Colyer c. Langlois

2014 QCCQ 9874

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

BEAUHARNOIS

LOCALITÉ DE

SALABERRY-de-VALLEYFIELD

« Chambre civile »

N° :

760-32-015767-132

 

 

 

DATE :

14 juillet 2014

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

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BRUCE COLYER

Partie demanderesse

c.

MARCEL LANGLOIS

Partie défenderesse

 

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JUGEMENT

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[1]            Le  demandeur Colyer réclame la diminution du prix de vente de la maison qu’il a achetée du défendeur Langlois le 8 novembre 2012, au motif que le système d’évacuation des eaux usées était totalement inexistant, contrairement à ce qui avait été représenté lors de la vente, soit qu’un puisard sec (dry well) recueillait les eaux usées.

[2]            Le défendeur soulève qu’il s’agit d’un vice apparent qui pouvait être découvert très facilement.

[3]            Il indique qu’il ignorait que les eaux usées de la maison s’évacuaient directement dans la rivière et qu’il n’y avait pas de puisard sec.

[4]            Lors de l’audience, le défendeur offre une somme de 3 000,00$ au demandeur qui refuse.

LES FAITS

[5]            À l’automne 2012, le demandeur est à la recherche d’une maison et trouve, avec son agent,  la maison du défendeur Langlois, située sur le Chemin Ste-Claire à Rivière Beaudette, sur le bord de la rivière, qui est à vendre.

[6]            Le demandeur visite trois fois la maison qui est vacante depuis plusieurs mois.

[7]            Il est informé que la date de construction de la maison est inconnue et qu’elle n’est pas desservie par les égouts municipaux, étant équipée d’un puisard sec (dry well) dont l’emplacement exact est inconnu.

[8]            Le demandeur s’informe si le système d’évacuation des eaux fonctionne bien et on lui répond positivement car son expert préachat n’inspecte pas les systèmes d’égouts sanitaires.

[9]            Il vérifie sur internet ce qu’est un « dry well » et apprend qu’il ne s’agit pas d’un réservoir comme tel mais généralement d’une simple fosse avec du gravier.

[10]         Il ne vérifie pas également si ce genre d’installation est conforme aux lois environnementales.

[11]         Le 8 novembre 2012, il achète la maison au prix de 117 000,00$ et en prend possession.

[12]         Le 24 novembre 2012, il aperçoit du papier hygiénique sur la pente qui mène à la rivière, derrière sa propriété.  Quelques jours plus tard, il découvre un tuyau d’où sortent des résidus humains.

[13]         Il communique avec la Ville de Rivière Beaudette qui le met en contact avec une firme d’expert, Concept Envirosol, qui procède à un relevé des lieux, des tests et qui conclut rapidement que les eaux usées sont dirigées directement dans la rivière par un tuyau et qu’il n’y a aucun puisard sec sur place.

[14]         Ensuite, le demandeur retient les services d’une avocate, Me Élyse Turcotte, qui dénonce le problème par écrit au défendeur Langlois (P-3, lettre du 6 mai 2013).

[15]         Le défendeur retient lui-même les services d’un avocat et un échange de correspondance débute (P-4-a, P-4-b, P-4-c).

[16]         À l’été 2013, monsieur Colyer demande des soumissions à plusieurs firmes différentes pour l’installation d’un système septique, conforme aux lois environnementales.

[17]         Les soumissions sont transmises au défendeur.

[18]         Des offres de règlement sont soumises par le procureur du défendeur (P-5) mais refusées par le demandeur.

[19]         Au mois de juin 2013, le demandeur fait procéder aux travaux d’installation d’un système EcoBox suggéré par son expert, au coût de 9 500,00$ plus taxes.

[20]         Le 29 août 2013, le demandeur entreprend son recours en Cour du Québec, division des Petites créances, et accepte de réduire sa réclamation à 7 000,00$.

LE DROIT

[21]         Les articles 1726 et 1739 du Code civil du Québec sont pertinents à l’analyse du présent dossier :

« 1726.  Le vendeur est tenu de garantir à l'acheteur que le bien et ses accessoires sont, lors de la vente, exempts de vices cachés qui le rendent impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus.

 

Il n'est, cependant, pas tenu de garantir le vice caché connu de l'acheteur ni le vice apparent; est apparent le vice qui peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans avoir besoin de recourir à un expert.


1739.  L'acheteur qui constate que le bien est atteint d'un vice doit, par écrit, le dénoncer au vendeur dans un délai raisonnable depuis sa découverte. Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l'acheteur a pu en soupçonner la gravité et l'étendue.

 

Le vendeur ne peut se prévaloir d'une dénonciation tardive de l'acheteur s'il connaissait ou ne pouvait ignorer le vice. »

ANALYSE

[22]         En matière de vices cachés, le Tribunal doit déceler les quatre critères suivants :

-          Le vice est grave, c’est-à-dire qu’il cause des inconvénients sérieux à l’usage du bien et que l’acheteur n’aurait pas payé le prix convenu s’il l’avait connu;

 

-          Le vice est inconnu de l’acheteur au moment de la vente;

 

-          Le vice est caché, c’est-à-dire qu’il ne peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans devoir recourir à un expert;

 

-          Le vice est antérieur à la vente puisque la garantie porte sur l’état du bien au moment de la vente.

[23]         Dans le présent dossier, le demandeur allègue avoir fait l’objet de fausse déclaration de la part du vendeur puisqu’il n’existait aucun puisard sec sur le terrain, tel que mentionné dans la fiche descriptive (P-1) et à la déclaration du vendeur (P-9).

[24]         Le Tribunal retient cependant que le demandeur savait très bien que l’immeuble n’était pas équipé d’un système récent avec réservoir septique et champ d’épuration ou d’un autre type de système de traitement des eaux.

[25]         Le demandeur s’est informé à savoir ce qu’était un puisard sec et la preuve a démontré qu’il savait également qu’il aurait un jour à rendre ce système conforme aux normes en vigueur.

[26]         Conséquemment, l’absence de puisard sec et le fait que les eaux usées se jettent directement dans la rivière font en sorte que le demandeur doit remédier immédiatement au problème et qu’il ne pourra le faire à moyen ou long terme, tel qu’il l’espérait.

[27]         Dans les circonstances, le demandeur a dû débourser une somme importante afin de remédier au problème mais a, du même coup, donné une plus-value à sa maison par l’installation de ce système EcoBox dont la durée de vie utile sera certainement de plus de 25 ans, selon l’expert Bruce Dellner de la firme Concept Envirosol.

[28]         Or, le Tribunal estime que l’offre soumise par le défendeur Langlois, par lettre de son procureur, au montant de 3 000,00$ était très raisonnable et compensera adéquatement le demandeur en tenant compte du coût des travaux, de la durée de vie utile du nouveau système et de la plus-value qui en résulte pour la maison.

[29]         Le Tribunal croit le témoignage du défendeur Langlois qu’il ignorait que l’eau était expédiée directement à la rivière et qu’il n’y avait pas de puisard sec sur place.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

            ACCUEILLE la demande du demandeur en partie;

            DONNE ACTE de l’offre soumise par le défendeur séance tenante;

CONDAMNE  le défendeur, Marcel Langlois, à payer au demandeur la somme de 3 000,00$ avec les intérêts au taux légal, l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter de la mise en demeure du 10 mai 2013 et les frais judiciaires de 167,00$.

 

 


 

 

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CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

 


 

 

Date d’audience :

26 juin 2014

 

SECTION III

DU RETRAIT ET DE LA DESTRUCTION DES PIÈCES

 

Les parties doivent reprendre possession des pièces qu'elles ont produites, une fois l'instance terminée.  À défaut, le greffier les détruit un an après la date du jugement ou de l'acte mettant fin à l'instance, à moins que le juge en chef n'en décide autrement.

 

Lorsqu'une partie, par quelque moyen que ce soit, se pourvoit contre le jugement, le greffier détruit les pièces dont les parties n'ont pas repris possession, un an après la date du jugement définitif ou de l'acte mettant fin à cette instance, à moins que le juge en chef n'en décide autrement.  1994, c. 28, a. 20.