Thibodeau c. Club de motos-neige du Comté de Champlain inc. |
2014 QCCQ 8174 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
TROIS-RIVIÈRES |
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LOCALITÉ DE |
TROIS-RIVIÈRES |
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« Chambre civile » |
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N° : |
400-32-012581-141 |
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DATE : |
20 août 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
PIERRE LABBÉ, J.C.Q. |
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JEAN THIBODEAU, |
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Demandeur |
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c. |
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CLUB DE MOTOS-NEIGE DU COMTÉ DE CHAMPLAIN INC., |
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Défenderesse |
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JUGEMENT |
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[1] Le demandeur réclame à la défenderesse 250 $ représentant la franchise de sa police d’assurance. Il réclame cette somme parce que le 30 décembre 2013, au volant de sa motoneige dans un sentier aménagé et entretenu par la défenderesse, il a percuté un fil d’acier qui a endommagé sa motoneige. Selon la facture produite (P-1), les dommages à la motoneige ont totalisé 1 469,52 $. Le demandeur a reçu de sa compagnie d’assurance, L’Unique Assurances générales, une indemnité de 1 219,51 $, d’où la réclamation pour la franchise de 250 $.
[2] La défenderesse conteste la réclamation, invoquant principalement la clause d’exonération de responsabilité signée par le demandeur lorsqu’il est devenu membre d’un club de motoneige, même s’il ne s’agit pas du club du comté de Champlain.
[3] Le 30 décembre 2013, le demandeur circulait au volant de sa motoneige sur un sentier entretenu par la défenderesse, dans la municipalité de Saint-Séverin-de-Proulxville.
[4] Le demandeur circulait en convoi avec deux amis, soit André Villemure qui le devançait et Michel Paillé qui le suivait.
[5] Entre le 18 décembre et le 30 décembre, le sentier a été dévié plus bas que ce qu’il était auparavant.
[6] En circulant à une vitesse d’environ 35 à 40 kilomètres/heure, la motoneige du demandeur a heurté un fil d’acier qui traversait le sentier d’un côté à l’autre.
[7] La motoneige du demandeur était équipée d’un système anti-louvoiement qui permet une meilleure tenue de la motoneige. La défenderesse soutient que c’est à cause de ce système que la motoneige du demandeur a heurté le fil d’acier.
[8] André Villemure a mentionné que sa motoneige est munie du même système, qu’il devançait le demandeur et qu’il n’a pas heurté de fils.
[9] Les photographies produites montrent que la motoneige du demandeur a été renversée, lui-même ayant été éjecté selon ce qu’a constaté monsieur Paillé qui le suivait.
[10] À l’aide de pinces, une personne a coupé le fil d’acier. Il n’a pu être enlevé que dans le sentier puisque des deux côtés il était pris dans la glace.
[11] Personne ne sait comment ce fil d’acier s’est retrouvé à cet endroit.
[12] Monsieur Villemure a mentionné qu’en avant de l’endroit où est survenu l’accident, il y avait plusieurs broches qui dépassaient dans le sentier, mais qui n’ont pas causé d’accident.
[13] Le droit d’accès ou permis de sentier obtenu par le demandeur contient, au verso, une déclaration qui est commune à ce genre de document et dont le texte pertinent est le suivant :
En devenant membre d’un club de motoneige, je soussigné(e), propriétaire de la motoneige ci-haut décrite, déclare assumer la responsabilité découlant de l’utilisation d’un sentier conformément au règlement sur la motoneige dont le texte est disponible à la Fédération. Je déclare bien connaître les risques notamment ceux reliés à la présence de branches d’arbres, de pierres et de terre sur le sentier ainsi que les risques inhérents à l’entretien et à la signalisation d’un sentier. Je déclare en conséquence renoncer à tout recours que je pourrais avoir pour tous les dommages, de quelque nature qu’ils soient, que je pourrais subir en utilisant un sentier.
[14] Ce texte est une clause de limitation de responsabilité prévue à l’article 1474 C.c.Q. :
1474. Une personne ne peut exclure ou limiter sa responsabilité pour le préjudice matériel causé à autrui par une faute intentionnelle ou une faute lourde; la faute lourde est celle qui dénote une insouciance, une imprudence ou une négligence grossières.
Elle ne peut aucunement exclure ou limiter sa responsabilité pour le préjudice corporel ou moral causé à autrui.
[15] Le recours du demandeur est basé sur l’article 1457 C.c.Q. qui traite de la responsabilité civile dans les termes suivants :
1457. Toute personne a le devoir de respecter les règles de conduite qui, suivant les circonstances, les usages ou la loi, s'imposent à elle, de manière à ne pas causer de préjudice à autrui.
Elle est, lorsqu'elle est douée de raison et qu'elle manque à ce devoir, responsable du préjudice qu'elle cause par cette faute à autrui et tenue de réparer ce préjudice, qu'il soit corporel, moral ou matériel.
Elle est aussi tenue, en certains cas, de réparer le préjudice causé à autrui par le fait ou la faute d'une autre personne ou par le fait des biens qu'elle a sous sa garde.
[16] Pour réussir dans son recours, le demandeur devait établir, par une preuve prépondérante, que la défenderesse a commis une faute et que cette faute a causé les dommages réclamés.
[17] Au surplus, en présence d’une clause de limitation de responsabilité, le texte de l’article 1474 C.c.Q. impose au demandeur de prouver la faute lourde ou la négligence grossière de la défenderesse.
[18] La Loi sur les véhicules hors route [1] énonce à l’article 16 les obligations du club :
16. Tout club d'utilisateurs de véhicules hors route doit aménager, signaliser et entretenir les sentiers qu'il exploite.
De plus, il doit en assurer la sécurité et veiller au respect des dispositions de la présente loi et de ses règlements d'application, notamment par l'entremise d'agents de surveillance de sentier.
17. Tout club d'utilisateurs de véhicules hors route qui aménage ou exploite un sentier doit souscrire annuellement une police d'assurance de responsabilité civile d'au moins 2 000 000 $.
[19] La défenderesse a produit au dossier trois jugements dans des affaires semblables et dans lesquels la réclamation a été rejetée parce que la partie demanderesse n’avait pas fait la preuve d’une faute lourde ou d’une négligence grossière.
[20] Dans l’une de ces décisions [2] , le juge Chapdelaine écrivait ceci relativement à la faute lourde :
[9] Par faute lourde, il faut entendre une attitude, des gestes ou des omissions qui démontrent un mépris total des intérêts d'autrui.
(Référence omise)
[21] La preuve ne révèle pas que la défenderesse a été négligente dans l’entretien du sentier. Son président, Normand Drolet, a appris l’existence du fil d’acier qu’après l’accident.
[22] Selon la preuve qui a été faite, le Tribunal en vient à la conclusion que le demandeur n’a pas établi, par une preuve prépondérante, que la défenderesse a commis une faute lourde ou a fait preuve de négligence grossière dans l’entretien du sentier.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[23] REJETTE la demande;
[24] CONDAMNE le demandeur à payer à la défenderesse les frais de contestation de 112 $.
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__________________________________ PIERRE LABBÉ, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
18 août 2014 |
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[1] RLRQ, c. V-1.2.
[2]
Blanchette
c.
Club de Motos-Neige des Érables inc.,
C.Q.
Drummond,