RÉGIE DES ALCOOLS, DES COURSES ET DES JEUX
DÉCISION
[1] Le 3 novembre 2014, la Régie des alcools, des courses et des jeux (la Régie) a adressé à la titulaire un avis de convocation à une audition afin d’examiner et d’apprécier les allégations décrites aux documents annexés à l’avis, d’entendre tout témoignage utile aux fins de déterminer s’il y a eu ou non manquement à ses obligations légales et, le cas échéant, sanctionner tel manquement.
LES FAITS
[2] Les faits qui ont donné ouverture à la convocation se résument comme suit à l’avis :
[Transcription conforme]
Tolérer des boissons alcooliques acquises non conformément au permis :
Le 16 décembre 2013, les policiers ont saisi, dans votre établissement, le(s) contenant(s) de boisson(s) alcoolique(s) suivant(s) (Document 1) :
- 1 bouteille(s) de boisson(s) alcoolique(s) de 750 millilitre(s) de marque Porto Spécial Blanc Cabral, 20% alc./vol. (item 2)
- 1 bouteille(s) de boisson(s) alcoolique(s) de 750 millilitre(s) de marque inconnu, 19,1% alc./vol.(item 3)
Ce(s) contenant(s) ne portai(en)t pas un timbre de droit pouvant être relié à une facture de la Société des alcools du Québec.
Ce(s) contenant(s) a (ont) été trouvé(s) dans le réfrigérateur derrière le bar.
Total en litres du (des) contenant(s) : 1,5 litre(s)
AUTRES INFORMATIONS PERTINENTES :
2737-5377 Québec inc. est autorisé(e) à exploiter cet établissement depuis le 26 juin 1992.
Le 30 octobre 2014, la Régie a fait parvenir à 2737-5377 Québec inc. un avis au titulaire suite à l’infraction survenue le 16 décembre 2013, soit une boisson alcoolique dont l’étiquette sur le contenant était absente, n'indiquant pas avec précision la nature du contenu pouvant ainsi induire en erreur quant à la nature, la composition ou la qualité de son contenu.
La date d'anniversaire du(des) permis est le 1 er août.
L’AUDIENCE
[3] L’audience s’est tenue, le 24 mars 2015, au Palais de justice de Montréal. La titulaire était représentée par M. Richard Fortin, assisté de son procureur, M e Michel La Roche. La Direction du contentieux de la Régie était représentée par M e Simon Dupuis.
Preuve de la Direction du contentieux
[4] La preuve de la Direction du contentieux est documentaire.
[5] Tel qu’il appert du document 1, les policiers ont saisi, dans l’établissement de la titulaire le 16 décembre 2013, deux bouteilles de boissons alcooliques ne portant pas le timbre de droit de la Société des alcools du Québec (SAQ). Lesdites bouteilles se trouvaient dans un réfrigérateur derrière le bar.
Preuve de la titulaire
Témoignage de M. Richard Fortin
[6] M. Fortin est président de la titulaire, dont il possède % des actions. Il estime que son inventaire est composé de bière et de vin dans une proportion de 90 % et que le 10 % résiduel est composé de spiritueux.
[7] Il effectue les achats de vin ainsi que de spiritueux et la bière est achetée par le barman.
[8] Il n’était pas sur les lieux lors de la saisie des deux bouteilles de boissons alcooliques, mais il affirme que celles-ci ont été acquises de la SAQ il y a environ 10 ans.
[9] Il dépose, comme pièce T-1 en liasse, deux rapports détaillés des achats de la SAQ pour les périodes du 1 er janvier au 31 décembre 2012 et du 1 er janvier au 31 décembre 2013.
[10] En contre-interrogatoire, il admet qu’auparavant aucune vérification des bouteilles de boissons alcools n’était faite, car il faisait confiance au personnel de la SAQ.
[11] Depuis la saisie, des vérifications sont maintenant effectuées lors de la réception des bouteilles de boissons alcooliques.
[12] Il s’engage à effectuer des recherches afin de fournir des factures d’achats des bouteilles saisies.
[13] Comme convenu, les quatre factures suivantes ont été reçues démontrant les achats suivants :
o deux bouteilles de Cabral blanc le 20 avril 2001;
o une bouteille de Cabral blanc le 21 décembre 2001;
o une bouteille de Cabral Spécial porto blanc le 22 août 2003
o une bouteille de Cabral Branco Fino porto blanc le 22 octobre 2004.
Plaidoirie de M e Simon Dupuis
[14] La preuve documentaire révèle qu’il y a eu saisie de deux bouteilles de boissons alcooliques ne portant pas le timbre de droit de la SAQ.
[15] L’absence du timbre de droit sur les contenants de boissons alcooliques crée une présomption d’acquisition non conforme aux permis, laquelle peut être renversée par une preuve d’achat.
[16] Selon la titulaire, ces bouteilles ont été acquises à la SAQ il y a environ 10 ans.
[17] Selon le rapport policier, le timbre de droit de la SAQ des bouteilles saisies se serait effacé avec le temps en raison de l’apparition de moisissure, ce qui est compatible avec le témoignage de M. Fortin.
[18] Toutefois, la titulaire a admis qu’auparavant elle n’effectuait aucune vérification de ses bouteilles de boissons alcooliques et que cette politique a été modifiée après la saisie policière.
[19] Une vigilance accrue de la titulaire et de ses employés aurait permis de repérer ces bouteilles et de les retirer de l’établissement.
[20] Cependant, étant donné la production de factures d’achats compatibles avec le témoignage de M. Fortin et le reste de la preuve au dossier, la Direction du contentieux laisse à l’appréciation du Tribunal le soin de déterminer si la titulaire a toléré, dans son établissement, des boissons alcooliques acquises non conformément à ses permis d’alcool.
Plaidoirie de M e Michel La Roche
[21] M e La Roche précise que les timbres sur les deux bouteilles saisies étaient illisibles.
[22] Les factures déposées indiquent l’achat de cinq bouteilles sur une période de quelques années, ce qui confirme le témoignage de M. Fortin concernant la faible quantité achetée.
[23] Il soutient que les deux bouteilles saisies ont été acquises conformément aux permis d’alcool de la titulaire.
LE DROIT
[24] Les dispositions légales qui s'appliquent dans le présent dossier sont les suivantes :
Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques [1] (LIMBA)
84. Il est défendu à un titulaire de permis de garder dans l'établissement où ce permis est exploité un contenant de boissons alcooliques autres que la bière et le cidre et sur lequel n'est pas apposé le timbre de la Société ou un contenant de boissons alcooliques fabriquées par un titulaire de permis de production artisanale sur lequel n'est pas apposé un autocollant numéroté de la Régie.
[…]
Loi sur les permis d'alcool [2] (LPA)
72.1. Un titulaire de permis autorisant la vente ou le service de boissons alcooliques ne doit tolérer dans son établissement que la présence de boissons alcooliques acquises, conformément à son permis, de la Société ou d'un titulaire de permis de production artisanale, de brasseur, de distributeur de bière ou de fabricant de cidre, délivrés en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13), ou d'un agent d'un tel titulaire de permis.
[…]
86. […]
La Régie doit révoquer ou suspendre un permis si:
[…]
4° le titulaire du permis a contrevenu à l'article 72.1;
[…]
La Régie, dans la détermination de la sanction administrative pour contravention à l'article 72.1, tient compte notamment des facteurs aggravants suivants:
a) la quantité de boissons alcooliques ou d'appareils de loterie vidéo;
b) le fait que les boissons alcooliques sont de mauvaise qualité ou impropres à la consommation;
c) le fait que les boissons alcooliques sont fabriquées frauduleusement ou falsifiées;
d) le fait que le titulaire du permis a contrevenu à l'article 72.1 dans les cinq dernières années;
e) le fait que les boissons alcooliques ne sont pas commercialisées par la Société des alcools du Québec et qu'elles ne sont pas fabriquées, embouteillées ou livrées conformément à un permis délivré en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13).
ANALYSE
[25]
L’article
[26] Le 16 décembre 2013, les policiers ont saisi, dans l’établissement de la titulaire, deux bouteilles de boissons alcooliques ne portant pas le timbre de droit de la SAQ.
[27] L’absence du timbre de droit sur les bouteilles saisies crée une présomption que celles-ci n’ont pas été acquises conformément aux permis d’alcool.
[28] Cette présomption peut être renversée par une preuve d’achat, ce qui a été fait dans le présent dossier.
[29] Des relevés d’achats de la SAQ ainsi que des factures ont été déposés démontrant l’achat des bouteilles saisies et corroborant le témoignage du représentant de la titulaire.
[30] Considérant la preuve documentaire et le témoignage crédible du représentant de la titulaire ainsi que les représentations des procureurs au dossier, le Tribunal arrive à la conclusion que la titulaire n'a pas toléré, dans son établissement, la présence de boissons alcooliques non acquises conformément à ses permis. Il n'y a donc pas lieu d'intervenir auprès de celle-ci.
PAR CES MOTIFS, |
N'INTERVIENT PAS contre la titulaire dans le présent dossier.
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Régisseur |