alors que ce dernier est au volant de son véhicule, stationné dans une station-service.
· Lors de son témoignage, le requérant admet qu’il était assis à la position du conducteur et qu’il avait les clés du véhicule en sa possession.
· Les agents constatent alors que le requérant dégage une forte odeur d’alcool et suivent les procédures requises par une telle situation, tel qu’il appert du rapport I-1.
· Les agents amènent le requérant au poste [de Ville A] pour que celui-ci soit soumis à un alcootest. Toutefois, aucun technicien qualifié n’est présent au poste à ce moment.
· Les agents sont alors dirigés au poste de la Sûreté du Québec à Ville B afin que le requérant puisse passer l’alcootest.
· Le premier test donne un résultat de 154 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang. Le second test présente un résultat de 152 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang, tel qu’il appert du certificat du technicien qualifié [1] . Dans les deux cas, le requérant dépasse largement le 80 milligrammes d’alcool par 100 millilitres de sang qui est la limite maximale autorisée par le Code de la sécurité routière [2] .
· Par la suite, le requérant se voit remettre le procès-verbal de suspension de permis [3] .
[7] Le requérant témoigne longuement en faisant la lecture du document déposé au soutien de sa requête introductive d’un recours [4] . Sa version diffère quelque peu de celle des agents. Il prétend qu’on ne lui a pas lu ses droits lors de l’arrestation, ce qui est contredit par le rapport I-1 [5] . Il ajoute qu’on lui a dit que le premier appareil pour l’alcootest était défectueux, alors que le rapport indique qu’aucun technicien qualifié n’était présent au poste[de Ville A].
[8] Compte tenu des résultats obtenus à l’alcootest, le requérant se dit surpris, car il prétend n’avoir consommé qu’une bière la journée précédente vers 16 h 30.
[9] Il insinue donc que les appareils étaient défectueux, car selon ses calculs, en tenant compte du temps écoulé depuis sa dernière consommation, il aurait dû avoir éliminé considérablement l’alcool de son organisme. Le requérant échafaude sa théorie sur les bonnes pratiques qu’il a apprises auprès de la Société d’assurance automobile du Québec (la SAAQ), pratiques qu’il dit suivre à la lettre.
[10] L’autre possibilité, selon le requérant, est que son métabolisme fonctionne beaucoup plus lentement que la majorité des individus, et qu’il élimine l’alcool dans des délais excédant largement ceux se trouvant dans la moyenne normale.
[11] Dans un cas ou dans l’autre, le requérant estime que la suspension devrait être levée, car il n’est responsable ni du bon fonctionnement de l’alcootest ni de la lenteur de son métabolisme, ayant suivi toutes les recommandations prescrites par la SAAQ.
[12]
L’intimée dépose une décision du Tribunal,
J. J.
c.
Société de
l’assurance automobile du Québec
Les dispositions applicables
[13] Les articles suivants du Code de la sécurité routière s’appliquent en l’espèce :
« 5.1. Pour l'application des articles 35, 36, 97, 98.1, 202.1.2 à 202.1.4, 202.2, 202.2.1, 202.4, 202.6.6 et 519.70, une personne est présumée avoir la garde ou le contrôle d'un véhicule routier lorsqu'elle occupe la place ou la position ordinairement occupée par le conducteur dans des circonstances qui permettent de croire qu'elle risque de mettre le véhicule en mouvement. »
« 202.4. Un agent de la paix suspend sur-le-champ au nom de la Société:
1° pour une période de 90 jours, le permis de toute personne qui conduit un véhicule routier ou qui en a la garde ou le contrôle et dont l'alcoolémie se révèle, par suite d'une épreuve d'alcootest effectuée conformément aux dispositions du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46), supérieure à 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang;
(…) »
« 202.6.6. La Société lève la suspension du permis ou du droit d'en obtenir un si la personne concernée établit de façon prépondérante:
(…)
2° qu'elle conduisait le véhicule routier ou en avait la garde ou le contrôle sans avoir consommé une quantité d'alcool telle que son alcoolémie dépassait 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang;
(…)
4° qu'elle ne conduisait pas un véhicule routier ou n'en avait pas la garde ou le contrôle dans les cas prévus au présent article.
(…) »
« 202.6.7. Le procès-verbal et tout autre document pertinent dressés par l'agent de la paix peuvent tenir lieu de ses constatations si ce dernier y atteste qu'il a lui-même constaté les faits qui y sont mentionnés. Il en est de même de la copie du procès-verbal certifiée conforme par une personne autorisée.
Une copie du certificat du
technicien qualifié visé à l'article
Les motifs
[14] En vertu des articles ci-dessus mentionnés, le requérant devait présenter une preuve prépondérante quant aux deux aspects suivants :
· il ne conduisait pas son véhicule ou n’en avait pas la garde et le contrôle;
· dans le cas contraire, que son alcoolémie ne dépassait pas 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang.
[15] Le Tribunal est d’avis que le requérant n’a pas présenté une telle preuve. Il admet qu’il était au volant du véhicule et avait les clés en sa possession. Il avait donc la garde et le contrôle de son véhicule.
[16] La prétention du requérant quant au bon fonctionnement de l’alcootest ne repose sur aucune preuve sérieuse. Aucune expertise ne soutient cette affirmation du requérant.
[17] Enfin, le requérant n’appuie son argument relatif à la lenteur de son métabolisme à éliminer l’alcool d’aucune expertise médicale. Qui plus est, il va de soit que, si effectivement son métabolisme était plus lent que la normale pour éliminer l’alcool, le requérant ne devrait être que plus prudent dans sa consommation d’alcool lorsqu’il a l’intention de conduire son véhicule.
[18]
Le Tribunal estime donc que l’article
[19] Conséquemment, le Tribunal estime que le requérant ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve et que la décision rendue en révision le 4 juillet 2014 par l’intimée doit être maintenue.
POUR CES MOTIFS , le Tribunal :
REJETTE le recours;
CONFIRME la décision rendue en révision le 4 juillet 2014 par l’intimée.
Dussault, Mayrand Avocats
Me Mario Forget
Procureur de l'intimée