Saindon c. Groupe Danam-Bonzaï inc. |
2014 QCCQ 10525 |
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JB 4552
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
TERREBONNE |
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LOCALITÉ DE |
SAINT-JÉRÔME |
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« Chambre civile » |
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N° : |
700-32-028592-135 |
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DATE : |
29 SEPTEMBRE 2014 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : |
L’HONORABLE |
LYNE FOUCAULT, j.C.Q. |
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SIMON SAINDON et GABRIELLE MATHER-SENOSIER |
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Partie demanderesse |
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c. |
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GROUPE DANAM-BONZAÏ INC. |
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Partie défenderesse |
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JUGEMENT |
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DEMANDE ET CONTESTATION:
[1] Le 8 mars 2013, les demandeurs réclament un dépôt de 6 733 $ remis à la partie défenderesse le 5 novembre 2013 à l’occasion d’un contrat préliminaire visant à acquérir un immeuble à usage d’habitation, en l’occurrence une unité de condominium. Ils allèguent agir suite à un avis d’annulation du contrat d’achat du condominium et avoir mis la défenderesse en demeure de leur remettre le dépôt consenti.
[2] La défenderesse conteste la réclamation et oppose que les demandeurs se sont vus en défaut du contrat préliminaire intervenu, et qu’elle était en conséquence fondée à résilier ledit contrat et conserver le dépôt de 6 733 $ remis par les demandeurs.
[3] Sont notamment déposés au dossier de la Cour, le contrat préliminaire de vente en vue d’acquérir un immeuble à usage d’habitation, l’avis de défaut des promettant-acheteurs par le vendeur et l’avis d’annulation du contrat préliminaire par les acheteurs.
QUESTION EN LITIGE:
Les demandeurs sont-ils fondés en faits et en droit à réclamer le remboursement d’un dépôt de 6 733 $ consenti à la défenderesse dans le cadre d’un contrat préliminaire visant l’acquisition éventuelle d’un immeuble ?
LES FAITS:
[4] De l’ensemble de la preuve, le Tribunal retient les éléments suivants.
[5] Le demandeur explique que lui et sa copine ont convenu avec la défenderesse d’un contrat préliminaire dans le but d’acquérir une unité de condominium. À l’occasion de ce contrat intervenu le 5 novembre 2012, un dépôt de 6 733 $ a été fait. L’achat projeté de cette unité de condominium était prévu pour le 1 er juillet 2013. Les autorisations de crédit pour l’acquisition du condominium ont été dûment acceptées par l’institution financière des prometteurs-acheteurs, demandeurs aux fins des présentes.
[6] Il témoigne que suite à une perte d’emploi de sa copine survenue par la suite, l’achat de l’unité de condominium a été compromis de manière très sérieuse. Ainsi, en janvier 2013, il a amorcé une succession de rencontres avec le vendeur représentant la défenderesse dans le but d’annuler l’éventuel achat de l’unité de condominium. Faute d’entente à cet effet, le demandeur rapporte que le vendeur lui a proposé de céder ses droits dans le contrat préliminaire d’achat, ou de procéder à l’achat tel que projeté et de revendre ladite unité de condominium ensuite. Le demandeur témoigne que les options proposées par le vendeur n’étaient pas envisageables pour lui pour de nombreuses raisons qui sont exposées à l’audience.
[7] Le demandeur témoigne que suite à la demande de choix de matériaux par la défenderesse, il a voulu bénéficier d’un délai, ce qui lui a été refusé. Il exhibe l’avis de défaut de la défenderesse qui porte la date du 14 février 2013, lequel prend acte d’un premier refus de procéder au choix de matériaux par les demandeurs et prévoit une annulation du contrat préliminaire après sept jours de l’avis faute de s’amender de ces derniers. Cet avis informe également les demandeurs que le dépôt de 6 733 $ ne sera pas remboursé. Il s’en remet à l’avis qu’il a lui-même adressé à la défenderesse le 8 mars 2013 afin de refuser les recommandations de son vendeur pour solutionner son problème et demander l’annulation du contrat préliminaire. Il se réfère également à l’index aux immeubles pour démontrer que l’unité de condominium visée par le contrat a été vendue à un tiers acquéreur à la date prévue pour un prix supérieur de 10000.$ au prix qu’il avait lui-même convenu.
[8] Le demandeur ajoute enfin qu’il a tenté d’obtenir l’information utile relativement aux prétentions de la défenderesse quant à des dommages occasionnés par cette annulation demandée du contrat préliminaire, cette demande est restée sans réponse.
[9] La défense repose sur la proposition faite aux demandeurs de vendre pour eux leur future unité de condominium. Le représentant de la défenderesse oppose également que le refus de remettre le dépôt aux demandeurs se justifie par le défaut de ces derniers à respecter ledit contrat préliminaire suivant les termes de celui-ci, et sur les dommages subis par la défenderesse par ce bris de contrat. À ce chapitre, elle n’a toutefois pas demandé à être indemnisée pour de tels dommages, ni à l’occasion d’une précédente demande en justice, ni par une demande reconventionnelle dans le cadre de la présente affaire. Ces dommages allégués demeurent vaguement exposés et constitués principalement de dérangements plutôt minimes d’ordre administratif. Le contrat préliminaire d’achat en cause ne prévoit aucune clause de dommages liquidés, ni convention d’arrhes, ni clause pénale.
[10] Les articles 9 et 10 dudit contrat préliminaire en vue d’acquérir un immeuble à usage d’habitation sont ceux suivant lesquels la défenderesse invoque son droit à retenir le dépôt consenti par le demandeur.
[11] Ces articles sont tels que ci-après libellés :
9.0 DÉFAUTS DU PROMETTANT-ACHETEUR ET DROIT DE RÉSILIATION DU VENDEUR
9.01 En application et en sus de l'article 31 du contrat, le promettant-acheteur sera en défaut:
- s'il devient insolvable, est en faillite ou commet un acte de faillite;
- s'il ne se conforme pas, d'une manière ou d'une autre, au présent contrat;
- s'il refuse ou néglige de répondre avec diligence aux demandes du vendeur quant aux formalités essentielles relativement à la passation de la vente ou refuse ou néglige de procéder à ses choix de couleurs, matériaux et finis ou gêne, par son comportement ou sa négligence, le vendeur dans la construction de l'immeuble et l'exécution du présent contrat;
- s'il refuse ou néglige de satisfaire avec diligence aux demandes du prêteur hypothécaire ou du notaire instrumentant;
- s'il ne remplit pas l'une quelconque de ses obligations ou l'un quelconque de ses engagements énoncés aux présentes.
9.1 Le vendeur donnera un avis écrit au promettant-acheteur si ce dernier se trouve en défaut de remplir une ou plusieurs de ses obligations aux termes du présent contrat ou de respecter les engagements, les déclarations, les garanties, les actes de reconnaissance et les obligations devant être respectés aux termes du présent contrat.
9.3 Si le promettant-acheteur ne remédie pas à son défaut dans les sept (7) jours suivants la réception de cet avis, alors, à la seule discrétion du vendeur, le présent contrat sera annulé et le vendeur aura le droit de disposer de l'Immeuble de la manière qu'il choisira, sans recours possible de la part du promettant-acheteur, le tout sous réserve de tous les droits et recours du vendeur.
9.4 Dans pareil cas, en application de l'article 31 du contrat, le vendeur retiendra tous les dépôts que le promettant-acheteur aura remis à titre de compensation pour les coûts, dommages et pertes de revenu découlant de l'annulation du présent contrat, sous réserve du droit du vendeur d'exiger le paiement de tous les montants, pertes ou dommages non couverts par les dépôts.
10.0 ABSENCE DE DÉFAUT DU PROMETTANT-ACHETEUR
10.1 Si le promettant-acheteur ne se trouve pas en défaut aux termes du présent contrat et qu'il est mis fin au présent contrat dans des circonstances telles que le promettant-acheteur a droit au remboursement de ses dépôts, alors, sous réserve des dispositions précises contenues aux présentes, tous les dépôts payés par le promettant-acheteur à valoir sur le prix d'achat seront remboursés au promettant-acheteur.
10.2 Cependant, le vendeur ne sera pas tenu de rembourser les sommes payées par le promettant-acheteur pour la décoration ou pour des améliorations, modifications ou extras apportés à l'Immeuble.
10.3 Le vendeur ne peut en aucun cas être tenu responsable d'aucun dommage ni coût ni, sans que soit limitée la portée générale de ce qui précède, d'aucune somme payée au vendeur au titre des options, des améliorations, des changements, des suppléments, de la personnalisation de l'immeuble, de la perte d'une affaire, de coûts de relocalisation ou de la perte de dépôts ni des honoraires professionnels ou autres frais payés relativement à la vente. Le présent article pourra être invoqué par le vendeur comme une défense suffisante contre toute réclamation de toutes sortes.
ANALYSE ET CONCLUSION:
[12]
Dans un premier temps, le Tribunal qualifie ce dépôt effectué par les
promettant-acheteurs comme un acompte à valoir sur le prix de vente de
l’éventuelle acquisition de l’unité de condominium, la preuve offerte n’ayant
aucunement permis de réfuter la présomption prévue par l’article
[13] Sur cette question du droit au remboursement de l’acompte, le Tribunal cite l’Honorable Georges Massol dans l’affaire Ali c. D’Elia :
1711. Toute somme versée à l'occasion d'une promesse de vente est présumée être un acompte sur le prix, à moins que le contrat n'en dispose autrement.
[14] Les auteurs les plus souvent cités au Québec en matière de vente ne semblent pas s'entendre sur la nature et les effets d'un acompte donné dans le cadres d'une promesse d'achat acceptée.
[15] Pour les professeurs Jobin et Cumyn, lorsque la vente ne se réalise pas, l'acompte doit en principe être remboursé au promettant-acheteur [1] :
- Qualification - La principale difficulté dans ce domaine en est une de qualification. Quand le promettant-acheteur verse une somme d'argent lors de la promesse, est-on en présence d'une convention d'arrhes, d'une faculté de dédit, d'une clause pénale ou seulement d'un acompte sur le prix ? Il arrive assez souvent, en effet, que le promettant-acheteur donne un acompte sur le prix uniquement pour prouver sa volonté ferme; il n'y a alors ni convention d'arrhes, ni faculté de dédit, ni clause pénale, et si la vente ne se réalise pas, l'acompte doit être remboursé au promettant-acheteur. Lorsque le promettant-acheteur est responsable de la non-réalisation de la vente, il est passible de dommages-intérêts ; la compensation judiciaire est alors possible entre le montant des dommages-intérêts et celui de l'acompte.
La jurisprudence rendue sous l'empire du Code civil du Bas-Can ada voyait a priori le versement d'un montant d'argent comme un acompte, même si ce code envisageait explicitement la possibilité qu'il s'agisse d'arrhes. Le Code civil du Québec a renforcé cette jurisprudence en édictant que «toute somme versée à l'occasion d'une promesse de vente est présumée être un acompte sur le prix, à moins que le contrat n'en dispose autrement». Désormais, la convention d'arrhes, la faculté de dédit ou la clause pénale doivent être très claires; en cas de doute, le versement d'une somme d'argent doit être considéré comme un simple acompte sur le prix. (soulignement du Tribunal)
Ces auteurs ajoutent cependant que lorsque l'acheteur est responsable de la non-réalisation de la vente, il est passible de dommages-intérêts et que, dans un tel cas, la compensation judiciaire peut-être possible entre le montant de dommages-intérêts et celui de l'acompte [2] .
Concernant l'évaluation de tels dommages, ces auteurs écrivent :
-Recours contre le promettant
Les dommages-intérêts accordés au vendeur correspondent à la différence entre le prix de la promesse et la valeur marchande du bien, ou entre le prix de la promesse et le prix de revente du bien à un tiers, si le vendeur, obligé de revendre à perte, a fait diligence pour obtenir le prix le plus avantageux.
À ces montants peuvent s'ajouter le remboursement de certains frais occasionnés par la vente ou l'échec de celle-ci [3] .
Pour Denys-Claude Lamontagne [4] , en principe, les contractants ne peuvent se dédire unilatéralement de la promesse synallagmatique et l'acompte constitue normalement un versement partiel du prix, qui n'autorise pas la rétractation, les parties restant liées par la promesse bilatérale [5] .
L'auteur ajoute cependant:
Le promettant-acheteur qui s'est placé dans l'impossibilité de respecter son engagement risque de perdre son acompte , à titre de dommages-intérêts correspondant au préjudice réel (art. 1607, 1611 C.c.Q . [6] (soulignement du Tribunal)
Ainsi, selon la première thèse, l'acompte est en principe remboursable, à moins que le vendeur prouve que le promettant-acheteur est responsable de la non-réalisation de la vente alors que, selon la seconde, il semble que le promettant-vendeur peut conserver l'acompte, à charge par lui d'en justifier le montant par la démonstration des dommages qu'il a soufferts.
Dans une cause récente [7] , la Cour supérieure semble adopter une solution mitoyenne en décidant qu'un promettant-acheteur peut obtenir le remboursement d'un acompte, même si l'inexécution de la vente est attribuable à sa seule faute, à moins de stipulations contraires dans la promesse d'achat. Toutefois, nous dit la Cour, ce montant est susceptible d'être réduit par celui des dommages-intérêts auxquels le promettant-vendeur peut avoir droit si les motifs invoqués par le promettant-acheteur pour ne pas donner suite à son engagement sont mal fondés.
Selon cette analyse, qui ressemble en définitive à celle développée par les professeurs Jobin et Cumin, l'acompte serait en principe remboursable sauf sur démonstration de la part du vendeur que la non-réalisation de la vente est due à la faute du promettant-acheteur ou à une raison qui ne peut être considérée comme raisonnable. En cas de conservation du dépôt par le vendeur, ainsi que sur preuve d'un dommage, compensation judiciaire peut être opérée.
[16] Dans un deuxième temps, le Tribunal est également d’opinion que, sans égard à la faute alléguée des demandeurs, la défenderesse n’a aucunement démontré avoir subi quelque dommage ou préjudice résultant de l’annulation de la vente à intervenir de l’unité de condominium. La preuve est plutôt à l’effet contraire, puisque outre quelques dérangements administratifs, la défenderesse qui n’a subi aucun dommage a même revendu l’unité de condominium à meilleur prix. Mais surtout, elle n’a en aucun temps saisi ce tribunal afin de faire liquider ses droits quant à quelque dommage allégué, ce qui aurait pu permettre, sous toutes réserves de la preuve à offrir, une compensation judiciaire à même les présentes conclusions.
[17] Mais qui plus est, le Tribunal ne retient pas comme démontrée la faute du demandeur suivant les termes du contrat préliminaire tel que prétendu par la défenderesse.
[18]
Le Tribunal est plutôt d’opinion que le contrat préliminaire à usage
d’habitation intervenu entre les parties est à la fois un contrat d’adhésion et
de consommation (articles
[19] Sur cette qualification du contrat d’adhésion et de la clause abusive, le Tribunal cite l’honorable Rousseau- Houle de la Cour d’appel du Québec [8] :
Le contrat d'adhésion est ainsi défini:
1379. Le contrat est d'adhésion lorsque les stipulations essentielles qu'il comporte ont été imposées par l'une des parties ou rédigées par elle, pour son compte ou suivant ses instructions, et qu'elles ne pouvaient être librement discutées.
Tout contrat qui n'est pas d'adhésion est de gré à gré.
[20] Dans un tel contrat, le juge peut déclarer nulle une clause abusive ou réduire l'obligation qui en découle:
1437. La clause abusive d'un contrat de consommation ou d'adhésion est nulle ou l'obligation qui en découle, réductible.
Est abusive toute clause qui désavantage le consommateur ou l'adhérent d'une manière excessive et déraisonnable, allant ainsi à l'encontre de ce qu'exige la bonne foi; est abusive, notamment, la clause si éloignée des obligations essentielles qui découlent des règles gouvernant habituellement le contrat qu'elle dénature celui-ci.
[21] Les tribunaux, inspirés par la doctrine, ont longtemps vu dans cette notion d'adhésion non pas un acte juridique de nature particulière mais le rappel de la nécessaire protection, dans certains contrats, de la partie la plus faible. Différents facteurs comme la transformation de l'économie, la volonté de gérer rationnellement les risques, le développement du principe de l'égalité devant le service public et la standardisation de la vie moderne ont contribué à faire de maints contrats de la vie courante et du domaine des affaires de véritables contrats d'adhésion. Peu à peu, on a substitué à la description traditionnelle du contrat d'adhésion qui mettait essentiellement en lumière le déséquilibre des contractants, une définition qui permet d'appliquer le contrat d'adhésion aussi bien aux situations où ce déséquilibre existe qu'à celles quii mettent en cause des relations économiques entre partenaires de force comparable.
[22]
Ce qui distingue essentiellement le contrat d'adhésion du contrat par
négociation, c'est la détermination unilatérale par l'une des parties ou par un
tiers du contenu contractuel. L'autre partie perd la faculté de libre
négociation des conditions de son engagement en se voyant imposer d'avance les
éléments essentiels du contrat et en ne gardant que le choix parfois purement
théorique de contracter ou de ne pas contracter. Le législateur québécois, à
l'article
[…] ne s'est pas attaché au rapport inégal des forces entre les parties; du point de vue juridique, ne sont donc pas pertinentes aujourd'hui l'existence d'un monopole de droit ou de fait, la possibilité de faire affaires avec un concurrent, la compétence dans le domaine concerné ni la puissance économique ou commerciale. Le législateur a retenu deux éléments: il y a contrat d'adhésion quand la stipulations essentielles du contrat ne pouvaient être librement discutées, et qu'elles ont été imposées par la partie en position de force, rédigées par elle, pour son compte ou suivant ses instruction. [9]
[23] Puisque le concept du contrat d'adhésion n'est plus laissé à la discrétion de la jurisprudence et de la doctrine comme c'était le cas à l'époque du Code civil du Bas-Canada , la jurisprudence de notre Cour qui avait refusé, dans les arrêts H. Cardinal Construction c. Dollard-des-Ormeaux (Ville de) [10] ( et Communauté urbaine de Montréal c. Ciment Indépendant inc. [11] , de considérer les contrats conclus avec la Ville ou encore la Communauté urbaine comme des contrats d'adhésion mérite, à mon avis, d'être reconsidérée. Ce qui importe dorénavant c'est d'une part, la volonté du stipulant d'une application générale sans modification majeure des conditions essentielles du contrat et d'autre part, l'intention de l'adhérent de se soumettre, sans possibilité de discussions, aux termes et conditions stipulés.
[24] Dans le cas de contrats de construction conclus avec le gouvernement, les organismes publics subventionnés ou les grandes sociétés publiques ou privées, l'élaboration des documents contractuels demeure la plupart du temps l'oeuvre unilatérale du donneur d'ouvrage qui soumet, à l'intention des contractants, des formules incluant toutes les conditions relatives aux contrats. Ces contrats me paraissent répondre à la nouvelle définition du contrat d'adhésion.
[25]
La qualification d'un contrat d'entreprise de construction comme contrat
d'adhésion, lorsque sont réunies les conditions stipulées à l'article
[26] Ainsi, dans la présente affaire, le Tribunal constate que le contrat préliminaire intervenu émane de la partie défenderesse, laquelle a déterminé unilatéralement son contenu, pour son compte et suivant ses instructions avec option pour les demandeurs d’y adhérer ou non, d’ou sa qualification par le tribunal de contrat d’adhésion.
[27] De plus, ce contrat désavantage de manière significative les consommateurs que sont les demandeurs en l’instance, lesquels sont soumis à l’arbitraire de la défenderesse qui détermine unilatéralement et à son unique discrétion les termes et conditions entourant la réalisation de la convention intervenue et peut de sa propre appréciation conclure à la faute du consommateur se justifiant de mettre ainsi unilatéralement fin au contrat, sans remise du dépôt. Le Tribunal considère excessif, déraisonnable et contraire aux exigences de la bonne foi la situation de vulnérabilité dans laquelle se retrouvent les consommateurs participant à une telle entente.
[28]
De l’opinion du Tribunal, ces clauses de défaut du promettant-acheteur
et du droit de résiliation du contrat préliminaire sont nulles car contraire à
l’article
1500. L'obligation dont la naissance dépend d'une condition qui relève de la seule discrétion du débiteur est nulle; mais, si la condition consiste à faire ou à ne pas faire quelque chose, quoique cela relève de sa discrétion, l'o bligation est valable.
PAr ces motifs, le Tribunal :
[29] ACCUEILLE la demande;
[30]
CONDAMNE
la défenderesse à payer aux demandeurs la somme de
6 733 $ avec intérêts au taux légal de 5% l'an, l’indemnité
additionnelle prévue à l'article
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__________________________________ LYNE FOUCAULT, j.C.Q. |
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Date d’audience : |
8 AOÛT 2014 |
[1]
JOBIN, Pierre-Gabriel et CUMYN, Michelle,
[2] Idem
[3] Idem , paragraphe 43
[4]
LAMONTAGNE, Denys-Claude,
[5] Idem , paragraphe 43
[6] Idem , paragraphe 43
[7]
Tabagie Chez Jacques (2000) inc.
c.
Tabagie Chez Jacques (1985) inc.
,
[8] Régie d’assainissement des eaux du bassin de La Prairie c. Janin Construction (1983) et RaymondChabot, Fafard et Gagnon inc ., 500-09-001609-940.
[9] J.L. Beaudoin et P.G., Les Obligations, 5 ième édition, Les Éditions Yvon Blais Inc., 1998, no.51, p.58
[10]
Corpex (1977) inc.
c
. La reine
[11] Précité, note 10
[12] Supra note 9, no 52 p. 72