CORPORATION DES MAÎTRES MÉCANICIENS
EN TUYAUTERIE DU QUÉBEC

Comité de qualification

 

 

 

No du dossier :

5681-3207

 

Date :

  12 août 2014

 

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Membres du comité :

 

Réjean Cloutier, président

 

Claude Lenghan

Réjean Vignola

 

 

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CORPORATION DES MAÎTRES MÉCANICIENS EN TUYAUTERIE DU QUÉBEC (CMMTQ)

 

c.

 

9292-9470 QUÉBEC INC.

 

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 DÉCISION

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[1]            9292-9470 Québec inc. (ci-après, 9292) demande la délivrance d’une licence d’entrepreneur. Richard Hudon est président, secrétaire et actionnaire à 50 % de l’entreprise. Il demande à être répondant en administration, en sécurité, en gestion de chantiers de construction et en exécution de travaux pour les sous-catégories 15.1 à 15.5. Claude Jannelle détient 50 % des actions de l’entreprise et il demande à être répondant pour des sous-catégories relevant de la Régie du bâtiment du Québec ainsi qu’en administration, en sécurité et en gestion de chantiers de construction.

[2]            Le 13 juin 2014, la CMMTQ convoque 9292 à une audience devant le comité de qualification de la CMMTQ, aux motifs que Claude Jannelle a été dirigeant de 9184-4282 Québec inc. (ci-après, Global Habitation) qui a déclaré faillite et de C. Jannelle Construction inc. (ci-après, Jannelle Construction), de 9244-7689 Québec inc. (ci-après, Groupe Global Habitation) et de 9244-7515 Québec inc. (ci-après, 9244-7515) qui ont cessé leurs activités d’entrepreneur.

[3]            Le 2 juillet 2014, Claude Jannelle et Richard Hudon sont présents et témoignent à l’audience devant le comité de qualification.

LA PREUVE

[4]            Les pièces suivantes sont déposées :

P-1         Lettre de convocation, datée du 13 juin 2014;

P-2         Rapport d’enquête composé d’une série de documents (206 pages).

Résumé des témoignages

[5]            Claude Jannelle a travaillé dans le domaine de la construction comme entrepreneur général pendant plusieurs années.

[6]            Richard Hudon œuvre dans le domaine de la mécanique du bâtiment depuis plus de 40 ans. Il dirige notamment une entreprise de fabrication de maisons et autres produits préfabriqués, L’Univers du modulaire. Claude Jannelle y travaille comme gestionnaire de projets depuis janvier 2014.

[7]            Claude Jannelle a été dirigeant de Global Habitation qui œuvrait comme promoteur immobilier et constructeur de condominiums depuis 2007. Les difficultés financières de cette entreprise découlent de problèmes pour obtenir un permis de construction suite à l’achat d’un terrain.

[8]            Après avoir réalisé un projet de condominiums à Candiac, Global Habitation a fait l’acquisition pour 1.8 M $ d’un autre terrain à Candiac adjacent à un marais et à l’autoroute 30. Un délai de près de 5 ans s’est écoulé avant que le permis de construction puisse être émis, en raison notamment de problèmes de contamination du terrain et de délais administratifs de la part des autorités concernées pour la délivrance du permis. Entretemps, Global Habitation réalisait différents travaux de construction et avait démarré une usine de fabrication de structures modulaires (panneaux de murs, de planchers, etc.). Les revenus générés par ces deux divisions permettaient à l’entreprise de poursuivre les démarches pour l’obtention du permis de construction, lesquelles ont engendré des dépenses d’environ 1.6 M $. Faisant face à des problèmes de liquidité, Global Habitation a décidé de vendre le terrain et a déposé une proposition concordataire à ses créanciers à l’automne 2013, mais n’a pas pu éviter la faillite.

[9]            Claude Jannelle était un des administrateurs et le seul répondant de Global Habitation. Il participait aux réunions du conseil d’administration et examinait les états financiers trimestriels de l’entreprise. Il supervisait également l’usine et les travaux de construction. Il explique que le terrain n’avait pas de valeur sans permis de construction. Global Habitation n’avait donc pas le choix de poursuivre les démarches pour obtenir ce permis.

[10]         Denis Grégoire, l’autre administrateur et actionnaire de Global Habitation, a investi la majorité des fonds dans l’entreprise. Au mois de février 2014, Claude Jannelle s’est retiré de Global Habitation et a été dégagé de toute responsabilité relativement aux dettes de l’entreprise et aux cautionnements personnels fournis suite à une entente intervenue avec Denis Grégoire.

[11]         En ce qui concerne Groupe Global Habitation, cette compagnie de gestion détenait une licence mais n’a jamais eu d’activités d’entrepreneur en construction. Elle s’occupait uniquement de l’administration et des payes des salariés de Global Habitation. Les difficultés financières de Global Habitation se sont répercutées sur Groupe Global Habitation qui n’a pas été payée pour ses services. À l’automne 2013, celle-ci a déposé une proposition concordataire qui a été acceptée par son principal créancier, le gouvernement. Cette entente est respectée.

[12]         Claude Jannelle a également été dirigeant de Jannelle Construction, une entreprise de construction qu’il avait démarrée avec sa conjointe. Ils en étaient les actionnaires via leur compagnie Gestion Brojan inc. Jannelle Construction a cessé ses activités d’entrepreneur en 2010, par manque de temps de ses dirigeants. Claude Jannelle consacrait tout son temps à Global Habitation.

[13]         La situation financière de Jannelle Construction était déficitaire depuis 2010. Jannelle Construction a été fusionnée à Gestion Brojan inc. au mois d’avril 2014. Cette dernière est toujours active et a assumé les dettes de Jannelle Construction.

[14]         Concernant 9244-7515, Claude Jannelle s’était associé avec un partenaire promoteur immobilier pour réaliser un projet de construction à Eastman. Après avoir réalisé quelques travaux, une mésentente entre les deux dirigeants les ont menés à cesser les activités de l’entreprise, laquelle a été dissoute en 2014.

[15]         Claude Jannelle et Richard Hudon ont créé 9292 et souhaitent obtenir la licence d’entrepreneur pour faire l’installation des différents produits modulaires fabriqués par l’Univers du Modulaire. Celle-ci aura ainsi le contrôle sur la qualité des travaux et les coûts d’installation de ses produits modulaires.

Représentations du procureur de la CMMTQ

[16]         9292 a été convoquée devant le comité de qualification parce que Claude Jannelle a été dirigeant de Global Habitation dans les douze mois précédant la faillite de celle-ci survenue depuis moins de 3 ans.

[17]         9292 a également été convoquée parce que Claude Jannelle a été dirigeant de Jannelle Construction, de Groupe Global Habitation et de 9244-7515 dans les douze mois précédant la cessation d‘activités de ces dernières.

[18]         La preuve démontre clairement que l’ensemble de ces conditions sont rencontrées. Ces motifs prévus par la Loi sur le bâtiment (RLRQ, c. B-1.1) (ci-après, la Loi) donnent le pouvoir au comité de décider de délivrer ou de refuser de délivrer la licence à 9292.

[19]         La  Loi prévoit une période d’inhabilité de 3 ans lorsqu’un dirigeant a été impliqué dans une entreprise qui a fait faillite. Il n’y a pas de délai en ce qui concerne une cessation d’activités. Cependant, la Loi accorde au comité un pouvoir discrétionnaire, tant dans le cas d’une faillite que d’une cessation d’activités, qu’il peut exercer de façon favorable ou défavorable.

[20]         En ce qui concerne la cessation d’activités, elle est illégitime lorsque l’entreprise ne paie pas ses dettes.

[21]         Dans le cas de Jannelle Construction, celle-ci a été fusionnée récemment avec Gestion Brojan inc. qui en a assumé l’ensemble des dettes. La cessation d’activités de Jannelle Construction est donc légitime.

[22]         Groupe Global Habitation a déposé une proposition qui a été acceptée par ses créanciers. Le processus légal mis en place permet de régler les dettes de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’une cessation d’activités illégitime.

[23]         Quant à 9214-7515, les explications fournies par Claude Jannelle concernant la mésentente entre les deux partenaires peut constituer un motif valable de cessation d’activités. Il n’y a aucune preuve à l’effet que 9214-7515 a des dettes impayées.

[24]         Le comité ne devrait donc pas tenir compte de ces trois entreprises qui n’ont pas cessé leurs activités pour un motif illégitime.

[25]         La faillite de Global Habitation est importante et elle était prévisible. Il fallait être un peu téméraire pour penser que le projet débuterait un an après l’achat du terrain.

[26]         Denis Grégoire a injecté des fonds pour éviter la faillite de Global Habitation. Il est seul à assumer les obligations des administrateurs pour les dettes de l’entreprise et les engagements pris envers les fournisseurs, suite à l’entente dégageant Claude Jannelle de toute responsabilité pour ces dettes.

[27]         Claude Jannelle a fourni des explications et a démontré qu’il avait les connaissances requises comme répondant en administration. Une proposition concordataire a été présentée aux créanciers avant la faillite de Global Habitation. La probité de Claude Jannelle n’est pas mise en doute.

[28]         De plus, la présence de Richard Hudon dans 9292 est un élément à considérer. Il s’agit d’une personne de confiance qui compte 40 ans d’expérience comme maître mécanicien en tuyauterie.

[29]         Dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire et en tenant compte de l’ensemble des éléments favorables et défavorables du dossier, le comité doit décider s’il délivre ou non la licence d’entrepreneur de 9292.

LA DÉCISION

Le mandat de la CMMTQ

[30]         La CMMTQ s'est vue confier le mandat de surveiller l'administration de la Loi sur le bâtiment et de voir à son application relativement à la qualification professionnelle de ses membres ainsi qu'aux garanties financières exigibles de ceux-ci, le tout en vertu :

-        des articles 8.1 et 9.2 de la Loi sur les maîtres mécaniciens en tuyauterie (RLRQ, c. M-4);

-        des articles 129.3 et suivants de la Loi sur le bâtiment ;

-        du Règlement relatif au mandat confié à la Corporation des maîtres électriciens du Québec et à la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec (RLRQ, c. B-1.1, r. 7); et

-        du Décret concernant une entente relative au mandat confié à la Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec eu égard à l'administration et à l'application de la Loi sur le bâtiment concernant la qualification professionnelle de ses membres et les garanties financières exigibles de ceux-ci (RLRQ, c. B-1.1, r. 5).

La loi

[31]         Aux fins du présent dossier, les dispositions législatives et réglementaires pertinentes sont les suivantes :

 

Loi sur le bâtiment

 

45.   Est réputé être dirigeant, pour l’application du présent chapitre, le membre d’une société ou, dans le cas d’une personne morale, l’administrateur, le dirigeant, ou l’actionnaire détenant 20 % ou plus des actions avec droit de vote ou, le cas échéant, la personne qui peut demander une licence pour le compte d’une société ou personne morale dans les cas déterminés par règlement de la Régie.

 

59.     La Régie peut refuser de délivrer une licence à une personne physique qui a été dirigeant d’une société ou personne morale dans les 12 mois qui précèdent la faillite de celle-ci, dans le cas où cette faillite est survenue depuis moins de trois ans de la date de la demande.

 

[…]

 

          Le présent article s’applique dans le cas d’une personne physique qui demande une licence pour le compte d’une société ou personne morale.

 

59.1   La Régie peut refuser de délivrer une licence à une personne physique qui demande une licence pour elle-même ou pour le compte d’une société ou personne morale et qui a été dirigeant d’une société ou personne morale dans les 12 mois précédant la cessation d’activités d’entrepreneur de cette société ou personne morale lorsqu’elle estime que cette cessation est due à des causes autres que le décès de l’un de ses dirigeants, l’accomplissement de son objet ou toute autre cause légitime.

 

61.     La Régie peut refuser de délivrer une licence à une société ou personne morale lorsqu’un de ses dirigeants :

 

  a été dirigeant d’une société ou personne morale dans les 12 mois précédant la faillite de celle-ci survenue depuis moins de trois ans;

 

[…].

 

  a été dirigeant d’une société ou personne morale dans les 12 mois précédant la cessation d’activités d’entrepreneur de cette société ou personne morale lorsqu’elle estime que cette cessation est due à des causes autres que le décès de l’un de ses dirigeants, l’accomplissement de son objet ou toute autre cause légitime.

 

110.   La Régie a pour mission de surveiller l’administration de la présente loi, notamment en vue d’assurer la protection du public.

 

111.   Pour la réalisation de sa mission, la Régie exerce notamment les fonctions suivantes :

 

[…]

 

  contrôler la qualification des entrepreneurs […] de façon à s’assurer de leur probité, leur compétence et leur solvabilité;

 

[…].

 

 

 

Règlement sur la qualification professionnelle des entrepreneurs et des constructeurs-propriétaires (RLRQ, c. B-1.1, r. 9)

 

1.   Dans le présent règlement, on entend par « répondant » une personne physique faisant affaires seule ou un dirigeant qui, à moins d’en être exempté en vertu de la Loi sur le bâtiment ou d’un règlement pris en vertu de cette Loi, a démontré, à la suite d’examens prévus par le présent règlement ou par tout autre moyen d’évaluation jugé approprié par la Régie du bâtiment du Québec en vertu du paragraphe 1° du premier alinéa de l’article 58 de cette Loi, qu’il possède les connaissances ou l’expérience pertinente dans la gestion d’une entreprise de construction et dans l’exécution de travaux de construction […].

 

2.    Est réputé être dirigeant au sens de l’article 45 de la Loi, un membre d’une société ou, dans le cas d’une personne morale, un administrateur, un dirigeant, un actionnaire détenant 20% ou plus des actions avec droit de vote;

 

[…].

Les motifs de la décision

[32]         En vertu des articles 59, 59.1, 61 (1°) et (5°) de la Loi, le comité doit déterminer s’il accepte de délivrer ou non une licence d’entrepreneur à 9292, compte tenu de l’implication de son dirigeant Claude Jannelle dans une entreprise qui a fait faillite et dans trois autres entreprises qui ont cessé leurs activités.

[33]         La preuve documentaire démontre que Claude Jannelle était un dirigeant de Global Habitation dans les douze mois précédant la faillite de celle-ci survenue le 13 mars 2014. Il était également un dirigeant de Jannelle Construction, de Groupe Global Habitation et de 9244-7515 dans les douze mois précédant la cessation d’activités de ces entreprises. L’ensemble des conditions prévues par la Loi sont rencontrées.

[34]         Le comité est d’accord avec le procureur de la Corporation, à savoir que Jannelle Construction, Groupe Global Habitation et 9244-7515 n’ont pas cessé leurs activités pour un motif illégitime. La preuve le démontre. Il n’y a pas lieu de tenir compte de l’implication de Claude Jannelle dans ces entreprises.

[35]         En ce qui concerne la faillite de Global Habitation, elle résulte notamment des difficultés à obtenir le permis de construction suite à l’achat d’un terrain. Les explications fournies par Claude Jannelle démontrent qu’il a agi de bonne foi et qu’il voulait éviter la faillite de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’une faillite frauduleuse, mais qui fait suite à des circonstances attribuables à une situation plus ou moins sous le contrôle des dirigeants.

[36]         Le comité ne doute pas de la probité de Claude Jannelle. Il s’agit d’une personne honnête, qui n’a pas tenté d’éluder ses obligations. L’implication de Claude Jannelle comme dirigeant de 9292 ne met pas en péril la protection du public.

[37]         Le comité tient également compte de la présence d’un autre dirigeant dans 9292, Richard Hudon, qui est un gestionnaire émérite. Les activités de 9292 sont bien définies et il y a peu de risque que celle-ci se retrouve en faillite.

[38]         Considérant l’ensemble de ces éléments, le comité exerce favorablement sa discrétion en faveur de Claude Jannelle en lui permettant d’agir en tant que dirigeant et répondant de 9292.

[39]         PAR CES MOTIFS, le comité de qualification de la CMMTQ,

PERMET la délivrance d’une licence d’entrepreneur à 9292-9470 Québec inc. pour les sous-catégories 15.1 à 15.5;

RETOURNE le dossier au service de la qualification de la CMMTQ pour les suites appropriées.

 

 

 

 

 

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Réjean Cloutier

Président

Comité de qualification