Trois-Rivières (Ville de) et Syndicat des fonctionnaires de la Ville de Trois-Rivières, section locale 3423 (SCFP) (griefs individuels, Michel Pothier et autres) |
2014 QCTA 1067 |
TRIBUNAL D’ARBITRAGE
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
N° de dépôt : 2015-0237
Date : 2 décembre 2014
DEVANT L’ARBITRE : ALAIN CORRIVEAU, ll.b
COMPARUTION : ME MARIE-JOSÉE HÉTU
(Lavery De Billy)
Procureure de la partie patronale
MME NINA LAFLAMME
( Syndicat canadien de la fonction publique - FTQ)
Procureure de la partie syndicale
VILLE DE TROIS-RIVIÈRES
Ci-après appelé(e) «l’employeur»
-et-
SYNDICAT DES FONCTIONNAIRES DE LA VILLE DE TROIS-RIVIÈRES (SCFP, SECTION LOCALE 3423)
Ci-après appelé(e) «le syndicat»
Griefs : 2013-06, 2013-10, 2013-07, 2013-04 - Congés refusés
SENTENCE ARBITRALE
[1] Le tribunal a été saisi pour en disposer de quatre griefs portant les numéros 2013-04 (S-2), 2013-06 (S-3), 2013-07 (S-4) et 2013-10 (S-5) qui ont nécessité, dans certains cas, l’administration d’une preuve différente, les faits y ayant donné naissance n’étant pas les mêmes et dans certains autres cas, certaines dispositions de la convention collective s’ajoutent à l’application de celles qui touchent les demandes de congés, selon l’article 14.08.
[2] Le grief S-2 est daté du 5 juillet 2013. Il s’agit pour le syndicat du dossier portant le numéro 2013-04, un grief concernant M. Michel Pothier, préposé aux télécommunications chez l’employeur. Le grief se lit ainsi qu’il suit :
« Description du grief : congé férié refusé alors que la clause 14.08 était respectée dans la demande. Ainsi le refus a contrevenu à cette clause.
Réclamation : que la situation ne se reproduise pas pour tout employé qui serait concerné.
…»
[3] Le grief S-3, dossier numéro 2013-06 pour le syndicat, concerne aussi une demande de congé. Le grief se lit ainsi qu’il suit :
« Description du grief : refus de congé alors que du personnel remplaçant était disponible et que les délais étaient respectés. 6-7 juillet 2013, 11 juillet 2013, 19-20 juillet 2013, 29 juillet 2013, 6 août 2013.
Réclamation : respect de la clause 14.08 et cessation de cette pratique et compensation financière équivalente prise en jours équivalent à 7 jours avec tous les avantages en découlant.
…»
[4] Ce grief porte la date du 31 juillet 2013.
[5] Le grief S-4 daté du 22 juillet 2013 est signé par M. François Daviau. C’est le dossier 2013-07 pour le syndicat et il est ainsi libellé :
« Description du grief : malgré le fait que des préposés permanents temps partiel et temporaires n’aient pas toutes les heures dans le cycle, deux congés m’ont été refusé.
Réclamation : que cesse cette pratique et que la clause 14.08 soit respectée.
…»
[6] Enfin, le grief S-5, dossier 2013-10 pour le syndicat, est signé par Mme Nathalie Jutras, également préposée aux télécommunications au service de la sécurité publique chez l’employeur. Le grief portant la date du 6 août 2013 se lit ainsi qu’il suit :
« Description du grief : congés autorisés 10-11-12-13 août puis refusés par la suite alors que du personnel pour remplacer était disponible et que les délais étaient respectés.
Réclamation : respect de la clause 14.08, cessation de cette pratique et compensation en jours dans banque de temps avec tous les avantages en découlant.
…»
[7] En début d’audience, les parties ont déposé au dossier du tribunal d’arbitrage des admissions communes. Elles sont les suivantes :
« LES PARTIES ADMETTENT CE QUI SUIT :
1. En ce qui a trait aux griefs 2013-07 et 2013-10, la procédure de règlement de griefs a été régulièrement suivie et l’arbitre est valablement saisi des griefs.
2. Les salariés concernés par les griefs sont des cols blancs ayant le statut de salarié régulier à temps complet et occupant la fonction de préposés aux télécommunications.
3. Les préposés aux télécommunications sont assujettis à un horaire de travail qui compte des quarts de travail de jour, de soir et de nuit, répartis sur un cycle de 35 jours et comptant 178,5 heures de travail régulières, soit une moyenne de 35,70 heures par semaine.
4. Les préposés aux télécommunications réguliers à temps complet sont répartis dans 5 équipes, chaque équipe étant composée de 5 salariés syndiqués, à savoir 1 chef d’équipe et 4 préposés aux télécommunications.
5. Au plan hiérarchique, l’équipe des télécommunications relève du superviseur aux télécommunications, un poste cadre.
6. Les salariés à temps partiel et les salariés temporaires susceptibles de remplacer les préposés aux télécommunications sont soumis au même cycle de travail de 35 jours.
7. Les salariés à temps partiel et les salariés temporaires sont rémunérés au taux de temps supplémentaire pour les heures travaillées au-delà de 178,5 heures au cours d’un cycle donné.
8. Lorsque les salariés à temps partiel et les salariés temporaires ne sont pas disponibles pour effectuer des remplacements ou lorsqu’ils ont atteints 178,5 heures travaillées ou à l’horaire, l’Employeur procède alors au remplacement en distribuant le temps supplémentaire conformément à l’article 20.05, à savoir en l’offrant d’abord aux salariés réguliers.
9. Les griefs concernent l’application du 2 e alinéa de la clause 14.08 de la convention collective, à savoir les règles entourant l’autorisation de prendre un congé pour une journée donnée lorsqu’un premier congé a déjà été autorisé à un salarié de la même équipe pour cette journée.
10. Toutes les demandes de congés ayant donné lieu aux griefs visaient des deuxièmes congés au sens de l’article 14.08 de la convention collective.
11. Toutes les demandes de congés visées par les griefs ont été formulées à l’intérieur du délai prescrit par l’article 14.08 de la convention collective, à savoir dans les trente-cinq (35) jours précédant la date du congé demandé.
12. Les congés demandés faisaient partie de l’un des cycles suivants :
- le cycle débutant le 22 juin 2013 et se terminant le 26 juillet 2013; ou
- le cycle débutant le 27 juillet 2013 et se terminant le 30 août 2013.
13. Par un courriel daté du 12 juin 2013, le superviseur aux télécommunications avise les chefs d’équipe que toutes les demandes de deuxième congé seront refusées pour le cycle de 35 jours débutant le 22 juin 2013 et se terminant le 25 juillet 2013.
14. Par un courriel daté du 19 juillet 2013, le superviseur aux télécommunications avise les chefs d’équipe que toutes les demandes de deuxième congé seront refusées pour un cycle de 35 jours débutant le 27 juillet 2013 et se terminant le 30 août 2013.
…»
[8] Le premier témoin entendu est M. François Daviau, préposé aux télécommunications chez l’employeur. Au début de son témoignage, M. Daviau explique au tribunal en quoi consiste la fonction de préposé aux télécommunications où sont assignés des salariés sur trois relèves : la relève de jour de 7h00 à 15h30, celle de soir de 15h00 à 23h30 et celle de nuit de 23h00 à 7h30. Il y a cinq salariés par équipe de travail et les blocs de travail sont constitués de trente-cinq jours c’est-à-dire qu’il y a quatre jours de travail et deux jours de congés. Pour le bloc de nuit cependant les salariés travaillent sept nuits consécutives. Il indique qu’un premier congé est celui qui concerne une demande de premier congé sur l’équipe de cinq salariés travaillant sur un quart de travail. Ce peut être une demande de congé férié, de vacances, etc. Quant au second congé, il s’agit d’une demande de congé logée par une autre personne de la même équipe qui désire également s’absenter. Le témoin indique que normalement le deuxième congé sera accordé par l’employeur si cela ne suscite pas de temps supplémentaire à être payé à un autre salarié.
[9] Le témoin dépose les pièces S-4 a), b) et c) constituées d’abord de la demande de congé, associée au grief S-4, puis de la compilation des heures de Mme Laetitia Plet, préposée aux télécommunications à temps partiel et temporaire. M. Daviau a rempli le formulaire S-4 a) pour obtenir un deuxième congé. Le formulaire a été rempli le 15 juillet 2013 et les congés demandés étaient pour les 20 et 21 juillet 2013 et il s’agissait de congés de vacances. La demande de congés a été refusée.
[10] M. Daviau explique qu’il a formulé sa demande le 15 juillet 2013 et que celle-ci a été refusée le jour même, l’employeur n’acceptant pas le deuxième congé. À l’aide de la feuille de temps de Mme Laetitia Plet, déposée sous la cote S-4 b), le témoin explique que cette dernière était disponible pour le remplacer les 20 et 21 juillet 2013 sur la relève numéro 3 et qu’il lui restait de disponible 68 heures à faire dans le cycle en question. À l’aide de la pièce S-4 c), le témoin explique que M. Laurent Dorat, préposé temps partiel - temporaire, que ce dernier, pour le 21 juillet 2013, n’avait pas de relève attribuée, qu’il lui restait de disponible 26 heures dans son cycle de travail. Les demandes de congés sont complétées par le chef d’équipe puis, remises au superviseur qui prend la décision finale. Dans l’espèce, il s’agit de M. Denys Beaudin, superviseur aux télécommunications chez l’employeur. Normalement, le deuxième congé est accordé lorsque cela n’occasionne pas le paiement d’heures en temps supplémentaire par l’employeur. Le premier congé demandé est accordé automatiquement. Le salarié à qui on refuse un deuxième congé peut, lorsque cela est possible, faire un échange de quart de travail avec un autre salarié. M. Daviau indique aussi que les salariés ne peuvent pas faire plus de deux relèves consécutives de travail. Si un salarié temporaire effectue un quart de travail de nuit, il peut faire un second quart de travail, mais après une période de repos entre les deux. Lorsque les employés temporaires ont atteint le maximum de 178,5 heures dans le cycle, on peut faire appel aux employés à temps partiel et il y en a deux qui travaillent sur une base volontaire. Le premier, concernant sa demande de congé, était déjà occupé, alors que M. Dorat accepte à l’occasion des quarts de travail supplémentaires. Si toutes les ressources sont épuisées, indique M. Daviau, l’employeur doit requérir les services de salariés payés en temps supplémentaires.
[11] Le tribunal a par la suite entendu Mme Nathalie Jutras, préposée aux télécommunications chez l’employeur, qui a fait une demande de deuxième congé le 16 juillet 2013 pour prendre une période de vacances. Elle demandait un congé sur la relève de jour pour les 10, 11, 12 et 13 août 2013 tel qu’il appert de la pièce S-5 a) déposée au dossier du tribunal d’arbitrage. Le chef d’équipe avait autorisé ce congé, mais sa décision a été renversée par le superviseur aux télécommunications. Mme Jutras indique que si sa demande de congé avait été pour des journées fériées au lieu de jours de vacances, elle aurait été acceptée et à ce sujet, elle mentionne que le chef d’équipes aurait dû l’informer de cela, c’est-à-dire que si elle demandait une période de vacances cela serait refuser en deuxième congé. La pièce E-4, déposée au dossier du tribunal, fait état des raisons ou informations complémentaires concernant le refus de congé. Il y est indiqué :
«Demande refusée, il ne peut y avoir 2 vacances sur la même relève pour un bloc complet.
…»
[12] Cette note est initialée par le superviseur M. Beaudin. Par ailleurs, Mme Jutras indique que si le chef d’équipe avait accepté ou autorisé le congé en premier lieu, c’est certainement parce qu’il y avait des salariés pour effectuer le remplacement. Elle dépose comme pièce S-5 b), c), d), e), f) et g) qui sont les feuilles de compilation des heures de Mme Laetitia Plet, de M. Laurent Dorat, de Mme Meggie Bergeron, de M. Jérémie Nadeau, de Mme Stéphanie Boulanger et de M. Louis-Philippe Prince. Elle indique qu’elle a pris connaissance d’une note de service adressée par M. Denys Beaudin aux salariés en même temps que son refus de congé. Cette note de service (S-5 h)), déposée également sous la pièce E-2, se lit ainsi qu’il suit :
«Demande de deuxième congé - cycle de travail 27 juillet au 30 août 2013
Bonjour,
Veuillez prendre note qu’à compter de ce jour, toute nouvelle demande de deuxième congé sera automatiquement refusée pour le cycle cité en objet.
…»
[13] Mme Jutras tient à préciser qu’elle n’est pas certaine d’avoir pris connaissance de cette dernière note de M. Beaudin.
[14] Le troisième témoin présenté par la partie syndicale est M. Michel Pothier, également préposé aux télécommunications chez l’employeur. Il a déposé les griefs S-2 du 5 juillet 2013 et S-3 du 31 juillet 2013. Cela concerne des demandes de congés qu’il a faites pour le samedi 6 et dimanche 7 juillet 2013. Il a fait cette demande le 1 er juin 2013. Le 6 juin 2013, il a été avisé que le deuxième congé de nuit lui était refusé. Dans la demande du 1 er juin 2013, le requérant M. Pothier avait inscrit vouloir que l’on prenne son temps de congé dans sa banque de temps et si cela n’était pas possible en temps remis, il voulait prendre un congé férié. C’est ce qui ressort de la pièce S-2 b) au dossier du tribunal d’arbitrage où M. Pothier a coché qu’il voulait se servir d’un congé férié pour s’absenter. Quant à la pièce S-2 c) au tribunal d’arbitrage, signée le 19 juin 2013, le requérant demandait un congé pour les 19 et 20 juillet 2013, congé également refusé. Pour justifier le refus, on référait M. Pothier à la note de service du 12 juin 2013. La pièce S-6, la compilation des heures de M. Laurent Dorat, de Mme Laetitia Plet, de Mme Meggie Bergeron, de M. Jérémie Nadeau, de Mme Stéphanie Boulanger, de M. Louis-Philippe Prince et de M. David Lamontagne, le témoin explique qu’il y avait des gens de disponible pour le remplacer les 6 et 7 juillet 2013.
[15] La pièce S-6 comprend également, à la page 11, un mémo de M. Denys Beaudin envoyé à tous les chefs d’équipe aux télécommunications et qui est à l’effet qu’à compter du 19 juillet 2013 toute nouvelle demande de deuxième congé sera automatiquement refusée pour le cycle de travail du 27 juillet au 30 août 2013. La pièce comprend également, aux pages 12 et 13, l’horaire de travail des employés temporaires pour mardi le 6 août 2013 de même que pour lundi le 29 juillet 2013. Selon M. Pothier, M. Dorat aurait pu le remplacer pour les 6 et 7 juillet 2013 puisque celui-ci était disponible et qu’il était cédulé pour travailler de jour le 11 juillet 2013. On pouvait donc lui offrir le remplacement ou passer à la personne suivante qui aurait pu être M. David Lamontagne qui n’était pas cédulé pour travailler, qui avait déjà compilé 42,5 heures à ce moment-là. Celui-ci n’était pas obligé d’accepter. À l’aide de la pièce S-3, le témoin explique que pour le 29 juillet 2013, M. Dorat pouvait le remplacer de même que Mme Meggie Bergeron. On aurait pu également offrir le remplacement à M. Jérémie Nadeau même si celui-ci pouvait refuser. Le témoin mentionne que Mme Stéphanie Boulanger aurait pu accepter le remplacement tout comme M. David Lamontagne. En ce qui concerne la demande de congé de M. Pothier faite le 29 juillet 2013 pour le mardi 6 août 2013, elle a été refusée compte tenu de la note de service de M. Beaudin dont nous avons fait état précédemment qui a été déposée sous la cote S-6 page 11. Le témoin indique à ce sujet que la convention collective prévoit que le deuxième congé sera accordé si cela n’occasionne pas de temps supplémentaire. Ainsi, à l’aide des horaires de travail des salariés temporaires pour le 29 juillet et le 6 août, il indique que des employés, ayant ce statut, étaient susceptibles de faire le remplacement sans que cela occasionne du temps supplémentaire à payer par l’employeur.
[16] À ce stade de l’enquête, les parties ont procédé à l’admission suivante :
«Dans sa pratique, il arrive que l’employeur annonce que les demandes de deuxième congé seront dorénavant refusées pour un cycle donné ou une partie de cycle et ce, même si les salariés à temps partiel et les salariés temporaires ont encore des heures résiduelles pour ce cycle.»
[17] Le témoin dépose la pièce S-7 au dossier du tribunal d’arbitrage laquelle comporte 3 pages. La page 3 est la réponse que lui adressait M. Denys Beaudin le 17 juin 2013 suite à un message qu’il lui avait laissé dans sa boîte vocale. La
note est ainsi rédigée :
«Salut Michel,
Je comprends ta déception,
Cependant quelques éléments expliquent cette situation :
Laetitia restrictions médicales
Laurent Dorat m’a signifié ne pas accepter de remplacement avant la publication du cycle
Équivalent 1 préposé par équipe en congé pour l’ensemble du cycle.
Tu remarqueras aussi que j’ai été chercher du budget pour remplacer à 5 les 4 premières nuits de chacune des équipes, ce qui donne 20 relèves de plus à remplacer.
Merci de ton attention,
…»
[18] Il faut savoir, que le gestionnaire publie le cycle à venir 10 jours avant le début du cycle. C’est l’horaire. M. Pothier ne s’est pas contenter de la réponse de M. Beaudin et il lui a écrit la lettre suivante le 17 juin 2013 :
«Bon matin Denys,
Merci de prendre la peine de me répondre si rapidement.
OK pour Laetitia, mais elle ne prend plus aucun quart de travail à part ce qui est cédulé? Par exemple, elle n’a aucune heure de céduler pour la semaine du 14 juillet.
Pour Laurent, est-ce que les 2 e congés pourront être comblés par lui lorsqu’il prendra connaissance du nouveau cycle?
À moins qu’il y ait eu changement depuis que je ne suis plus chef d’équipe, il avait, à l’époque, eu entente verbale que lorsqu’un temporaire était disponible pour un quart de travail, le 2 e congé était accordé.
Mes demandes de congé étaient pour les 6, 7 et 11 juillet (de nuit)
Voici les possibilités qu’il y ait quelqu’un pour me remplacer :
le 6 : Laurent disponible mais ferait un double
le 7 : Laurent et Jérémie sont disponibles
le 11 : Laurent disponible mais continuerait de jour (pas winner!), David Lamontagne disponible quoique cédulé pour 42,5 heures/semaine.
Tu n’as pas eu mes 2 autres demandes pour les 19 et 20 juillet (de soir), j’étais out 35 jours. Je voulais te les remettre hier.
Les 19 et 20 : Laurent disponible, Laetitia disponible (aucune heure cédulée dans cette semaine), David Lamontagne (quoique 42,5 heures/semaine).
Pour le 20, Jérémie est aussi disponible, mais a également 42 heures/semaine.
Comme tu peux le constater, j’ai fait mes vérifications. Je suis tout de même au courant qu’il y avait d’autres préposés qui voulaient avoir un 2 e congé.
Pour ce qui est pour le remplacement du 5 e pour les 4 premières nuits, je ne doute pas de tes efforts, mais je me permets de croire qu’il y a eu pression de la part de certains chefs d’équipe et/ou membres de l’exécutif syndical. De plus, tu en conviendras, que c’est un besoin considérant la période de l’année et que les fins de semaines sont passablement occupées de nuit avec l’affluence au centre-ville lors des nombreuses activités en cette période estivale.»
[19] En contre-interrogatoire, concernant la demande de congé pour les 6 et 7 juillet 2013, le témoin précise que M. Dorat n’avait pas d’heures de prévues, que c’est un salarié à temps partiel qui n’était pas obligé d’accepter le remplacement. Quant à Mme Laetitia Plet, elle n’était pas disponible pour le remplacement les 6 et 7 juillet 2013. Quant à M. Lamontagne, il aurait pu accepter, mais il aurait dû travailler 16,5 heures d’affilées. M. Lamontagne est un employé temporaire qui n’est pas obligé d’accepter de faire deux quarts de travail de suite quand on le lui offre. Ainsi donc, pour les 6 et 7 juillet 2013, le témoin précise qu’il n’y avait pas d’assurance que quelqu’un était obligé de le remplacer. En ce qui concerne le 11 juillet 2013, M. Dorat n’avait aucune obligation de faire le remplacement et l’employeur ne lui a pas demandé. Quant à Mme Plet, elle n’était pas disponible. Et M. Lamontagne, même s’il était disponible, était déjà prévu à l’horaire pour 42,5 heures cette semaine-là et il n’avait aucune obligation d’accepter un remplacement. Il n’y avait donc pas d’assurance qu’une personne allait accepter de faire le remplacement. Pour les 19 et 20 juillet 2013, M. Dorat était disponible, mais n’avait aucune obligation d’accepter le remplacement. Quant à Mme Plet, elle était disponible et de l’avis de M. Pothier, elle était obligée d’accepter le remplacement puisqu’elle n’avait aucune heure de céduler dans la semaine et qu’il lui restait 85 heures à faire dans le cycle. En ce qui a trait à la demande de congé pour le 29 juillet et le 6 août, la pièce S-6 démontre que M. Dorat était cédulé sur la relève 3 pour 16,5 heures. Il ne lui était donc pas possible d’accepter le remplacement. Quant à Mme Bergeron, elle avait déjà travaillée la nuit et, selon le témoin, après s’être reposée pendant le quart de jour, elle aurait pu faire la relève 3 de soir puisqu’elle n’avait que 17 heures de céduler dans cette semaine. M. Nadeau n’était pas obligé parce qu’il avait déjà son 42,5 heures de prévu. Quant à Mme Boulanger, elle devait subir une suspension de travail. M. Louis-Philippe Prince n’était pas cédulé le 29 juillet et il avait 34 heures de prévu dans la semaine. Il aurait pu, selon M. Pothier, effectuer le remplacement puisqu’il lui restait 8,5 heures à faire au cycle de travail. Quant à M. Lamontagne, il était disponible, mais il avait déjà effectué 42 heures de travail. Il pouvait refuser. En ce qui concerne les horaires de travail des temporaires déposées sous la cote S-6, le témoin précise que les heures de travail s’évalue en cours de cycle et s’ajuste en fonction des absences maladie, etc. Ainsi, les pièces démontrent ce qui était prévu avant le début du cycle de travail et cela peut avoir évolué.
[20] La preuve syndicale étant déclarée close, l’employeur a procédé à faire entendre M. Denys Beaudin superviseur aux télécommunications.
[21] M. Denys Beaudin est superviseur aux télécommunications c’est-à-dire gestionnaire de la section télécommunication autant au niveau administratif qu’opérationnel. Le service emploie vingt-quatre salariés à temps plein et deux salariés réguliers à temps partiel qui occupent le même poste. Il y a des préposés, des chefs d’équipe, un capitaine à la division soutien opérationnel, de même qu’un directeur adjoint aux affaires policières.
[22] En 2013, explique le témoin, toutes les premières absences de jour et toutes les absences de soir étaient remplacées. Il faut savoir qu’il y a, au travail, un plateau composé de cinq préposés. Sur le quart de nuit, il y a trois nuits par semaine où on ne remplaçait pas les premières absences parce qu’il faut savoir que durant la période estivale le ratio d’appels est plus élevé, cela de la mi-juin à la mi-septembre. Le reste de l’année, la première absence n’est souvent pas remplacée et le service peut fonctionner avec un plateau de quatre salariés au lieu de cinq en devoir.
[23] Le témoin dit que 99% des congés sont demandés au chef d’équipe en poste. Ce dernier fait une première vérification et il peut accorder ou refuser le congé demandé. Par la suite, la requête est analysée par M. Beaudin qui peut confirmer la décision du chef d’équipe ou la changer, par exemple en refusant un congé qui a été préalablement accordé par le chef d’équipe. Il peut également y avoir des cas où les demandes sont directement acheminées au bureau de M. Beaudin. Par ailleurs, c’est le chef d’équipe qui fait la demande de remplacement suite à une demande de congé.
[24] M. Beaudin explique comment on gère les demandes de remplacement. Il y a deux moments précis c’est-à-dire les requêtes des salariés avant le début du cycle de travail et celles qui parviennent au gestionnaire en cours de cycle. Avant le début du cycle de travail, l’horaire est préparé. Il s’agit du document de base qui prévoit les quarts de travail et les salariés qui sont assignés à ces différents quarts de travail. Dans la préparation de l’horaire de travail, le gestionnaire tient compte des demandes de congé qui sont faites, de même que des absences prévues. L’horaire est préparé en fonction des renseignements disponibles à ce moment-là. M. Beaudin précise qu’il y a un salarié à temps partiel qui est mis à l’horaire, mais que celui-ci ne veut pas travailler plus que son horaire régulier. Dans l’établissement de l’horaire de travail, les heures sont réparties équitablement entre les salariés et cet horaire de travail est publié dix jours avant le début du cycle avec les congés prévus tel qu’on les connaissait lors de la préparation de l’horaire de travail. L’horaire de travail publié comprend quarante-cinq pages puisqu’il y a trente-cinq jours dans un cycle de travail. Après la publication de l’horaire, les demandes d’absence sont gérées par le chef d’équipe et inscrites dans ce qu’il est convenu d’appeler l’agenda c’est-à-dire l’horaire des temporaires tel que cela appert de la pièce E-5 qui en est un exemple déposé au dossier du tribunal d’arbitrage. La pièce E-5 est en fait l’horaire des temporaires (agenda) du 22 juin au 26 juillet 2013.
[25] Ainsi, lorsqu’il y a une demande de congé, après publication de l’horaire, cette demande est notée à l’agenda. Si la demande de congé génère un remplacement qui est autorisé, il est offert au préposé régulier à temps partiel. Si le premier à qui on l’offre refuse, il est offert au préposé temporaire en débutant par celui qui a le plus de durée de service chez l’employeur jusqu’à ce qu’ils aient atteint un nombre d’heures équivalent à 178,5 heures de travail pendant le cycle. Les salariés temporaires, même s’ils ne sont pas obligés d’accepter les heures de remplacement qu’on leur offre, doivent faire preuve d’une grande disponibilité. Ainsi, M. Beaudin indique qu’il y a une tolérance équivalente à trois refus. Si le nombre de refus dépasse ce chiffre, il y a lieu de rencontrer le salarié temporaire pour s’enquérir plus précisément des motifs justifiant ses refus. M. Beaudin explique qu’après avoir épuisé la liste des salariés temporaires, le remplacement est effectué en temps supplémentaire lequel est offert aux employés permanents temps plein en premier puis, par la suite, s’il y a lieu, à l’ensemble des salariés à temps partiel. Si le remplacement n’est pas comblé après avoir épuisé ce processus, il y a une mécanique d’obligations de temps supplémentaire prévu à la convention collective c’est-à-dire que le salarié permanent ayant le moins d’ancienneté sur le plateau est requis d’effectuer le remplacement.
[26] Le témoin dépose la liste des employés temporaires en 2013 (E-6) qui regroupe six personnes c’est-à-dire Mme Meggie Bergeron, Mme Stéphanie Boulanger, M. David Lamontagne, M. Jérémie Nadeau, Mme Laetitia Plet et M. Louis-Philippe Prince. La liste indique en ce qui a trait à Mme Plet : restriction maternité. Par ailleurs, cette liste des temporaires pour l’année 2013 indiquent également le nom de M. Laurent Dorat, employé régulier à temps partiel. M. Beaudin indique au tribunal qu’il est difficile de recruter du personnel pour occuper ce genre de fonction à temps partiel pour différentes raisons dont notamment celle qu’ils ne peuvent pas, en vertu des dispositions de la convention collective, travailler dans d’autres services chez l’employeur.
[27] C’est clause 14.08 de la convention collective qui précise les conditions d’obtention des premiers et des deuxièmes congés et à ce sujet, M. Beaudin explique que la majorité des premiers congés sont constitués de périodes de vacances et que le premier congé est toujours accordé sur le plateau de travail. Quant au deuxième congé demandé, en fonction de la disposition de la convention collective, si cela risque de causer le paiement de temps supplémentaire à des salariés dans le cycle, ce congé ou cette requête de congé est refusé. M. Beaudin se base sur son expérience passée et il tient compte de la possibilité d’être dans l’obligation de payer des heures en temps supplémentaire tout en tenant compte des congés de maladie qui peuvent survenir, du temps que peuvent effectuer les salariés temporaires, le nombre de possibilité d’accorder des premiers congés. Ainsi, avec le nombre d’heures qui restent, selon son expérience passée, il peut établir un groupe de temporaires susceptibles d’être rappelés au travail.
[28] Le témoin dépose la pièce E-1 au dossier du tribunal d’arbitrage qui est une note de service adressée à tous les préposés aux télécommunications. La note est datée du 12 juin 2013 et elle se lit ainsi :
«Prenez note qu’aucune demande de deuxième congé ne sera autorisée pour le cycle de travail en Objet.
Je vous rappelle que pour effectuer un échange de relève entre collègues permanents. Il existe certains critères. À cet effet, je vous réfère à la note de service en Attaché qui date du 20 avril 2012 et qui est toujours valide.
…»
[29] Le cycle de travail concerné par cette note de service et la période du 22 juin au 25 juillet 2013. Quant à la note de service (E-3) auquel on fait référence, elle se lit ainsi qu’il suit :
« OBJET : Processus demande de congés
Mesdames, Messieurs,
La présente vise à encadrer le processus de demande de congés par les préposés aux télécommunications.
Voici quelques principes qui devront être mis en application dès maintenant :
- Toute demande de congé doit être consignée sur le document demande de congé - télécommunications
- Le chef d’équipe doit procéder à une première approbation
- Le superviseur aux télécommunications peut, pour des raisons administratives, annuler une demande de congé précédemment approuvé par un chef d’équipe
- Une demande de congé de dernière minute (5 relèves précédents, celle demandée) peut se faire par téléphone, le chef d’équipe qui reçoit la demande doit remplir le formulaire de demande de congé
- Le changement d’un type de congé ex. : remplacer une fériée par du temps remis, doit s’effectuer par écrit et être approuvé par le superviseur aux télécommunications.
…»
[30] Le témoin donne l’exemple de M. Laurent Dorat à l’aide de la pièce E-7 où l’on constate que ce dernier pour le cycle du 22 juin au 25 juillet 2013 avait la possibilité de faire 21 relèves de 8,5 heures c’est-à-dire 178,5 heures et au 12 juin 2013, il lui restait 51 heures de disponibles et cela était dix jours avant la publication de l’horaire du 22 juin au 25 juillet 2013. En ce qui concerne Mme Laetitia Plet, il explique que celle-ci en raison de sa maternité ne peut pas faire de quart de nuit, mais seulement des quarts de jour et de soir en alternance avec une restriction à l’effet que toute la semaine elle doit travailler sur le même quart de travail et pas plus de quatre relèves par semaine. S’il lui restait au 12 juin 2013 neuf relèves à effectuer, il faut savoir que celle-ci ne voulait faire plus que 21 relèves durant le cycle. Ainsi, la pièce E-7 fait état des heures résiduelles de travail des employés temporaires au 12 juin 2013. Le témoin regarde également dans l’analyse qu’il fait des demandes de congé, les périodes équivalentes dans les années précédentes, au niveau des périodes de congés maladie, des périodes de temps supplémentaires qui ont été faites, etc. À l’aide de la pièce E-5, il mentionne qu’au 12 juin 2013, il y avait à tous les jours un premier congé accordé, ce qui lui indiquait qu’il n’y avait plus de place pour un congé automatique. M. Beaudin explique qu’au niveau des heures résiduelles, il restait, à l’analyse de la pièce E-7 au dossier du tribunal d’arbitrage, 298 heures pour le cycle en question. Il prend ce nombre d’heures divisé par le nombre de remplaçants que l’on retrouve à la pièce E-6 c’est-à-dire sept personnes, ce qui, à son avis, donne peu de relèves que chacune de ces personnes peut faire. Il en arrive au nombre d’heures de 42,5 heures si l’on divise les 298 heures par sept employés temporaires en ajoutant qu’il y a des contraintes dont on doit tenir compte par exemple le fait que certains ne peuvent pas faire deux relèves de suite, etc. Il donne l’exemple de Mme Boulanger, en mentionnant qu’il savait que celle-ci aurait à subir une suspension sans solde et qu’il aurait à redistribuer les heures que celle-ci ne ferait pas pendant sa suspension. Il mentionne au sujet de cette employée temporaire qu’entre le 7 et le 17 juillet, elle a eu dix relèves. Il ajoute qu’une personne qui a fait cinq relèves dans la semaine si elle refuse une relève, on ne la comptabilise pas comme un refus. Par ailleurs, à l’aide de la pièce E-5, on constate pour le cycle du 22 juin au 25 juillet qu’il y a eu un total de 145 heures payées en temps supplémentaire.
[31] La pièce E-2, nous l’avons mentionné, est un courriel adressé par M. Beaudin à Mme Marie-Noëlle Roberge concernant le cycle de travail du 27 juillet au 30 août 2013. La note mentionne qu’à compter du 19 juillet 2013, toute nouvelle demande de deuxième congé sera automatiquement refusée pour le cycle en question. À l’aide de la pièce E-8, le témoin mentionne que pour le cycle en question au 18 juillet 2013, il restait 17,50 heures à faire à M. David Lamontagne, préposé à temps partiel temporaire. Il restait 8,50 heures à faire à M. Louis-Philippe Prince. Mme Stéphanie Boulanger au 11 juillet 2013 avait encore 51 heures à faire, mais au 16 juillet, l’employeur était en enquête disciplinaire impliquant cette salariée de telle sorte qu’il perdait des heures puisque celle-ci ne serait pas au travail. M. Beaudin savait qu’il ne pourrait pas arriver à compléter le cycle normalement sans recourir à du temps supplémentaire. En ce qui concerne M. Jérémie Nadeau au 19 juillet 2013, il lui restait 8,50 heures à faire c’est-à-dire l’équivalent d’une relève. Pour Mme Meggie Bergeron, le 10 juillet 2013, il lui restait quatre relèves à faire alors que pour M. Laurent Dorat, qui peut refuser de faire des relèves, il lui restait 11 heures à faire au 19 juillet 2013. Mme Laetitia Plet, le document E-8 montre que celle-ci, au 20 mars 2013, avait des restrictions médicales et ne pouvait faire plus de quatre relèves par semaine sur la même relève que ce soit la relève 2 ou la relève 3. En ce qui concerne M. René Sénéchal, il était temporaire en début de formation, tout comme Mme Annie Thibault et M. Francis Plourde. À l’aide de la pièce E-9, M. Beaudin mentionne qu’il y a, jusqu’au 23 août 2013 inclusivement, au moins un congé par relève de travail.
[32] Dans la démarche qu’il doit suivre, il doit aussi vérifier s’il y a suffisamment d’employés temporaires pour combler les premiers congés autorisés d’office et les deuxièmes congés selon l’application de la clause 14.08 de la convention collective. Lors de la confection de l’horaire, pour cette période, il mentionne qu’il y a eu quelques deuxièmes congés autorisés tels que, par exemple, les 5, 6, 7 et 9 août 2013. Il indique qu’il pouvait les accepter lors de la confection de l’horaire puisqu’il avait été demandé avant la confection de celui-ci. Ainsi, le nombre d’heures à répartir équitablement entre les préposés doit tenir compte des congés déjà octroyés et de la répartition des heures comme on peut le voir à la pièce E-8. Pour les employés temporaires, il y a pour un cycle un nombre total de 178,5 heures chacun à octroyer. Ainsi, à l’aide de ces renseignements de même que des antécédents pour la même période dans les années passées, il peut établir les besoins approximatifs. Ainsi, à la pièce E-9, il y avait un total de 331 heures de temps supplémentaire prévu. Toujours à l’aide de la pièce E-9, le témoin donne quelques exemples des décisions qui ont été prises ayant occasionnées des périodes de temps supplémentaire.
[33] Trois ou quatre fois par année, surtout en juin, juillet et août et pendant le temps des fêtes, les deuxièmes congés ne sont pas permis. Cela se fait depuis de nombreuses années et il dépose à ce sujet la pièce E-10 qui montre des notes de services à l’effet que la situation s’est produite notamment en 2011 et 2012. Il s’agit donc, selon M. Beaudin, d’une pratique bien établie et cette procédure est connue de tous comme en fait foi la note de service E-3 datée du 20 avril 2012 concernant le processus de demande de congé. Cette note de service adressée aux préposés aux télécommunications est signée par M. Denys Beaudin et elle se lit ainsi qu’il suit :
«La présente vise à encadrer le processus de demande de congé par les préposés aux télécommunications.
Voici quelques principes qui devront être mis en application dès maintenant :
- Toute demande de congé doit être consignée sur le document demande de congé - télécommunications
- Le chef d’équipe doit procéder à une première approbation
- Le superviseur aux télécommunications peut, pour des raisons administratives, annuler une demande de congé précédemment approuvée par un chef d’équipe
- Une demande de congé de dernière minute (cinq relèves précédant celle demandée) peut se faire par téléphone, le chef d’équipe qui reçoit la demande doit remplir le formulaire de demande de congé
- Le changement d’un type de congé ex. : remplacer une férié par du temps remis doit être effectué par écrit et être approuvée par le superviseur aux télécommunications
Je vous remercie de votre collaboration habituelle et je vous transmets mes meilleures salutations.
…»
[34] Le témoin précise qu’on peut voir le résiduel d’heures disponibles aux temporaires par exemple à la pièce E-8 qui est un document accessible dans un cartable disponible à l’ensemble des préposés permanents, des chefs d’équipe, des employés réguliers temporaires et des réguliers temps partiel. Par ailleurs, M. Beaudin indique au tribunal que l’employeur paie du temps supplémentaire à chaque cycle de travail que ce n’est jamais arrivé qu’un deuxième congé soit accordé et qu’il n’y a pas eu de temps supplémentaire durant un cycle. Avant le grief ou les griefs dont le présent tribunal d’arbitrage est saisi, il n’y a jamais eu d’autres griefs sur la façon de faire de l’employeur. Il dépose la pièce E-11 au dossier du tribunal d’arbitrage qui sont les feuilles de calculs pour les cycles du 18 juin au 22 juillet 2011, du 23 juillet au 26 août 2011, du 2 juin au 6 juillet 2012, du 7 juillet au 10 août 2012 et du 11 août au 14 septembre 2012 qui donnent un portrait de la fin des cycles où les salariés devaient faire à cette époque un maximum de 180,75 heures par cycle. En 2012, le témoin indique que les relèves 4 et 5 n’existaient plus et que les quarts de travail étaient dorénavant de 8,5 heures, ce qui donnait des cycles de 178,5 heures de travail.
[35] La pièce E-13 est une compilation des heures de travail payées en temps supplémentaire pour les années 2011, 2012 et 2013. À ce sujet le témoin mentionne que l’employeur paie régulièrement des salariés en temps supplémentaire notamment pour des absences maladie spontanées suite à des billets médicaux ou encore pour des absences plus longues, ce qui occasionne plus d’heures devant être payées en temps supplémentaires parce qu’il y a, à ce moment-là, affectation temporaire. M. Beaudin mentionne qu’il sait par expérience qu’il y aura des absences maladie en cours de cycle et que c’est la raison pour laquelle il se garde une marge de manœuvre. Et au niveau de la distribution équitable du temps supplémentaire, on l’offre à la personne qui a le plus de durée de service pour offrir le plus de stabilité possible au niveau du travail à accomplir. Le témoin dépose également la pièce E-13 au dossier du tribunal d’arbitrage qui est un relevé des heures de travail payées en temps supplémentaire. Ainsi pour 2011, on se rend compte qu’il y a eu 1343,75 heures payées en temps supplémentaire. Pour 2012, le total se monte à 4744 heures dont 3589 heures ont été affectées à des remplacements sur le plateau de travail. De ce dernier nombre, il faut compter 1494 heures de congés de maladie. Pour 2013, il y a eu 1084 heures affectées à des remplacements d’absences et 769 heures pour combler des absences maladie.
[36] Concernant la demande de congé de Mme Nathalie Jutras (S-5 a) - E-4), M. Beaudin explique qu’il s’agit d’une demande de congé pour des vacances pour les 10, 11, 12 et 13 août 2013. La demande a été remplie le 16 juillet 2013 et acceptée par le chef d’équipe. M. Beaudin a révisé cette décision du chef d’équipe : il ne peut y avoir plus qu’un salarié par équipe de travail en vacances. Il explique que si la demande avait concerné une journée de congé, elle aurait pu être traitée comme une demande de congé férié, mais dans la présente espèce, il s’agissait d’un bloc de jours de vacances. Ainsi, il ne s’agissait pas d’utiliser ce que les parties nomment un «résiduel» d’où l’application de la règle d’un travailleur en congé à la fois. Il s’agit d’une pratique qui remonte à 2002 qui est connu dans le service, qui réfère également au choix de vacances qui est fait une fois par année avant le 15 mars de chaque année. Il faut, à ce sujet, consulter la clause 13.03 de la convention collective qui prévoit que les choix de vacances sont effectués entre le 15 mars et le 1 er avril de chaque année. M. Beaudin termine son interrogatoire principal en mentionnant qu’il n’y a jamais eu de grief contestant cette façon de procéder de l’employeur.
[37] En contre-interrogatoire, le témoin est interrogé concernant la pièce E-10 au dossier du tribunal d’arbitrage qui est constitué de quelques courriels datant du mois de juillet et d’août 2011. Il dit à ce sujet que c’est sa responsabilité de gérer les horaires et que d’habitude, il valide ceux-ci avec ses supérieurs. Il n’a pas de souvenir s’il y a eu quelque chose de particulier s’étant produit à l’été 2011. Interrogé concernant les demandes de congés de M. Michel Pothier qui se retrouvent aux pièces S-2 et à l’aide de la pièce S-6 2/16, il mentionne que Mme Plet était disponible pour remplacer M. Pothier les 19 et 20 juillet 2013 et que le 14 juillet, elle avait zéro heure de prévu à son horaire. La pièce S-6 montre également que M. Lamontagne était disponible pour effectuer le remplacement les 19 et 20 juillet 2013. Cependant, on ne leur a pas demandé d’effectuer les remplacements de M. Pothier puisqu’il s’agissait d’un deuxième congé et que la note de service indiquait que ceux-ci seraient refusés. M. Beaudin ajoute que M. Lamontagne aurait pu refuser puisqu’il avait déjà 42,5 heures de fait au 13 juillet 2013. Mais, à la pièce E-7 page 2, on constate qu’il lui restait 42,5 heures à faire. M. Beaudin précise que Mme Plet, à cause de restrictions médicales, ne pouvait faire plus de quatre relèves par semaine sur la même relève 2 ou 3. Quand on demande à M. Beaudin ce que cela peut changer que la demande soit faite pour obtenir un congé de vacances ou la remise d’un congé férié, il indique que ce n’est pas la même banque de temps qui est débitée et dans le cas qui nous occupe, il s’agissait d’un bloc de vacances, une période de vacances entre deux congés. Quand on demande à M. Beaudin, en vertu de la pièce E-4, si on avait demandé quatre congés fériés, il répond que comme il s’agissait d’un deuxième congé, il aurait été refusé de toute façon.
REPRÉSENTATIONS DE LA PARTIE SYNDICALE
[38] La procureure de la partie syndicale plaide que la façon dont l’octroi du deuxième congé, eut égard à l’application de la clause 14.08 de la convention collective, est réglé par l’employeur, est contraire à la jurisprudence et cela à quatre égards. Premièrement, l’application est faite de façon systématique au lieu du cas par cas et cela au moins pendant le cycle d’été. Par ailleurs, la directive est émise par l’employeur concernant le refus des demandes de deuxièmes congés, a pour effet de suspendre le droit prévu à la convention collective. La façon d’appliquer la disposition par l’employeur relève plus de l’anticipation qu’il y aura du temps supplémentaire de requis au lieu de constater qu’il y aura du temps supplémentaire. Enfin, cette façon d’appliquer la disposition 14.08 durant la période d’été vient, ajoute la procureure syndicale, nier un droit prévu à la convention collective par les parties.
[39] La procureure plaide que chaque demande doit être analysée de façon spécifique, ce qui implique qu’il ne suffit pas d’énoncer une règle générale comme l’employeur l’a fait dans la présente espèce. La procureure ajoute également que la directive de l’employeur de refuser les deuxièmes congés pendant certains cycles durant l’été, précède les demandes déposées et le temps supplémentaire n’est pas alors constaté, l’employeur ne faisant que spéculer au lieu de constater avant de refuser une demande de deuxième congé que celle-ci, si elle est acceptée, nécessitera le paiement d’heures de travail en temps supplémentaire.
[40] Selon M. Beaudin, il y a un calcul de banque de temps supplémentaire qui est global où on y compute tous les congés de toutes sortes. La clause 14.08 vise les congés fériés (14.01) et les congés d’utilité (14.05). La procureure réfère le tribunal à l’article 16 de la convention collective concernant les vacances, leur attribution de même que la possibilité de fractionner les vacances de telle sorte qu’il peut y avoir des vacances résiduelles. Au niveau des absences en maladie à l’article 17 de la convention collective, on ne dit pas que le fait d’accorder des absences en maladie ne doit pas occasionner de temps supplémentaire tout comme le fait d’accorder des libérations syndicales prévues à l’article 6 de la convention collective ne sont pas tributaires du fait d’occasionner ou de ne pas occasionner de temps supplémentaire.
[41] On retrouve à l’article 20 les dispositions s’appliquant au temps supplémentaire et la clause 20.06 prévoit une banque de temps qui peut être repris par les salariés. La procureure plaide que c’est le deuxième congé prévu au paragraphe 14.08 de la convention collective qui ne doit pas créer de temps supplémentaire et il y a une banque globale pour que tous les congés dont elle a fait état ne crée pas de temps supplémentaire. En fait, plaide-t-elle, les journées peuvent être demandées, il s’agit là d’un droit et elles peuvent être refusées uniquement si elles occasionnent du temps supplémentaires et il n’y a pas lieu, comme l’a fait à tort l’employeur, de spéculer sur le temps supplémentaire. Il faut en effet considérer que l’octroi d’un deuxième congé est un droit et non pas un privilège. Et la façon, dont l’employeur applique sa politique, doit être cohérente avec la convention collective et quand il émet une directive à l’effet qu’il n’y aura pas de deuxième congé accordé pour un cycle à venir, cela a pour effet d’ajouter à la convention collective et le syndicat demande au tribunal de reconnaître que le sens donné au premier paragraphe de la disposition de la convention collective au paragraphe 14.08 s’applique également au deuxième paragraphe et que l’employeur ne peut décider de façon générale de nier ou de suspendre un droit dévolu aux salariés de prendre les congés auxquels ils ont droit en vertu de la convention collective. Si l’employeur décide d’une telle façon d’agir, il reste obligé de considérer à son mérite toute demande d’un salarié et de lui accorder son congé si celui-ci ne nuit en rien aux activités de l’entreprise c’est-à-dire s’il ne provoque pas de temps supplémentaire. En fait, la procureure syndicale plaide que la décision de l’employeur ne s’applique pour le moment que sur les cycles de travail d’été, mais selon la façon de faire de l’employeur, cela pourrait finir pas s’appliquer à l’année longue et le syndicat s’y oppose.
[42] Le syndicat réfère le tribunal concernant la pratique passée à la lettre d’entente contenue à la convention collective, lettre d’entente 2011-08 relative à la création de nouveaux postes de chef d’équipe aux télécommunications et à l’implantation d’un nouvel horaire de travail. La procureure ajoute que lorsque la pratique passée est invoquée, c’est pour maintenir une façon de faire qui n’est pas conforme à la convention collective. Pour les chefs d’équipe, il y a eu implantation d’un nouvel horaire de travail. En ce qui concerne les congés de Mme Jutras (E-4) et de M. Pothier (E-9), ils n’ont pas été traités par le même individu de telle sorte que le syndicat plaide qu’il n’y a pas eu une pratique uniforme. Par ailleurs, il y a lieu de s’interroger à savoir si le syndicat a été informé de cette pratique et si un représentant autorisé du syndicat y a acquiescé. La procureure mentionne qu’il y a une distinction entre les deux conventions collectives, celle sous étude et la précédente (S-1 et E-14) où l’on retrouve à la clause 14.08 un paragraphe supplémentaire qui est à l’effet qu’en cas de refus, le salarié concerné peut échanger son quart de travail avec un autre préposé aux télécommunications et ce, à la condition que sa banque de congé le permettre. Cela indique donc, ajoute la procureure syndicale que la situation a été discutée lors de la négociation de la convention collective et le fait que le syndicat n’ait pas déposé de griefs auparavant ne signifie pas qu’il a acquiescé à la position ou la façon de faire de l’employeur. En fait, le syndicat ne voit pas où l’employeur subit un préjudice s’il respecte le texte du paragraphe 14.08 de la convention collective qui prévoit que lorsque le temps supplémentaire est effectivement constaté, il y a refus d’accorder le deuxième congé. Si l’employeur veut mettre fin à cette façon d’agir, il doit en aviser le syndicat qui plaide que les notes de service indiquant un refus systématique d’accorder pendant certains cycles le deuxième congé sans analyse au cas par cas est contraire à la jurisprudence tout en brimant les droits des salariés. Il y a donc lieu, termine la procureure, de faire droit au grief et de réserver juridiction en ce qui concerne la compensation, le cas échéant, à accorder aux salariés lésés.
REPRÉSENTATIONS DE LA PARTIE PATRONALE
[43] Les décisions prises par l’employeur ne découlent pas d’une règle générale indiquant, qu’à l’avenir, pendant les cycles de l’été, il n’y a pas de deuxième congé accordé. La décision de l’employeur repose plutôt sur une analyse faite à chaque cycle. Par ailleurs, l’employeur n’invoque pas ici la théorie de la fin de non-recevoir ou de l’estoppel, mais plutôt la pratique passée qui s’applique depuis longtemps. La pratique passée se révèle utile lorsque les parties sont en présence d’un texte ambigu et elle sert à éclairer le tribunal sur la compréhension que les parties ont toujours donné au texte en question c’est-à-dire en l’occurrence le texte que l’on retrouve au paragraphe 14.08 de la convention collective. Si les parties ont discutées de l’article 14.08 de la convention collective lors des négociations concernant son renouvellement, il faut savoir que sur l’alinéa dont l’application est contestée par le syndicat dans la présente espèce, il n’y a eu aucun changement, c’est exactement le même texte. Le principe n’a pas changé et cette pratique remonte aux années 2002. Alors si les parties en ont discuté lors du renouvellement de la convention collective, elles ont quand même maintenu le même texte c’est donc dire que le tribunal peut en conclure que le syndicat était d’accord avec la façon d’agir de l’employeur eut égard à l’application de cette disposition. L’ajout qui a été fait au texte du paragraphe 14.08 de la convention collective concerne les échanges de quart entre collègues de travail préposés aux télécommunications et également le paiement du solde des heures qui se fait en même temps que la dernière paie régulière de décembre.
[44] S’il y a eu, à la nouvelle convention collective, une lettre d’entente concernant la création de nouveaux postes de chef d’équipe aux télécommunications et à l’implantation d’un nouvel horaire de travail, il faut tout de même retenir le témoignage de M. Beaudin qui a affirmé que l’employeur, en ce qui a trait à l’octroi des deuxièmes congés, a toujours agi de la même façon et cela depuis à tout le moins l’année 2002. La procureure ajoute que le syndicat a acquiescé à cette façon de faire de l’employeur et le syndicat était certainement au courant, du moins on peut le présumer, puisque autant M. Daviau que M. Pothier en étaient informés puisqu’ils sont tous les deux impliqués au niveau syndical.
[45] Par ailleurs, ajoute la procureure patronale, il est faux de prétendre comme le fait le syndicat qu’il n’y a pas de préjudice à appliquer la disposition du paragraphe 14.08 de la convention collective comme il le préconise. Le préjudice pour l’employeur est au contraire évident puisque si on accorde le deuxième congé au moment où la demande est faite, cela diminue le nombre d’heures disponible des temporaires et ainsi l’employeur, au bout du compte, sera obligé de combler en temps supplémentaire les heures manquantes et cela va coûter des sommes importantes. Par ailleurs, en ce qui a trait au congé demandé en début de cycle selon la proposition syndicale, le deuxième congé devrait être accordé si un employé temporaire a des heures résiduelles pour effectuer le remplacement. À ce sujet, la partie patronale plaide que cela vient changer la façon de faire et le texte de la convention collective.
[46] Le grief 2013-06 ne vise que deux congés, ceux du 29 juillet et du 6 août 2013 selon l’employeur. L’employeur est donc prêt à admettre que le tribunal est valablement saisi de ce grief. Quant au grief 2013-04, l’employeur maintient que compte tenu de sa formulation qui ne précise pas les dates et qui est rédigé au singulier, il faudrait en conclure que cela ne concerne qu’une seule date, une seule demande de congé.
[47] Il faut également prendre connaissance de la clause 2.10 de la convention collective qui donne la définition du salarié temporaire et à son premier paragraphe, il est stipulé que le rôle premier du salarié temporaire est de combler des absences, de remplacer des salariés absents. Ainsi, à l’aide de la pièce E-13, la procureure patronale plaide qu’au niveau des absences maladie, des absences syndicales que l’employeur ne peut pas refuser. On note qu’en 2011, il y a eu 1343 heures c’est-à-dire 61% des congés qui ont été des congés maladie non-planifiables, absences qui ont été comblées par des employés temporaires de même qu’il y a eu 11% du temps en libération syndicale également attribuable aux salariés temporaires. En 2012, la proportion est de 50% et de 11%, alors qu’en 2013, les mêmes vérifications donnent 70% des absences en maladie et 14% en libération syndicale. L’analyse se fait donc en fonction de cette information quand la demande d’un deuxième congé est faite. On tient compte de l’expérience, de même que des contraintes et empêcher l’employeur de tenir compte également des absences de dernières minutes serait équivalent à se mettre la tête dans le sable. Ici, ajoute la procureure, il y a une ambiguïté en raison de la structure des horaires de travail et de la façon de calculer le temps supplémentaire. Dans une convention collective traditionnelle, l’horaire de travail s’échelonne sur une semaine alors que dans la présente espèce, les salariés sont soumis à des cycles de travail de trente-cinq jours. Ainsi, le vécu des parties confirme cette ambiguïté qu’il faut reconnaître au niveau de l’application de la convention collective. Si la clause 14.08 à son premier paragraphe ne donne aucune marge de manœuvre à l’employeur, c’est-à-dire qu’avec les premiers congés, on utilise une partie de la marge de manœuvre sans égard aux autres congés donnés (exemple : maladie, grossesse, vacances, …), le but du 2 e paragraphe de la clause 14.08 est de ne pas empêcher les salariés de prendre des congés si cela ne coûte rien à l’employeur. À l’époque, en 2013, la preuve est à l’effet qu’on manquait d’employés temporaires, donc que l’employeur devait adopter une gestion plus serrée et que les salariés temporaires aient un résiduel d’heures n’est pas suffisant pour accorder les deuxièmes congés.
[48] Par ailleurs, la pratique passée a aussi fait l’objet d’une admission des parties c’est-à-dire concernant les griefs que l’employeur avait annoncé avant le début du cycle qu’il n’y aurait pas de deuxième congé accordé. La disposition du paragraphe 14.08 de la convention collective, que ce soit au premier ou au deuxième paragraphe concernant la notion de jour, vise le même jour pour lequel aucun autre salarié de l’équipe n’a fixé de vacances ou de congé férié ou de congé d’utilité, mais, plaide la procureure patronale, le litige ne porte pas sur la notion de jour, mais sur le fait que le deuxième congé est accordé s’il n’occasionne pas de temps supplémentaire et cela peu importe à quel moment la décision de l’employeur est prise. D’autant plus que la disposition a toujours été appliquée de cette façon depuis de nombreuses années. En reproduisant à ce sujet précis les mêmes alinéas au paragraphe 14.08 de la convention collective, le syndicat a consenti à toutes fins pratiques au maintien de la pratique.
[49] Donner raison au syndicat, ajoute l’employeur, équivaudrait à leur octroyer ce qu’ils n’ont pas obtenu par la négociation. La façon d’analyser de l’employeur n’équivaut pas à suspendre des droits puisqu’il applique un critère par une analyse faite d’une situation précise. Il faut considérer, la preuve en a fait état, que pour le cycle débutant le 22 juin 2013, il restait un résiduel d’heures équivalent à la disponibilité d’un temporaire et demi pendant un cycle de cinq semaines pour remplacer un potentiel de vingt-cinq personnes. En ce qui concerne le cycle débutant le 27 juillet 2013, il restait 96,5 heures de résiduel selon la pièce E-8 puisque des 275 heures de résiduel, il faut retirer 51 heures concernant la situation mettant en cause Mme Boulanger. Il faut aussi redistribuer les 127,5 heures qu’on lui avait données, ce qui donne au bout du compte une disponibilité d’un demi temporaire pour cinq semaines avec un potentiel de vingt-cinq personnes à remplacer. Il faut donc, dans ces circonstances, considérer que la décision de M. Beaudin était tout à fait raisonnable.
[50] Si le tribunal en venait à suivre la thèse syndicale, il faudrait considérer concernant le grief de M. Pothier que personne n’était obligé de le remplacer pour les deux congés du 6 et 7 juillet 2013. En ce qui a trait au congé du 11 juillet, il n’y a pas eu de démonstration que quelqu’un était obligé d’accepter le remplacement. En ce qui concerne les congés demandés pour les 19 et 20 juillet, Mme Plet n’était pas disponible sur la relève 3, Ainsi, pour les 29 juillet et 6 août 2013, s’il y avait des gens disponibles et obligés de faire les remplacements, la pièce S-6 déposée par le syndicat ne tient pas compte de la suspension de Mme Boulanger et à l’aide de cette pièce, on ne peut en voir l’impact pas plus que les demandes de congés après la suspension en question. En ce qui a trait à M. Daviau, l’employeur n’a pas de commentaires particuliers à adresser au tribunal, sauf pour mentionner que si on retient la vision syndicale, les congés sont corrects. Par ailleurs, dans le dossier Jutras, qui concerne les vacances, il y a lieu de consulter la clause 13.03 c) de la convention collective qui prévoit qu’il y a un salarié à la fois en vacances et cela dans le but d’assurer la continuité des opérations et le fait que l’on ait plaidé que si on avait demandé des congés fériés la demande aurait été acceptée demeure hypothétique.
[51] Il y a donc lieu, termine la procureure patronale, de rejeter les griefs.
DÉCISION
[52] Tous les congés demandés par les plaignants dans la présente espèce, l’ont été à l’intérieur de deux cycles de travail c’est-à-dire celui débutant le 22 juin et se terminant le 26 juillet 2013 et celui débutant le 27 juillet et se terminant le 30 août 2013. Il s’agit dans tous les cas de deuxièmes congés selon le second alinéa de la clause 14.08 de la convention collective.
[53] Le 12 juin 2013 et 19 juillet 2013, l’employeur a émis un avis à l’effet que toutes les demandes de deuxièmes congés seront refusées autant pour le cycle du 22 juin au 25 juillet que pour celui du 26 juillet au 30 août 2013.
[54] Comme cela appert des admissions, les griefs concernent l’application du 2 e alinéa de la clause 14.08 de la convention collective, à savoir les règles entourant l’autorisation de prendre un congé pour une journée donnée lorsqu’un premier congé a déjà été autorisé à un salarié de la même équipe pour cette journée. Les demandes de congés visées ici l’ont été à l’intérieur des délais prescrits à la clause 14.08, cela n’est pas en cause.
[55] Dans le cadre de la preuve, les parties ont admis que, dans la pratique, il arrive que l’employeur annonce que les demandes de deuxièmes congés seront dorénavant refusées pour un cycle donné ou une partie de cycle et ce, même si les salariés à temps partiel et les salariés temporaires ont encore des heures résiduelles pour ce cycle. Il n’y a jamais eu auparavant de grief contestant cette façon de faire de l’employeur.
[56] La disposition de la convention collective à l’article 14.08 est la suivante :
«14.08 - Pour les préposés aux télécommunications réguliers, les congés fériés et d’utilité sont placés dans l’horaire de travail une journée où ils devraient normalement travailler, sur demande formulée par le salarié pas plus de trente-cinq (35) jours à l’avance; si la demande du salarié vise un jour pour lequel aucun autre salarié de l’équipe n’a fixé de vacances ou de congé férié ou d’utilité, le congé est automatiquement accordé.
Par contre, s’il y a déjà le même jour un préposé de l’équipe soit en vacances, en congé férié ou en congé d’utilité, ce deuxième congé est accordé seulement s’il n’occasionne pas de temps supplémentaire.
En cas de refus, le préposé aux télécommunications concerné peut échanger son quart de travail avec un autre préposé aux télécommunications, et ce, à la condition que sa banque de congé le permette.
Le solde des heures est payé en même temps que la dernière paie régulière de décembre.
…»
[57] Le syndicat plaide que l’employeur ne peut pas refuser d’avance par une note de service tous les deuxièmes congés pour un cycle ou une partie de cycle et qu’il doit analyser chacune des demandes au cas par cas et voir, au moment où la requête lui est adressée, si le fait de l’accorder occasionne effectivement du temps supplémentaire. Il ne peut, à ce sujet, priver par une décision générale et globale, les salariés d’un droit auquel ils ont accès, eut égard à la clause 14.08 de la convention collective. Ainsi, l’employeur doit considérer chaque demande à son mérite selon la thèse défendue par le syndicat et non pas, comme en a témoigné M. Beaudin, se référer à l’expérience des années précédentes et aux possibilités de prises de congé telles les absences de dernières minutes pour différents motifs comme la maladie ou les libérations syndicales, etc., absences qu’il ne peut refuser.
[58] Il faut noter ici que la preuve non contredite a établi que depuis 2002, l’employeur s’est toujours comporté de la même façon eut égard à l’application du second alinéa de la clause 14.08 et qu’aucun grief du type dont le tribunal est présentement saisi n’a été déposé par le syndicat en son nom ou à titre de représentant d’un ou de plusieurs salariés. Il n’y a jamais eu de griefs contestant cette pratique de l’employeur d’aviser à l’avance que les deuxièmes congés seraient refusés pour certains cycles ou encore à propos de sa façon d’analyser les demandes en tenant compte des prévisions d’absences et/ou de l’expérience fondée sur les années précédentes.
[59] Il convient de préciser que si la clause 14.08 a été modifiée lors de la dernière négociation, elle l’a été pour préciser des éléments en ajoutant les alinéas 3 et 4, mais les parties n’ont pas modifié les alinéas 1 et 2 qui sont demeurés strictement les mêmes, ce qui revient à dire que les parties les considéraient adéquates autant dans leur rédaction que dans leur application aux fils des ans.
[60] L’employeur a plaidé que le tribunal, pour disposer des griefs, devrait s’en remettre à la preuve de pratique passée qui lui permettra d’établir quelle était la véritable intention des parties lorsqu’elles ont convenu des termes de l’article 14.08 et de la convention collective de travail.
[61] Cette preuve de pratique passée ne peut être recevable que si elle tend à démontrer qu’elle était le contenu, le véritable accord des parties. Ainsi, une telle preuve vise à éclairer l’arbitre sur l’intention des parties pour ainsi lui permettre d’interpréter la disposition ambiguë, que cette ambiguïté soit manifeste ou latente.
[62] La preuve a fait ressortir différentes opinions quant à la façon d’accorder les deuxièmes congés pendant un cycle de travail et si ceux-ci doivent être accordés lorsqu’ils n’occasionnent pas de temps supplémentaire, la disposition ne précisant pas à quel moment cette analyse doit être faite par l’employeur. Une chose est toutefois bien évidente, la disposition touchant les deuxièmes congés est différente dans son application à celle s’appliquant aux premiers congés qui sont, à certaines conditions, automatiquement accordés. Les parties n’ont pas convenu d’un tel automatisme en ce qui a trait aux deuxièmes congés de telle sorte que j’estime que le texte n’est pas clair quant à l’appréciation des critères qui doivent guider l’employeur pour accorder ou refuser ces deuxièmes congés. Certes, les arguments du syndicat sont sérieux à l’effet qu’il faut tenir compte de la notion de jour, telle que celle-ci apparaît au premier alinéa de la disposition du paragraphe 14.08 à l’effet que l’employeur devrait analyser les demandes au moment où elles sont faites pour savoir si, à ce moment-là ou au moment de la prise des congés demandés, il y aura ou non du temps supplémentaire d’effectivement travaillé. Le syndicat plaide également, c’est un autre argument sérieux, que l’employeur ne peut pas émettre d’avis informant les salariés qu’il refusera toutes les demandes de deuxièmes congés pendant une partie de cycle, un cycle complet ou plusieurs cycles complets et cela, notamment, en se basant sur l’expérience passée. De l’avis du soussigné et avec respect pour l’opinion contraire, les éléments de preuves versés au dossier, de même que les arguments des procureures, sont à l’effet qu’il y a une véritable ambiguïté dans l’application des dispositions de la convention collective visant les deuxièmes congés et en ce sens, la preuve de pratique passée est recevable puisque celle-ci pourra permettre à l’arbitre soussigné d’interpréter la disposition de la convention collective en question et d’en dégager la véritable intention des parties.
[63] Ainsi, pour que la preuve que l’employeur veut introduire concernant la pratique passée ait une certaine valeur, plusieurs conditions doivent être respectées. La doctrine et la jurisprudence ont établi qu’il doit exister plusieurs interprétations possibles pour une même clause, que l’une des parties doit avoir démontré une conduite suffisamment longue et suffisamment constante en faveur de l’une des interprétations possibles, que cette pratique était connue par ceux qui sont chargés d’appliquer la convention collective c’est-à-dire le syndicat et l’employeur et que celle-ci a été tolérée pendant plusieurs conventions collectives et, enfin, que cette pratique ait été acquiescée par les deux parties. Le syndicat a plaidé qu’à cause de la lettre d’entente 2011-08 relative à la création de nouveaux postes chefs d’équipes télécommunications et à l’implantation d’un nouvel horaire de travail, il n’y a pas eu une pratique uniforme. À ce sujet, qu’il suffise de mentionner que les demandes de deuxièmes congés sont, au bout du compte, soumises à l’attention de M. Denys Beaudin, qui est superviseur aux télécommunications c’est-à-dire gestionnaire de la section télécommunication autant au niveau administratif qu’opérationnel. Et même si 99% des congés sont demandés au chef d’équipe en poste, ce dernier fait une première vérification et il peut accorder ou refuser le congé demandé, mais par la suite, la requête est analysée par M. Beaudin qui peut confirmer la décision du chef d’équipe ou la changer, par exemple en refusant un congé qui a été préalablement accordé par le chef d’équipe. La preuve a fait état du fait qu’il peut également y avoir des cas où les demandes de deuxièmes congés sont directement acheminées au bureau de M. Beaudin.
[64] Comme nous l’avons mentionné précédemment, il existe plusieurs interprétations possibles pour l’application du second alinéa de la clause 14.08 concernant les demandes de deuxièmes congés pendant un cycle de travail. Pourtant la preuve non contredite est à l’effet que l’employeur s’est toujours comporté de la même façon, et cela depuis de nombreuses années concernant l’application de cette notion de deuxièmes congés pendant un cycle de travail. Il ne fait aucun doute que cette façon de faire de l’employeur était connue de tous, que ce soit des salariés ou du syndicat qui les représente et le soussigné en arrive à la conclusion que les deux parties ont acquiescé à cette façon d’appliquer le second alinéa de l’article 14.08 de la convention collective de la façon dont il a été démontré par la preuve de telle sorte qu’il y a lieu pour le soussigné de conclure que cette façon de procéder depuis de nombreuses années, rencontre la véritable intention des parties en ce qui concerne l’application du second alinéa de la clause 14.08 de la convention collective par rapport aux demandes de deuxièmes congés adressées à l’employeur par les salariés syndiqués préposés aux télécommunications.
[65] Compte tenu de la décision à laquelle le soussigné en vient, compte tenu également du fait que tous les griefs concernent des demandes de congés se situant pendant les cycles de travail du 22 juin au 25 juillet 2013 de même que du 27 juillet au 30 août 2013 et que l’employeur avait émis un avis à l’effet qu’aucun deuxième congé ne serait accordé pendant cette période, il n’y a pas lieu de discuter de chacun des quatre griefs à leur mérite de telle sorte que le tribunal en vient à la conclusion que ceux-ci doivent être rejetés.
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Alain Corriveau , président
AC/cl