RÉGIE DES ALCOOLS, DES COURSES ET DES JEUX
DÉCISION
[1] Le 16 mai 2014, la Régie des alcools, des courses et des jeux (la Régie) a adressé à la titulaire un avis de convocation à une audience afin d’examiner et d’apprécier les allégations décrites aux documents annexés à l’avis, d’entendre tout témoignage utile aux fins de déterminer s’il y a eu ou non manquement à la loi et, le cas échéant, suspendre les permis de la titulaire.
LES FAITS
[2] Les faits qui ont donné ouverture à la convocation se résument comme suit à l’avis :
[Transcription conforme]
Tolérer des boissons alcooliques acquises non conformément au permis :
Le 20 novembre 2013, les policiers ont saisi, dans votre établissement, le(s) contenant(s) de boisson(s) alcoolique(s) suivant(s) (Document 1) :
- 7 bouteille(s) de bière de 500 millilitre(s) de marque L'infusée, 5,4% alc./vol.
Ce(s) contenant(s) n'était(ent) pas marqué(s) (mention CSP ou timbre).
Ce(s) contenant(s) a (ont) été trouvé(s) dans le réfrigérateur du présentoir et dans la réserve.
Total en litres du (des) contenant(s) : 3,5 litre(s)
Changement d’actionnariat non déclaré
Selon nos dossiers, les actionnaires de la titulaire, les Restaurants La Pizzaiolle inc., sont monsieur Daniel Noiseux, et monsieur Paul Simard. (Document 2)
Or, un relevé CIDREQ du Registraire des entreprises, indique un actionnariat différent depuis au moins le 8 novembre 2013, soit le retrait de monsieur Daniel Noiseux, et monsieur Paul Simard et l’ajout de Gestion Sinox inc. Ces changements n'ont pas été déclarés à la Régie, et celle-ci n’a jamais reçu les documents relatifs à cette situation. (document 3)
AUTRES INFORMATIONS PERTINENTES :
Les Restaurant Pizzaiolle inc. est autorisé(e) à exploiter cet établissement depuis le 3 novembre 1981.
La date d'anniversaire du(des) permis est le 2 novembre.
L’AUDIENCE
[3] L’audience a eu lieu au Palais de justice de Montréal le 22 juillet 2014 en présence de M. Daniel Noiseux, responsable de la titulaire. M. Olivier Verdon et M e Marc Pilon représentaient la Direction du contentieux de la Régie.
Preuve de la Direction du contentieux
[4] M. Verdon déclare que la preuve de la Direction du contentieux repose sur la preuve documentaire contenue à l’avis de convocation et au rapport d’infraction (document 1), daté du 21 novembre 2013 et signé par l’agent Denis Yee du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM).
[5] Les faits reprochés concernent la saisie de sept contenants de bière de 500 millilitres, de marque L ‘Infusée , à 5,4 % d’alcool, qui ne portaient pas de mention CSP.
[6] En ce qui concerne le changement d’actionnariat non déclaré signalé dans l’avis de convocation, M. Verdon dépose, sous la pièce T-1 en liasse, les documents que la titulaire a transmis à la Régie, le 23 mai 2014, pour la mise à jour de son dossier.
Preuve de la titulaire
Témoignage de M. Daniel Noiseux
[7] M. Noiseux est restaurateur et administrateur de la compagnie titulaire. Il exploite des permis d’alcool depuis 1981 et c’est la première fois en 33 ans d’opération qu’il est convoqué devant la Régie.
[8] Comme il n’était pas présent lors de l’inspection policière, il propose que M. Alexandre Péloquin, directeur des opérations de l’établissement, témoigne des faits, puis de faire entendre M. Alain Thibault, directeur du développement des affaires et communications des Brasseurs du Monde .
Témoignage de M. Alexandre Péloquin
[9] M. Péloquin était présent lors de l’inspection policière au cours de laquelle il y a eu saisie de sept contenants de bière de marque L’Infusée .
[10] Il dépose, sous la pièce T-2 en liasse, deux factures des Brasseurs du Monde datées respectivement des 15 mai et 23 juillet 2013. Ces factures font chacune état de l’achat de deux caisses de douze bières L’Infusée .
[11] M. Péloquin affirme que les bières saisies provenaient des caisses scellées par les Brasseurs du Monde portant la mention « Québec - Droits acquittés ».
[12] Depuis la saisie policière, les mesures de contrôle ont été renforcées et chaque contenant de bière provenant du brasseur est vérifié lors de la réception des caisses.
Témoignage de M. Alain Thibault
[13] M. Thibault explique que Brasseurs du Monde est une micro-brasserie qui ne dispose pas d’équipement permettant l’application de timbre automatique. Les codes CSP sont donc apposés manuellement pour chacune des commandes d’établissements détenant des permis d’alcool.
[14] Il attribue à un accident de manutention le fait que des contenants non timbrés aient été placés dans des caisses portant la mention « Québec - Droits acquittés ».
[15] Depuis l’événement, une troisième vérification a été ajoutée aux deux premières avant la fermeture des caisses destinées aux établissements détenant des permis d’alcool.
[16] M. Thibault ajoute que la bière L’Infusée est très en demande et qu’en période estivale elle est difficile à obtenir autrement que par une commande faite aux Brasseurs du Monde .
Plaidoirie de la Direction du contentieux
[17] Considérant l’ensemble de la preuve testimoniale et documentaire, la Direction du contentieux laisse à l’appréciation de la soussignée le soin de déterminer si la titulaire a contrevenu à l’article 72.1 de la Loi sur les permis d'alcool [1] (LPA) .
LE DROIT
[18] Les dispositions légales qui s'appliquent dans le présent dossier sont les suivantes :
Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques [2] (LIMBA)
82.1. Sous réserve des droits qui lui sont conférés par la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13), à titre de titulaire de permis de production artisanale ou de producteur artisanal de bière, un titulaire de permis ne peut garder, posséder ou vendre dans son établissement:
[…]
3° de la bière qui n'a pas été achetée directement de la Société, d'un titulaire d'un permis de brasseur ou de distributeur de bière délivré en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec ou d'un agent d'un titulaire de permis de brasseur ou de distributeur de bière.
[…]
Loi sur les permis d'alcool [3] (LPA)
38. Dans le cas d'une société ou d'une personne morale, la délivrance d'un permis est subordonnée à l'obligation, qu'outre la société ou la personne morale, chacun des associés ou chacun des administrateurs et des actionnaires détenant 10% ou plus des actions comportant plein droit de vote de la personne morale en respecte toutes les conditions sauf, si elle est inscrite à une bourse canadienne, celles prévues à l'article 36.
72. Une société ou une personne morale visée dans l'article 38, qui est titulaire d'un permis, doit faire connaître à la Régie, au moyen d'un formulaire prescrit par celle-ci, tout renseignement pertinent relatif à un changement parmi les personnes mentionnées dans cet article, dans les dix jours du changement.
72.1. Un titulaire de permis autorisant la vente ou le service de boissons alcooliques ne doit tolérer dans son établissement que la présence de boissons alcooliques acquises, conformément à son permis, de la Société ou d'un titulaire de permis de production artisanale, de brasseur, de distributeur de bière ou de fabricant de cidre, délivrés en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13), ou d'un agent d'un tel titulaire de permis.
[…]
86. La Régie peut révoquer ou suspendre un permis si:
[…]
8° le titulaire du permis contrevient à une disposition des articles 70 à 72, 73, 74.1, 75, du deuxième alinéa de l'article 76, des articles 78, 82 ou 84.1 ou refuse ou néglige de se conformer à une demande de la Régie visée à l'article 110;
[…]
La Régie doit révoquer ou suspendre un permis si:
[…]
4° le titulaire du permis a contrevenu à l'article 72.1;
[…]
La Régie, dans la détermination de la sanction administrative pour contravention à l'article 72.1, tient compte notamment des facteurs aggravants suivants:
a) la quantité de boissons alcooliques ou d'appareils de loterie vidéo;
b) le fait que les boissons alcooliques sont de mauvaise qualité ou impropres à la consommation;
c) le fait que les boissons alcooliques sont fabriquées frauduleusement ou falsifiées;
d) le fait que le titulaire du permis a contrevenu à l'article 72.1 dans les cinq dernières années;
e) le fait que les boissons alcooliques ne sont pas commercialisées par la Société des alcools du Québec et qu'elles ne sont pas fabriquées, embouteillées ou livrées conformément à un permis délivré en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13).
ANALYSE
[19]
Une
titulaire de permis d'alcool ne peut tolérer dans son établissement que des
boissons alcooliques acquises conformément à ses permis. C'est ce que prévoit
l'article
[20] Dans le présent dossier, les témoignages entendus et le dépôt de factures démontrent que la bière de marque L’Infusée saisie a été acquise auprès du distributeur autorisé, les Brasseurs du Monde , et que l’absence du code CSP sur ces contenants de bière serait due à une erreur de manutention du distributeur.
[21] Le directeur des opérations de l’établissement ainsi que le représentant de Brasseurs du Monde ont affirmé avoir renforcé leurs mesures de contrôle afin de s’assurer de la présence de la mention CSP sur tous les contenants de bière placés dans les caisses identifiées « Québec - Droits acquittés » .
[22] Dans les circonstances, le Tribunal de la Régie conclut que la titulaire n’a pas toléré, dans son établissement, la présence de boissons alcooliques non autorisées.
PAR CES MOTIFS, |
N'INTERVIENT PAS contre la titulaire dans le présent dossier.
|
|
Régisseure |