Corriveau Ent. électricien inc. c. Laberge |
2015 QCCQ 2679 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTMAGNY |
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LOCALITÉ DE |
MONTMAGNY |
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« Chambre civile » |
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N° : |
300-32-000092-145 |
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DATE : |
5 mars 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
CHARLES G. GRENIER, J.C.Q. [JG 1934] |
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CORRIVEAU ENT. ÉLECTRICIEN INC. 280, chemin des Cascades Montmagny (Québec) G5V 3R8 |
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Demanderesse |
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c. |
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MARTINE LABERGE […] Montmagny (Québec) […] |
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BENJAMIN GENDREAU […] Montmagny (Québec) […] |
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Défendeurs |
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JUGEMENT |
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INTRODUCTION
[1] La demanderesse, Corriveau Ent. Électricien inc. (ci-après : « Corriveau »), réclame solidairement aux défendeurs, madame Martine Laberge et monsieur Benjamin Gendreau, le paiement du prix des travaux d’électricité - 3 088,95 $ - qu’elle allègue avoir effectués à leur demande conjointe dans un immeuble appartenant à madame Laberge, sis au 42, avenue Jacques-Lelièvre, à Montmagny, que cette dernière voulait transformer en résidence pour personnes handicapées.
[2] Monsieur Gendreau était le menuisier et entrepreneur en construction qui avait charge du projet pour madame Laberge et qui, selon Corriveau, l’a autorisée au nom de madame Laberge, après avoir obtenu son approbation, à procéder aux travaux d’électricité sur la base d’une soumission fournie par Corriveau estimant le prix des travaux à 3 200 $.
[3] Dans un contexte où madame Laberge a autorisé son mandataire, monsieur Gendreau, à approuver les travaux dont elle est la bénéficiaire alors que monsieur Gendreau, lui, a accepté la soumission et autorisé les travaux, et parce que Corriveau considère que les défendeurs se renvoient mutuellement la balle quant à leurs responsabilités contractuelles respectives à son endroit, elle les poursuit de façon solidaire afin de récupérer le prix du travail effectué.
[4] Effectivement, madame Laberge fait valoir dans sa contestation qu’elle n’a jamais contracté avec Corriveau et qu’elle n’a pas approuvé les travaux d’électricité qui ont été effectués par l’entremise de son entrepreneur, monsieur Gendreau, d’où son absence alléguée de toute responsabilité contractuelle à l’endroit de Corriveau.
[5] Monsieur Gendreau, lui, prétend que madame Laberge a sciemment approuvé la soumission reçue de Corriveau et qu’il avait convenu avec elle qu’elle allait payer directement à l’entrepreneur en électricité le prix des travaux à être effectués.
[6] Madame Laberge rétorque qu’elle croyait que le prix des travaux d’électricité était compris dans le prix convenu avec monsieur Gendreau pour l’ensemble des travaux, soit 21 276 $.
[7] Elle se porte en demande reconventionnelle à l’endroit de Corriveau en lui réclamant à son tour la somme de 135,95 $ représentant le montant des frais judiciaires qu’elle a dû payer pour déposer sa contestation, des frais postaux ainsi que des frais de gardiennage lors de ses déplacements au palais de justice.
LA TRAME FACTUELLE
[8] De l’ensemble de la preuve tant documentaire que testimoniale qui lui a été soumise par les parties, le Tribunal retient les faits qui suivent.
[9] Au début de l’année 2014, madame Laberge, qui était propriétaire d’une maison située au 42, avenue Jacques-Lelièvre à Montmagny, qu’elle n’habitait pas, entretenait le projet de convertir cette maison en résidence pour personnes handicapées. Elle habite maintenant dans la maison.
[10] Elle a contracté avec un menuisier qui agissait à l’occasion comme entrepreneur en construction, monsieur Gendreau, afin qu’il effectue les travaux requis au prix de 21 276 $, incluant les travaux d’électricité au sous-sol d’un montant de 3 200 $, selon ce qui apparaît dans un document manuscrit déposé au dossier de la Cour détaillant la soumission de monsieur Gendreau, soumission qui a été acceptée par madame Laberge (D-2).
[11] Monsieur Gendreau a témoigné qu’il s’était entendu avec sa cliente quant au fait qu’elle allait payer l’entrepreneur en électricité directement.
[12] Corriveau, qui était représenté à l’audience par son président, monsieur Frédéric Corriveau, a produit au dossier de la Cour une soumission adressée à monsieur Benjamin Gendreau concernant le « projet : 20131113 prix budget sous-sol (Martine Laberge) » d’un montant de 3 200 $. La soumission est cependant datée du 29 avril 2014. Un document détaillant les travaux à effectuer était annexé à la soumission.
[13] Selon lui, il a été contacté à l’origine par monsieur Gendreau, qui se spécialise dans la rénovation domiciliaire et avec qui il avait déjà travaillé à quelques reprises. Ce dernier lui a remis un plan électrique que madame Laberge lui avait remis.
[14] Corriveau a effectué les travaux du 25 au 27 février 2014. Selon monsieur Corriveau, des ajustements ont dû être apportés par rapport à ce qui avait été prévu à l’origine afin que le travail soit conforme aux normes de sécurité prévues par la réglementation.
[15] Tout au long des travaux, monsieur Corriveau prétend avoir obtenu toutes les autorisations requises de monsieur Gendreau qui lui disait qu’il obtenait lui-même l’approbation de madame Laberge.
[16] Le seul item pour lequel il n’a pas obtenu d’autorisation de la part de madame Laberge, c’est lorsqu’il s’est entretenu avec elle directement relativement à des travaux qu’il lui conseillait de faire sur la boîte électrique du sous-sol qui lui apparaissait peu sécuritaire. Madame Laberge ne l’a pas autorisé à effectuer ce travail supplémentaire qui allait coûter environ 1 500 $, considérant que le travail en question n’était pas requis et préférant s’arranger autrement.
[17] Lorsque le 27 février 2014, Corriveau a terminé le travail, le « rough » était fait et il ne restait que les travaux de branchement à effectuer, travaux que madame Laberge ferait faire faire par son beau-frère.
[18] Une facture de Corriveau datée du 5 mars 2014 adressée à madame Laberge, détaillant le travail effectué, d’un montant de 3 063,95 $ a été déposée au dossier de la Cour (P-1).
[19] Monsieur Gendreau a témoigné, lui, qu’il avait été autorisé à contracter avec Corriveau par madame Laberge, au prix approximatif de 3 200 $, tel que prévu dans sa soumission d’un montant de 21 276 $ et qu’il avait convenu avec elle qu’elle paierait directement l’entrepreneur en électricité une fois les travaux effectués.
[20] Il convient qu’il n’avait pas strictement le droit d’effectuer tous les travaux prévus au contrat car il ne détenait pas de licence d’entrepreneur.
[21] Étant donné qu’une fois les travaux débutés, sa cliente et lui ne s’entendaient pas sur la nature du travail à effectuer, il a quitté le chantier; le contrat a été résilié et les parties ont convenu que madame Laberge lui verserait la somme de 3 000 $ en paiement du travail qui avait été entrepris.
[22] Il affirme qu’il est impossible que madame Laberge puisse prétendre a posteriori qu’elle n’était au courant de rien pour les travaux d’électricité qui s’effectuaient dans le sous-sol de la maison puisqu’elle venait régulièrement sur place et qu’elle pouvait voir les deux électriciens de Corriveau qui travaillaient.
[23] Madame Laberge a témoigné, elle, que les choses n’avaient pas bien fonctionné avec monsieur Gendreau, notamment en raison du trop grand nombre d’heures de travail accumulées par monsieur Gendreau, et que pour cette raison, elle avait mis fin au contrat les liant puisqu’elle avait décidé de se limiter à l’aménagement du sous-sol de la maison, d’où leur entente pour un prix de 3 000 $ pour le travail effectué.
[24] Elle était persuadée qu’une partie de cette somme couvrait les travaux d’électricité effectués.
[25] Elle reconnaît avoir accepté à l’origine le montant de 3 200 $ prévu pour les travaux d’électricité dans la soumission de monsieur Gendreau, mais elle était persuadée que parce que ce prix était inclus dans la soumission, elle n’avait pas à payer Corriveau directement.
[26] Quant à monsieur Corriveau, elle admet lui avoir parlé des travaux de rénovation de la boîte électrique au sous-sol, travaux qu’elle allait devoir payer en surplus. Elle trouvait le prix de 1 500 $ proposé exagéré et en plus, elle ne s’est pas bien entendue avec monsieur Corriveau dont elle n’aimait pas le ton employé envers elle. Elle a donc décliné son offre.
[27] Elle était convaincue que monsieur Corriveau était sur place strictement pour les fins de préparer sa soumission.
[28] Elle ajoute qu’elle n’était pas là souvent et que « tout passait par Gendreau ! ».
[29] Elle n’a pas apprécié la qualité du travail d’installation des fils électriques par Corriveau et elle a terminé les travaux de branchement avec son beau-frère. Des photographies du sous-sol, une fois les travaux terminés par Corriveau, ont été déposées au dossier de la Cour (D-1).
[30] Monsieur Corriveau a témoigné qu’il allait de soi que des fils étaient laissés pendants puisqu’ils n’étaient pas encore connectés, le travail de branchement restant à faire. Il affirme aussi que certains des fils ne pouvaient être installés autrement puisqu’il manquait des lattes de bois. Quant à monsieur Gendreau, il soutient que la somme de 3 000 $ reçue de madame Laberge ne comprenait pas les travaux d’électricité effectués par Corriveau.
[31] Le 30 avril 2014, Corriveau a acheminé une mise en demeure à madame Laberge et à monsieur Gendreau exigeant d’eux qu’ils lui paient la somme de 3 088,95 $ incluant 25 $ pour les frais de poste. Un délai de dix jours leur était accordé pour s’exécuter. À défaut, des procédures judiciaires allaient être entreprises contre eux (P-3).
L’ANALYSE
[32] Il est indéniable que des travaux d’électricité ont été effectués par Corriveau dans le sous-sol de la maison appartenant à madame Laberge, maison qui allait être transformée en résidence pour personnes handicapées, et que ces travaux ont coûté 3 063,95 $.
[33] Aucune preuve prépondérante n’a été administrée par madame Laberge permettant d’établir que le travail effectué était inadéquat ou qu’il ne correspondait pas à ce qui avait été prévu dans le cadre de la soumission de monsieur Gendreau, ce qui aurait pu permettre une réduction du prix chargé par Corriveau. [1] Par ailleurs, le prix de 3 063,95 $ correspond grosso modo au prix de 3 200 $ pour les travaux d’électricité qu’on retrouve dans la soumission manuscrite de monsieur Gendreau.
[34] Madame Laberge fait valoir qu’elle ne saurait être tenue responsable contractuellement du paiement des travaux puisqu’elle n’a jamais contracté directement avec Corriveau.
[35] Cela est vrai. Cependant, la preuve démontre de façon convaincante que monsieur Gendreau, à titre d’entrepreneur, même s’il n’était pas qualifié à ce titre, et mandataire de sa cliente, a autorisé Corriveau à procéder aux travaux d’électricité mentionnés dans la soumission globale d’un montant de 21 276 $ ayant fait l’objet d’un accord entre madame Laberge et lui.
[36]
En vertu de l’article
[37] Or, la preuve révèle que madame Laberge a été consultée par monsieur Gendreau avant qu’il autorise Corriveau à exécuter les travaux et qu’elle a donné son accord.
[38] Cette version des faits dans un contexte où des travaux d’électricité évalués à environ 3 200 $ allaient devoir être effectués est plus logique que celle de madame Laberge qui, tout en restant évasive sur le fait qu’elle ait, oui ou non, donné son accord via monsieur Gendreau, prétend qu’elle a refusé que monsieur Corriveau procède à du travail sur la boîte électrique tout en lui mentionnant qu’elle finirait les travaux entrepris elle-même, et qu’elle croyait que celui-ci n’était sur place que pour préparer sa soumission.
[39] Cela apparaît peu crédible aux yeux du Tribunal [2] puisque manifestement des travaux importants accaparant à temps plein deux électriciens s’effectuaient dans le sous-sol de la maison et qu’il était impossible qu’elle ne s’en soit pas aperçue.
[40] Comment également comprendre qu’elle puisse déclarer qu’elle ait dit à monsieur Corriveau qu’elle allait terminer elle-même les travaux sans qu’à la base, des travaux aient déjà été entrepris?
[41] En pareilles circonstances, son explication consistant en ce qu’elle croyait que monsieur Corriveau était sur place pour préparer sa soumission ne saurait tenir la route.
[42] Enfin, même s’il était pris en compte qu’un flou artistique régnait sur le chantier par rapport à qui faisait quoi et au nom de qui, il peut néanmoins être considéré que si elle n’a pas donné une autorisation formelle à ce que les travaux d’électricité se fassent par l’entremise d’un entrepreneur en électricité, en l’occurrence Corriveau, elle l’a tout le moins fait de façon tacite par son absence de réactions ou de protestations.
[43] Madame Laberge soutient qu’il avait été entendu avant que son contrat avec monsieur Gendreau soit résilié que le prix pour l’ensemble des travaux d’électricité était compris dans celui du prix global pour l’ensemble des travaux et qu’il ne lui revenait pas de payer Corriveau directement.
[44] Son raisonnement ne change rien à l’affaire puisqu’elle aurait été de toute façon obligée de payer la somme de 3 200 $ prévue dans la soumission, directement à Gendreau.
[45] Est-ce que le prix des travaux d’électricité était compris dans les 3 000 $ payés par elle à monsieur Gendreau à la suite de la résiliation du contrat?
[46] Peut-être, bien qu’il apparaisse peu probable que la somme de 3 000 $ versée par madame Laberge à monsieur Gendreau ait pu couvrir à la fois les travaux d’électricité et les travaux de menuiserie entrepris par monsieur Gendreau.
[47] Si madame Laberge avait des reproches à faire à monsieur Gendreau quant à son comportement ou si elle estimait que leur entente contractuelle prévoyait qu’elle ne devait plus aucune somme concernant les travaux, il lui appartenait d’entreprendre directement des procédures contre monsieur Gendreau ou dans le cadre de la présente instance, de l’appeler en garantie de ses propres obligations, ce qu’elle n’a pas fait.
[48] Enfin, il faut noter que les travaux d’électricité exécutés par Corriveau, d’une valeur d’environ 3 000 $, ont conféré une plus-value à la valeur de la maison. Si Corriveau ne reçoit aucun paiement pour les travaux, il se sera appauvri au bénéfice de ses clients qui, eux, se seront alors enrichis de manière injustifiée. [3]
[49] L’enrichissement injustifié de madame Laberge donne également ouverture à l’indemnisation de Corriveau pour le montant de l’enrichissement, soit le prix des travaux effectués.
[50] Pour toutes ces raisons, madame Laberge ayant autorisé par l’entremise de son mandataire, monsieur Gendreau, les travaux d’électricité à être entrepris par Corriveau et lesdits travaux ayant été exécutés à son bénéfice, elle devra s’acquitter de son obligation contractuelle à l’endroit d’un tiers et payer à Corriveau la somme de 3 088,95 $ représentant le prix des travaux effectués, avec les intérêts calculés au taux légal, à compter de la date de la demeure, soit le 11 mai 2014.
[51] Quant à la demande reconventionnelle de madame Laberge représentant essentiellement le montant des frais de la contestation, elle sera rejetée, les frais en question devant être supportés par la partie qui succombe.
[52] En ce qui a trait au recours de Corriveau contre monsieur Gendreau, la preuve administrée ne révélant aucune faute commise par lui à titre de mandataire de madame Laberge, sa responsabilité contractuelle ne saurait être retenue dans cette affaire et la demande de Corriveau à son endroit sera rejetée.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE la demande de Corriveau Ent. Électricien inc. à l’endroit de la défenderesse, madame Martine Laberge;
CONDAMNE la défenderesse, madame Martine Laberge, à payer à la demanderesse, Corriveau Ent. Électricien inc., la somme de 3 088,95 $ avec les intérêts calculés au taux légal, à compter du 11 mai 2014;
CONDAMNE la défenderesse, madame Martine Laberge, à payer à la demanderesse, Corriveau Ent. Électricien inc., la somme de 143 $, représentant le montant des frais judiciaires que celle-ci a dû payer pour déposer sa demande;
REJETTE la demande reconventionnelle de la défenderesse et demanderesse reconventionnelle, madame Martine Laberge, à l’endroit de la demanderesse et défenderesse reconventionnelle, Corriveau Ent. Électricien inc.;
REJETTE la demande de la demanderesse Corriveau Ent. Électricien inc., à l’endroit du défendeur, monsieur Benjamin Gendreau;
CONDAMNE la demanderesse, Corriveau Ent. Électricien inc., à payer au défendeur, monsieur Benjamin Gendreau, la somme de 125 $, représentant le montant des frais judiciaires qu’il a dû payer pour déposer sa contestation.
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__________________________________ CHARLES G. GRENIER, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
10 novembre 2014 |
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