Mason et Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances

2015 QCTA 372

TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

N o de dépôt :

 

 

Date :

11 mai 2015

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DEVANT L’ARBITRE :

M e PIERRE-GEORGES ROY

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Milicent Mason

 

Ci-après appelée « l’appelante ou Milicent Mason »

et

 

Commission administrative des régimes de retraite et d’assurance

 

Ci-après appelée « la CARRA »

 

  

 

Dossier 20145061

 

Milicent Mason pour elle même

Pour la CARRA : Me Frank Archambault

 

                                                                          Audience : 27 avril 2015

                                                                          Décision : 11 mai 2015

 

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SENTENCE ARBITRALE

(Art. 181 et suiv. Loi sur le RREGOP)

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I-       MISE EN CONTEXTE

A-    L’absence de Milicent Mason à l’audience

[1]    Milicent Mason en appelle de la décision rendue le 22 janvier 2013 par le comité de réexamen de la CARRA.

[2]    Mme Mason n’était pas présente le matin de l’audience. Des démarches ont alors été entreprises par la représentante du Greffe des tribunaux d’arbitrage des régimes de retraite publics et parapublics afin de s’enquérir des raisons de son absence. Des appels téléphoniques aux deux numéros de téléphone donnés par Milicent Mason n’ont pas donné de résultat à ce moment.

[3]    Mme Mason avait par ailleurs été dûment convoquée pour l’audience de cet appel devant avoir lieu le 27 avril 2015 à Montréal. La représentante du Greffe l’avait contactée au téléphone vers le 15 février et celle-ci avait accepté la date proposée pour l’audience. La documentation pertinente aux fins de l’audience lui avait alors été transmise par la poste à son adresse résidentielle.

[4]    À ma demande, malgré l’absence de l’appelante, le procureur de la CARRA a soumis son argumentation au soutien du rejet de l’appel.

[5]    Par la suite, j’ai demandé à la représentante du Greffe de tenter à nouveau de communiquer avec Mme Mason. Des messages téléphoniques ont été laissés à son attention les 28 et 30 avril 2015. En date de la reddition de la sentence, ces démarches n’avaient donné aucun résultat.

B-    La décision de trancher la demande d’arbitrage dans de telles circonstances

[6]    Comme je viens de l’expliquer, Milicent Mason a été dûment  informée du fait que l’audience aurait lieu le 27 avril 2015 et ce, quelques mois avant cette date. La documentation pertinente au dossier accompagnée d’un avis d’audience en bonne et due forme lui a été acheminée à l’adresse qu’elle a communiquée à la CARRA.

[7]    Or, elle ne s’est pas présentée à l’audience le 27 avril 2015 sans aviser la CARRA ou le soussigné. De plus, elle n’a pas retourné les appels faits par le Greffe les 27, 28 et 30 avril 2015 qui visaient à s’enquérir de sa situation.

[8]    Puisqu’il s’impose que les dossiers de demandes d’arbitrage procèdent dans des délais raisonnables et considérant le fait que Mme Mason s’est manifestement désintéressée de son dossier, j’ai décidé, en date de ce jour, de rendre ma décision afin de le clore.

[9]    Je reprendrai, en conséquence, dans la présente décision, les arguments développés par Mme Mason dans sa demande d’arbitrage comme représentant ses motifs d’appel complets.

II-     LA PREUVE

[10]         Le dossier constitué par le Greffe des tribunaux d’arbitrage des régimes de retraite publics et parapublics permet de résumer de la façon suivante la preuve utile à ce dossier.

[11]         Milicent Mason a contribué au régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics (ci-après désigné « le RREGOP ») de 1973 à 1997.

[12]         Elle a été congédiée pour motifs administratifs par son employeur le 26 janvier 1996 en raison de son absence du travail pour motif médical.

[13]         Elle a à ce moment perdu le bénéfice de l’assurance-salaire dont elle profitait jusqu’alors.

[14]         Mme Mason a logé un grief afin de contester cette décision de l’employeur. L’arbitre Mark Abramowitz a accueilli ce grief le 17 février 2000 tel qu’en font foi les deux dernières pages de la décision qui sont reproduites aux pages 14 et 15 du dossier. Cette décision concluait ainsi :

(Grief 92-97 (S-6))

(…)

Pour tous ces motifs, le grief 92-97, (S-6), est accueilli et la partie patronale est ordonnée de payer à Mme Mason toutes les prestations d’assurance-salaire à partir du 26 janvier 1996 jusqu’à la date où son emploi est censé être terminé en vertu des termes de la convention collective, S-1, le tout avec intérêt selon l’article 100.12a ) du Code du travail.

Grief 95-97 (S-7)

Pour les mêmes motifs que discutés relativement au grief 92-97, je considère que le grief relativement aux renseignements demandés par l’employeur en vertu de sa lettre en date du 15 août 1997, S-20, concernant son invalidité et son éligibilité pour des bénéfices d’assurance-salaire, ont été satisfaits par Mme Mason avec les certificats qu’elle a remis, incluant celui du Dr Peter Jarzem daté du 23 juillet 1997 reçu par l’hôpital le 30 juillet 1997. Il s’ensuit que le congédiement imposé au prétendu défaut de produire ces renseignements ou pièces justificatives, tel que mentionné dans la lettre de congédiement du 29 août 1997, E-21, est mal fondé. Par conséquent, ce grief est accueilli et le congédiement est annulé.

Juridiction Réservée

Juridiction relativement au quantum dû à Mme Mason par la partie patronale est réservée et les parties seront reconvoquées devant le soussigné afin de décider cet aspect du litige, à défaut d’une entente entre elles à ce sujet.

[15]         Mme Mason a cessé de cotiser au RREGOP à la fin de l’été 1997 et elle est devenue éligible à une rente de retraite en 2002. Elle aurait communiqué avec la CARRA le 5 décembre 2001 afin de l’informer qu’elle ne se prévaudrait pas de ce droit avant son 65 ème anniversaire puisqu’elle bénéficiait d’indemnités d’assurance-salaire jusqu’à ce moment.

[16]         Des lettres ont été transmises à l’appelante à cet égard le 11 avril, 30 mai, 5 juillet, 16 octobre et 15 novembre 2007, année de son 65 ème anniversaire, mais il ne semble pas que celle-ci y ait répondu (voir dossier pages 2 à 6).

[17]         Milicent Mason a finalement transmis une demande de rente de retraite à la CARRA le 11 mai 2011, applicable à compter de 2002, et la CARRA lui a répondu par l’affirmative le 14 juillet 2011 en lui précisant le montant de la rente à laquelle elle aurait droit (voir dossier pages 7 à 9). Cette information était confirmée dans une lettre en date du 31 août 2011. Il lui est alors reconnu 23,5180 années de service.

[18]         Dans tous les cas, à cette étape, la date de fin de participation au régime est située au 15 août 1997.

[19]         Le 4 novembre 2011, une demande de correction de participation à un régime de retraite était transmise à la CARRA par son ex-employeur et, suite à la mention d’une date de fin d’emploi le 22 septembre 1997, la CARRA modifiait les années de service à 23,5911 (voir dossier pages 21 et suivantes).

[20]         Au début de l’année 2012, une somme forfaitaire lui a été versée pour les années écoulées antérieures à sa demande et certains montants lui ont également été payés à titre d’intérêt couru (voir dossier pages 27 et 37).

[21]         Milicent Mason a déposé une demande de réexamen le 22 janvier 2013 en indiquant ce qui suit :

I need a review of my complete file. All information is in the arbitration decision that was sent in to Carra. I don’t think I received all my benefit.

(sic)

[22]         Une décision a été rendue par le comité de réexamen le 9 juillet 2014, laquelle revoit, tel que requis par Mme Mason, le calcul de sa rente de retraite (voir dossier pages 51 et suivantes). Au terme de cet exercice, il y est conclu :

Après analyse des articles pertinents de la loi, le comité de réexamen rejette, à l’unanimité, la demande de Mme Milicent Mason et confirme que le montant de sa rente est conforme aux dispositions légales de son régime de retraite.

[23]         Cette décision réfère par ailleurs de façon particulière à l’impact de la décision arbitrale mentionnée précédemment sur la rente de retraite de Mme Mason dans les termes suivants :

Le 26 août 1997, Mme Mason quittait son emploi pour la retraite à l’âge de 55 ans. À ce moment, elle avait droit à une rente immédiate réduite en vertu des critères de prise de retraite en vigueur à cette époque. Elle avait la possibilité de la reporter à une date ultérieure pour diminuer ou annuler la réduction due à l’anticipation applicable. La date de fin initiale du 26 août 1997 a été modifiée pour le 22 septembre 1997 à la suite du règlement d’un grief que Mme Mason avait formulé auprès de son ex-employeur, l’Hôpital Royal Victoria. Toutefois, ce n’est qu’en novembre 2011 que la CARRA a reçu la demande de correction de la participation finale.

[24]         Milicent Mason a présenté une demande d’arbitrage suite à cette décision le 29 septembre 2014. Il ressort de façon évidente des motifs d’arbitrage invoqués par Mme Mason que celle-ci est essentiellement préoccupée par le traitement accordé par la CARRA à son dossier en lien avec la décision arbitrale de l’arbitre Abramowitz. Elle écrit qu’elle ne devrait pas être pénalisée dans la mesure où l’arbitre a accueilli son grief et sa fin d’emploi, survenue en 1996, a été annulée (voir dossier pages 79 et 80).

[25]         Me Archambault a déposé en preuve le document I-1, soit un état de participation, qui laisse voir la correction apportée par la CARRA au dossier de Mme Mason suite à cette décision arbitrale.

III-    L’ARGUMENTATION

[26]         Me Archambault a expliqué au tribunal que l’analyse du dossier de Mme Mason et, en particulier, la lecture de la décision du comité de réexamen, laissent voir clairement que le calcul de sa rente de retraite a été fait conformément aux règles énoncées par la Loi sur le RREGOP. Il a d’ailleurs attiré l’attention du tribunal à cet égard sur les articles 35, 36, 39, 40, 74, 77, 78 et 151 de cette Loi.

[27]         Quant aux préoccupations particulières de Mme Mason en regard de la décision de l’arbitre Abramowitz, il a fait valoir que, s’il y avait quelque problème découlant de son application, ceux-ci ne concerneraient pas la CARRA à cette étape et c’est le tribunal d’arbitrage de grief qui aurait juridiction pour trancher le litige et non le présent tribunal.

[28]         Il suggère en conséquence que la demande d’arbitrage de l’appelante devrait être rejetée.

IV-   DÉCISION ET MOTIFS

[29]         Il me semble clair, du texte de la demande d’arbitrage de Mme Mason, qu’elle est essentiellement préoccupée de se voir reconnaître tout le service qui lui est dû suite à la décision arbitrale rendue en 2000 par l’arbitre Abramowitz.

[30]         Elle y écrit notamment ce qui suit à cet égard :

(…) Carra has the decision. I should not lose any rights. Exemption have to be more years. (…) Please read the arbitration decision. I won. All information is there. What am I entitle to, adjustment to my pension benefits. I want to receive all money to be paid to me. Because of exemption, more than 2 years should be added to pension. I should not lose no benefits, my years of service should be adjusted to my pension.

(sic)

[31]         Elle ajoute au bas de la page d’explications :

I spoke to Patricia Gassline on feb. 4 2011. She was the one that inform me that I am entitle to 8 years retroactivity.

(sic)

[32]         Je comprends très bien les préoccupations de Mme Mason. Il est éminemment légitime de sa part de vouloir recevoir tous les bénéfices qui lui sont dus. Or, la preuve telle qu’elle est consignée au dossier ne suggère en rien que ce ne soit pas le cas. De fait, il apparaît que les corrections requises après la décision de l’arbitre Abramowitz aient été faites. Il ressort notamment de la pièce I-1 que Mme Mason s’est vu reconnaitre une pleine année de service  pour l’année 1996 et 0,7269 année de service en 1997, ce qui me semble correspondre parfaitement, dans ce dernier cas, à la période incluse entre le 1 er janvier et la date de sa fin d’emploi le 22 septembre 1997.

[33]         C’était d’ailleurs le constat fait par le comité de réexamen, notamment aux pages 54 à 57 du dossier qui évoquent le calcul de la rente en fonction des paramètres prévus par la Loi, et rien ne me permet de mettre en doute ses conclusions à cet égard.

[34]         Je le répète, rien dans le dossier ou dans les propos tenus par Mme Mason dans sa demande d’arbitrage n’appuie sa prétention selon laquelle tous les bénéfices auxquels elle a droit ne lui auraient pas été versés.

[35]         Dans ce contexte et en fonction de la preuve qui m’a été faite, je ne vois pas sur quelle base je pourrais intervenir pour modifier la décision du comité de réexamen. La demande d’arbitrage de Milicent Mason est en conséquence rejetée puisque sans fondement.

 

 

V-    CONCLUSIONS

[36]         Considérant la preuve qui m’a été présentée, l’analyse du dossier d’arbitrage et après mûres délibérations :

-        JE REJETTE la demande d’arbitrage présentée par Milicent Mason.

 

 

 

 

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Me Pierre-Georges Roy

 

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pour elle même

Milicent Mason

 

Pour la CARRA :

Me Frank Archambault

 

 

Date(s) d’audience :

27 avril 2015

 

Date de la décision :

11 mai 2015