RÉGIE DES ALCOOLS, DES COURSES ET DES JEUX

 

 

 

NUMÉRO DU DOSSIER

:

40-1502608-001

[ACCES]

 

DATE DE L’AUDIENCE

:

2015-05-12 à Montréal

 

RÉGISSEURE

:

M e Louise Marchand

TITULAIRE

:

9115-8535 Québec inc.

 

RESPONSABLE

:

M me Nanie Ménard

 

NOM DE L’ÉTABLISSEMENT

:

Resto Pub Chez Nanie

 

ADRESSE

:

236-B, rue Notre-Dame

Saint-Pie (Québec)

J0H 1W0

 

PERMIS ET LICENCE EN VIGUEUR

:

Restaurant pour vendre

1 er étage (74 personnes)

N o 9785270

 

Restaurant pour vendre

Terrasse (12 personnes)

N o 9785288

 

NATURE DE LA DÉCISION

:

Contrôle de l’exploitation

 

DATE DE LA DÉCISION

:

2015-06-25

 

NUMÉRO DE LA DÉCISION

:

40-0006863

 

 

 

 

DÉCISION

 

[1]                Le 3 mars 2015, par avis de convocation, la Régie des alcools, des courses et des jeux (la Régie) a convoqué la titulaire en audience afin de procéder à une enquête et examiner les allégations décrites dans l’avis et les documents annexés, déterminer si quelque manquement a été commis et, le cas échéant, de sanctionner tel manquement.

 

LES FAITS

[2]                Les faits qui ont donné ouverture à la convocation se résument comme suit :

[Transcription conforme]

Établissement non muni d'un dispositif d'éclairage d'urgence/

Défaut de répondre à une demande de la Régie

 

Le 31 janvier 2013, la Régie faisait parvenir un avis au titulaire à l’effet que votre établissement, Resto Pub Chez Nanie, n’était pas muni d’un dispositif permettant de faire le plein éclairage des lieux en cas d’urgence ou de nécessité. La Régie vous demandait de corriger la situation dans les meilleurs délais. (Document 1, en liasse)

 

Le 14 juin 2013, les policiers ont constaté que votre établissement n’était toujours pas muni d’un dispositif permettant de faire le plein éclairage des lieux, où le public est admis, en cas d’urgence ou de nécessité. (Document 2)

 

Le 15 juillet 2013,  la Régie vous a mis en demeure d’apporter immédiatement les correctifs nécessaires et de nous faire parvenir des photographies démontrant ces correctifs et ce, dans les 30 jours de la réception de ladite mise en demeure. À ce jour, vous n’avez pas donné suite à cette mise en demeure (Document 3).

 

*****

 

AUTRES INFORMATIONS PERTINENTES :

 

9115-8535 Québec inc. est autorisé(e) à exploiter cet établissement depuis le 3 février 2012.

 

Le 16 juillet 2014, la Régie a fait parvenir un «Avis au titulaire» à 9115-8535 Québec inc. pour ne pas avoir affiché le permis à la vue du public.

 

La date d'anniversaire du(des) permis est le 10 novembre.

 

 

L’AUDIENCE

[3]                L’audience se tient le 12 mai 2015, au Palais de justice de Montréal.

[4]                M me Nanie Ménard représente la titulaire.

[5]                La Direction du contentieux de la Régie (le Contentieux) est représentée par M Joliane Pilon.

 

Preuve de la Direction du contentieux de la Régie

[6]                La procureure du Contentieux explique que, lors d’une visite chez la titulaire, le 10 août 2012, les policiers ont constaté que l’établissement de la titulaire n’était pas muni d’un dispositif permettant de faire le plein éclairage des lieux en cas d’urgence ou de nécessité.

[7]                Le 31 janvier 2013, La Régie a fait parvenir à la titulaire, un avis demandant de remédier à la situation (Document 1 en liasse).

[8]                Le 14 juin 2013, lors d’une seconde visite des lieux, les policiers ont constaté que le dispositif requis n’était toujours pas en place, tel qu’en fait foi le Rapport d’infraction général (Document 2).

[9]                Le 15 juillet 2014, la Régie a mis la titulaire en demeure d’apporter les correctifs nécessaires et de faire parvenir des photos attestant des changements apportés, dans les 30 jours de la réception de cette mise en demeure (Document 3).

[10]            En dépit de cet avertissement, lorsque l’avis de convocation pour la présente audience a été transmis à la titulaire, le 3 mars 2015, celle-ci était toujours en défaut de transmettre les photos demandées.

 

Preuve de la titulaire

Témoignage de M me Nanie Ménard

[11]            M me Ménard explique que lors de la première visite des policiers, le 10 août 2012, elle a mal compris leur demande et qu’elle était convaincue devoir changer l’ampoule brûlée de son enseigne rouge de sortie d’urgence, ce qu’elle a d’ailleurs fait.

[12]            Elle dit ne pas avoir su , à cette époque, qu’elle devait installer un dispositif permettant de faire le plein éclairage en cas d’urgence ou de nécessité à l’avant de son restaurant.

[13]            Lors de leur seconde visite, le 14 juin 2013, l es policiers lui ont expliqué la nature du dispositif requis et à quel endroit elle devait l’installer. M me Ménard s’est alors conformée à leur demande.

[14]            Malgré tout, la représentante de la titulaire reconnaît ne pas avoir répondu aux demandes de la Régie de transmettre des photos des correctifs apportés, admettant une certaine négligence à gérer ses dossiers, parce qu’elle est seule à diriger l’établissement.

[15]            Elle produit, sous la cote T-1 en liasse, des photos démontrant que deux dispositifs sont désormais en place.

 

Plaidoirie de la Direction du contentieux de la Régie

[16]            M e Pilon se réfère à l’article 5 du Règlement concernant les normes d’aménagement des établissements [1] (Règlement) , qui édicte l’obligation qu’a un établissement de se munir d’un dispositif :

5.   Un établissement où est exploité un permis pour consommation sur place doit être muni d'un dispositif permettant de faire le plein éclairage des lieux en cas d'urgence ou de nécessité.

[17]            Le défaut de se conformer à cette obligation entraîne, de fait, une infraction à l’article 39, paragraphe 2º de la Loi sur les permis d’alcool [2] (LPA), qui édicte les conditions objectives de l’obtention d’un permis d’alcool.

[18]            Le tribunal peut donc intervenir en vertu de l’article 86, paragraphe 2º de la LPA, en suspendant ou révoquant les permis de la titulaire, ou encore émettre une ordonnance, en vertu de l’article 87 de la même loi, pour que la titulaire remédie à la situation, dans le délai fixé.

[19]            La procureure souligne toutefois que la titulaire a remédié à la situation, tel qu’en font foi les photos déposées sous la cote T-1.

[20]            Par contre, en ne répondant pas aux demandes de la Régie, la titulaire a contrevenu à l’article 110 de la LPA et le tribunal peut la sanctionner en vertu de l’article 86, alinéa 1, paragraphe 8º de la même loi.

[21]            Bien que la représentante de la titulaire soit seule pour gérer le commerce, elle a néanmoins des obligations à respecter et a attendu un an et une convocation devant le tribunal pour enfin venir s’expliquer et déposer les photos demandées.


[22]            Pour illustrer l’importance de répondre aux demandes de la Régie, la procureure dépose la décision Marché R. Charrette [3] dans laquelle le tribunal précise :

[Transcription conforme]

[27]      Les soussignés considèrent que les demandes de la Régie de production de documents requis par la loi doivent être prises au sérieux.

[23]            Dans cette affaire, la titulaire avait « oublié » de répondre à la Régie à plusieurs reprises et le Tribunal lui impose une suspension de son permis pour une période de cinq (5) jours.

[24]            Dans une autre affaire, Restaurant-Bar-Trattoria Biaggis [4] , le tribunal a imposé une suspension d’une (1) journée pour avoir fait défaut de répondre aux demandes de la Régie de transmettre les documents attestant d’un changement d’actionnariat.

[25]            Dans le cas qui nous occupe, la procureure se dit d’avis qu’une suspension de deux (2) jours serait appropriée, dans la mesure où l’obligation d’installer un dispositif peut avoir plus de conséquences qu’un changement d’actionnaire et que la représentante de la titulaire a attendu un an et une convocation devant le tribunal pour réagir.

 

Représentations de la titulaire

[26]            M me Ménard répète que son seul manquement a été de ne pas bien gérer ses papiers, qu’elle « n’est pas bonne en paperasse », qu’elle doit tout gérer seule, n’ayant pas les moyens de se payer quelqu’un pour l’aider et reconnaît enfin avoir fait une erreur.

[27]            Toutefois, elle souligne ne pas très bien comprendre avoir dû payer une amende et se retrouver quand même devant le tribunal.

 

LE DROIT

[28]            Les dispositions légales qui s'appliquent dans le présent dossier sont les suivantes :


Loi sur les permis d'alcool [5] (LPA)

39.  Pour obtenir un permis, une personne doit:

 

[…]

 

 2° avoir aménagé l'établissement selon les normes prescrites par la présente loi et les règlements; […]

 

86.  La Régie peut révoquer ou suspendre un permis si:

 

[…]

 2° le titulaire du permis ou, si celui-ci est une société ou une personne morale visée par l'article 38, une personne mentionnée à cet article ne satisfait plus aux conditions exigées par l'article 36, les paragraphes 1° à 3 ° du premier alinéa de l'article 39 ou les paragraphes 1.1° à 2° du premier alinéa de l'article 41;

 

[…]

 

 8° le titulaire du permis contrevient à une disposition des articles 70 à 72, 73, 74.1, 75, du deuxième alinéa de l'article 76, des articles 78, 82 ou 84.1 ou refuse ou néglige de se conformer à une demande de la Régie visée à l'article 110; […]

 

87.  La Régie peut, au lieu de révoquer ou de suspendre un permis pour un motif prévu par les paragraphes 2° et 6° à 8° du premier alinéa de l'article 86, ordonner au titulaire du permis d'apporter les correctifs nécessaires dans le délai qu'elle fixe.

 

110.  La Régie peut exiger d'un titulaire de permis tout renseignement relatif à l'application de la présente loi et des règlements, de même que la production de tout document s'y rapportant.

 

Elle peut aussi exiger d'un titulaire de permis autorisant la vente ou le service de boissons alcooliques qu'il lui fournisse, dans les délais qu'elle indique et pour la période qu'elle détermine, un rapport de ses achats et de ses ventes de boissons alcooliques. Dans le cas d'un titulaire de permis d'épicerie, ce rapport peut porter sur tout produit acheté et vendu dans l'épicerie.

 

Règlement concernant les normes d'aménagement des établissements [6] (Règlement)

 

5.   Un établissement où est exploité un permis pour consommation sur place doit être muni d'un dispositif permettant de faire le plein éclairage des lieux en cas d'urgence ou de nécessité.

 

 


ANALYSE

[29]            La preuve de la commission d’une infraction à l’article 5 du Règlement et, de ce fait, à l’article 39, paragraphe 2º de la LPA n’est pas contredite.

[30]            La titulaire reconnaît en effet ne pas avoir respecté l’obligation qui lui est faite d’installer, dans son établissement, un dispositif permettant de faire le plein éclairage des lieux en cas d’urgence ou de nécessité, jusqu’à ce que les policiers la rappellent à l’ordre.

[31]            La preuve est également faite que la titulaire a, par la suite, fait défaut de répondre aux demandes de la Régie qui l’enjoignait de lui faire la démonstration qu’elle s’était conformée à ses obligations, en transmettant des photos attestant de l’installation du dispositif.

[32]            Un an se sera écoulé entre l’envoi d’une mise en demeure et la convocation à la présente audience pour que des photos soient enfin déposées, en liasse sous la cote T-1, et que la démonstration soit faite que le dispositif de sécurité est installé.

[33]            M me Ménard a expliqué son long silence en admettant avec franchise qu’elle a été négligente, avouant qu’elle n’est pas très douée pour la gestion des papiers, qu’elle est seule et ne peut se payer d’aide et qu’elle ne comprend pas très bien avoir dû payer des amendes et se retrouver quand même devant la Régie.

[34]            Tout en étant sensible aux difficultés éprouvées par une personne qui gère seule un établissement d’une capacité de 86 personnes pour deux permis d’alcool, la soussignée rappellera que tout titulaire de permis doit faire face à ses obligations, que la loi est la même pour tous et que la titulaire a l’obligation de s’en informer.

[35]            Dans notre dossier, l’installation d’un dispositif d’éclairage d’urgence est une question de sécurité publique, qui doit faire l’objet d’une vigilance constante de la part d’une titulaire. La soussignée constate que lorsque M me Ménard a compris le sens de la demande des policiers et qu’elle a obtempéré.

[36]            Mais, elle n’a pas pour autant répondu aux demandes de la Régie qui souhaitait s’assurer que tout était rentré dans l’ordre.

[37]            Lorsque, comme en l’espèce, la Régie demande des renseignements ou la production de documents, ainsi que le lui permet l’article 110 de la LPA, il ne s’agit pas d’un caprice, mais bien de la nécessaire vigilance dans la protection de la sécurité publique dans les établissements détenteurs de permis d’alcool.

[38]            Il importe donc de prendre cela au sérieux et de donner suite aux demandes de la Régie. Convaincue que la titulaire a bien compris qu’elle doit répondre à la Régie, la soussignée imposera la sanction minimale.

[39]            Conformément à l’article 86 alinéa 1, paragraphe 8º de la LPA, une suspension des permis de la titulaire pour une période d’une (1) journée apparaît donc juste et raisonnable dans les circonstances.

 

PAR CES MOTIFS,

la Régie des alcools, des courses et des jeux :

 

SUSPEND                                          pour une période d’un (1) jour , les permis de restaurant pour vendre n os 9785270 et 9785288 dont 9115-8535 Québec inc. est titulaire, et ce, à compter de la mise sous scellés des boissons alcooliques;

ORDONNE                                       la mise sous scellés des boissons alcooliques se trouvant sur les lieux par un inspecteur de la Régie ou par le corps de police dûment mandaté à cette fin pour la période de la suspension ci-dessus mentionnée.

 

 

 

 

 

                                                           LOUISE MARCHAND, avocate                          

                                                           Régisseure

 

 



[1] RLRQ, chapitre P-9.1, r. 4.

[2] R LRQ, chapitre P-9.1.

[3] RACJ, décision n o 40-0004367, le 26 septembre 2011.

[4] RACJ, décision n o 40-0006117, le 8 mai 2014.

[5] RLRQ, chapitre P-9.1.

[6] RLRQ, chapitre P-9.1, r. 4.