CHSLD La Maison Rose-Blanche et SQEES, section locale  298 (FTQ) (grief syndical et griefs individuels, Stéphane Gagné et un autre)

2015 QCTA 343

TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N o de dépôt :

2015-3497

 

Date :

17 mars 2015

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DEVANT L’ARBITRE :

M e PIERRE-GEORGES ROY

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CHSLD Maison Rose Blanche

Ci-après appelé « l’employeur »

Et

SQEES, section locale 298 (FTQ)

Ci-après appelé « le syndicat »

 

 

Griefs 100, 2014-03, 2014-05, 2015-08 et 09

Nature du litige : Politique de l’employeur et mesures disciplinaires

Convention collective : 2011-2015

 

Pour l’employeur : Me Michel Desrosiers

Pour le syndicat : Me Damien Lafontaine

 

 

                                                                          Mandat : 5 novembre 2014

                                                                          Audiences : 9 février et 16 mars 2015

                                                                          Décision : 17 mars 2015

 

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DÉCISION INTÉRIMAIRE ORDONNANCE DE SAUVEGARDE

(Art. 100.12 g) C.t.)

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I-              MISE EN CONTEXTE

[1]    J’ai été saisi par les parties d’un grief syndical et de deux griefs individuels contestant une politique traitant de l’apparence personnelle et de la tenue vestimentaire adoptée par l’employeur et de deux griefs contestant des décisions prises en application de cette politique.

[2]    L’audience a débuté le 9 février 2015 et le syndicat a alors initié sa preuve en faisant témoigner la représentante de l’employeur. Une deuxième journée d’audience a eu lieu le 16 mars 2015. À cette date, le syndicat a continué la présentation de sa preuve en faisant témoigner Mme Sophie Côté, présidente du syndicat

[3]    Le 9 février, le procureur de l’employeur a demandé au tribunal l’émission d’une ordonnance de sauvegarde. J’ai rendu, le 18 février 2015, une telle ordonnance valable jusqu’au 16 mars 2015. Elle se lit comme suit :

Tous les salariés membres du SQEES, section locale 298 devront, à compter de la communication de la présente décision, par tout moyen approprié, respecter les termes de l’article 6.8 de la Politique sur la tenue générale et vestimentaire (DRH-15) traitant du port du jeans;

Cette ordonnance est valide jusqu’au 16 mars 2015 inclusivement.

Je conserve évidemment juridiction pour disposer de toute difficulté relative à l’application de cette ordonnance.

[4]    Je renvoie évidemment les parties à ma décision précédente en ce qui concerne la situation factuelle pertinente à cette date.

[5]    À la fin de la journée d’audience du 16 mars, l’employeur a demandé de reconduire cette ordonnance de sauvegarde, à tout le moins jusqu’au 21 avril 2015, date de la prochaine journée d’audience. La partie syndicale s’est objecté à cette demande. Notons qu’il est prévu que la preuve et l’argumentation se terminent le 19 juin 2015 et que le dossier soit alors pris en délibéré.

II-             LA PREUVE PERTINENTE

[6]    Aucune preuve formelle n’a été présentée par les parties quant au respect de l’ordonnance précédemment rendue.

[7]    Toutefois, il ressort certains éléments utiles à cet égard de la preuve faite lors du témoignage de Mme Côté et de certains propos du procureur de l’employeur. De fait, il semble que, selon l’employeur, deux salariés membres du syndicat auraient porté des jeans bleus au travail au cours des dernières semaines. Mme Côté a nié que M. Pierre Allison ait ainsi porté des jeans bleus alors que, dans le cas de Yannick Bizier, elle n’avait pas connaissance de la situation. L’employeur se propose de faire des vérifications additionnelles à ce sujet au cours de prochains jours.

III-            LES PRÉTENTIONS DES PARTIES

A-    La position de l’employeur

[8]    Me Desrosiers a expliqué qu’une ordonnance ayant été rendue précédemment, il s’agit ici simplement d’une demande de renouvellement. Dans un tel cas, comme lorsqu’il s’agit d’une ordonnance d’injonction provisoire rendue par un tribunal civil, l’arbitre devrait, sans la nécessité d’une autre preuve, renouveler l’ordonnance.

[9]    Il ajoute que l’information concernant certains cas de non-respect de l’ordonnance, bien qu’imparfaite à cette étape, milite dans le même sens.

B-    La position du syndicat

[10]         Me Lafontaine a suggéré qu’il n’y a plus d’urgence pour le tribunal d’intervenir et que le respect de l’ordonnance rendue le 18 février dernier suggère que son renouvellement n’est pas nécessaire.

[11]         Il a ajouté qu’il n’y avait par ailleurs aucune preuve du non-respect de l’ordonnance précédente.

[12]         Il conclut en disant qu’advenant le renouvellement de l’ordonnance, le tribunal devrait s’assurer de la restreindre au port du jeans bleu.

IV-           DÉCISION ET MOTIFS

A-    Les règles en matière d’ordonnance de sauvegarde

[13]         Je réfère ici aussi les parties à ma décision du 18 février 2015.

B-    L’ordonnance de sauvegarde

[14]         Je note tout d’abord qu’à cette étape la preuve ne permet pas de savoir si l’ordonnance que j’ai rendue le 18 février 2015 a été ou non respectée par tous les salariés. Je ne me préoccuperai donc pas de ces éléments factuels aux fins de la présente décision. J’apprécierais toutefois que le résultat des vérifications de l’employeur à cet égard me soit communiqué lors de la prochaine journée d’audience.

[15]         Je suis ensuite d’avis, tout comme le suggère Me Desrosiers, que l’ordonnance peut être renouvelée même si aucune autre contravention à la Politique S-8 n’a été constatée depuis le 18 février dernier. Autrement, une ordonnance qui aurait été respectée ne pourrait jamais être renouvelée et il faudrait nécessairement attendre de nouvelles contraventions pour pouvoir en accorder une autre.

[16]         Je rappelle par ailleurs que l’ordonnance du 18 février 2015 visait essentiellement à préserver la paix industrielle afin d’éviter que les relations de travail entre les parties ne s’enveniment d’une façon qui ne pourrait aisément être rétablie par la suite. Cet objectif est encore présent et me semble suffisamment important pour justifier le renouvellement de l’ordonnance.

[17]         Dans les circonstances qui avaient été évoquées dans ma décision précédente, je crois donc qu’il est utile que l’interdiction du port du jeans soit maintenue au moins jusqu’au 21 avril 2015. Nous pourrons alors faire le point sur le développement du dossier et sur l’opportunité de prolonger l’ordonnance si l’employeur en fait la demande.

[18]         Je tiens à préciser par ailleurs que cette interdiction ne vise que le port du jeans bleu, la preuve ayant révélé que l’employeur ne s’objectait pas au fait que les salariés portent le jeans de couleur.

V-            CONCLUSIONS

[19]         Pour les motifs exposés précédemment, je rends l’ordonnance suivante :

-        Tous les salariés membres du SQEES, section locale 298 devront, à compter de la communication de la présente décision, par tout moyen approprié, respecter les termes de l’article 6.8 de la Politique sur la tenue générale et vestimentaire (DRH-15) traitant du port du jeans (jeans bleu);

-        Cette ordonnance est valide jusqu’au 21 avril 2015 inclusivement.

-        Je conserve évidemment juridiction pour disposer de toute difficulté relative à l’application de cette ordonnance.

 

 

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Me Pierre-Georges Roy

 

 

Pour le syndicat :

Me Damien Lafontaine

 

Pour l’employeur :

Me Michel Desrosiers

 

 

Date(s) d’audience :

16 mars 2015