Hage c. Général Rénovation Unique inc. |
2015 QCCQ 7563 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-32-140307-135 |
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DATE : |
10 août 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
EMMANUELLE SAUCIER |
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YOLA HAGE |
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Demanderesse et défenderesse reconventionnelle |
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c. |
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GÉNÉRAL RÉNOVATION UNIQUE INC. |
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Défenderesse et demanderesse reconventionnelle |
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JUGEMENT |
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[1] Yola Hage réclame à Général Rénovation Unique Inc. ( Unique ) 5 000 $ représentant les dommages subis en raison du retard des travaux de rénovation d’Unique dans un des logements de sa propriété.
[2] Les dommages se détaillent ainsi:
- perte de loyer pour les mois d'avril à ao û t 2013 : 3 140 $
- frais d' é lectricit é : 77,54 $
- mat é riaux : 513,67 $
- main-d'œuvre pour terminer le contrat : 630 $
- dommages moraux, troubles et inconvénients : 638,79 $
[3] Unique nie s'être engagé e à terminer les travaux dans un délai d'un mois, c’est-à-dire avant le 30 avril 2013 et ajoute que Mme Hage annule sans raison suffisante le contrat.
[4] Unique se porte demanderesse reconventionnelle et lui réclame 1 557,21 $ représentant le coût d'outils laissés dans le logement, ainsi que le solde des travaux prévus au contrat.
[5] Mme Hage nie qu’Unique laisse des outils dans le logement et ajoute qu'elle ne lui doit rien puisqu’elle ne termine pas les travaux prévus au contrat.
Questions en litige
[6] a) Mme Hage signe-t-elle le contrat de construction sous pression ?
b) Unique s'est-elle engagée à terminer ses travaux dans les 30 jours ?
c) Unique commet-elle une faute envers Mme Hage en retardant indûment l’exécution des travaux et en lui réclamant à l’avance le paiement complet alors qu’ils ne sont pas complétés ? Si oui, quels sont les dommages de Mme Hage ?
d) Unique peut-elle réclamer à Mme Hage le coût des sommes des travaux non complétés et de ses outils ?
Analyse et discussion
[7]
En matière civile, le fardeau de la preuve repose sur les épaules de la
partie demanderesse en vertu du principe prévu à
l'article
[8]
Le Tribunal décide selon la balance des probabilités que prévoit
l'article
[9] Mme Hage désire rénover la cuisine et la salle de bain d’un de ses logements et que les travaux se terminent en un mois pour lui permettre de le relouer et de minimiser sa perte de revenus locatifs.
[10] Mme Hage contacte trois entrepreneurs, mais aucun d'entre eux ne peut compléter les travaux dans un délai d’un mois et à un coût qui lui convient.
[11] Mme Hage connait déjà Unique pour avoir retenu ses services l'année précédente pour la rénovation de la cuisine et de la salle de bain d'un autre logement. Elle contacte donc son représentant qui estime le coût des travaux à 5 000 $ de plus qu’en 2012.
[12] Mme Hage hésite à lui donner le contrat puisqu’en 2012, Unique n’exécute pas les travaux dans le temps requis.
[13] Ne trouvant pas d'alternative plus intéressante, elle lui octroie donc le contrat.
[14] Mme Hage explique avoir signé le contrat sans en négocier le contenu en raison des pressions exercées par le représentant d'Unique et de ses fausses représentations.
[15] La preuve est contradictoire quant à la durée prévue des travaux.
[16] Malgré le fait que le délai est une considération importante pour Mme Hage, elle n'exige pas que la date de fin des travaux soit indiquée au contrat.
[17] Selon Mme Hage, Unique s’engage à terminer les travaux pour la fin du mois d’avril 2013 et lui facture 5 000$ de plus que l'année précédente pour un travail identique justement en raison du court délai.
[18] Comme Unique est fermée à apporter des changements quant aux termes de son contrat, Mme Hage accepte de le signer tel que rédigé.
[19] Pour le représentant d’Unique, l’augmentation du prix de 5 000$ se justifie par le constat que le contrat de 2012 sous-estime le temps requis. Ainsi, Unique facture 5 000$ de plus pour les mêmes travaux, non pas en raison de son engagement de les terminer dans un délai d'un mois, mais pour ne pas perdre d’argent sur le contrat.
[20] Unique admet que Mme Hage lui demande de réaliser les travaux dans un tel délai. Elle lui spécifie qu'elle fera tout en son pouvoir pour que les travaux soient faits le plus rapidement possible et qu’ils seront complétés au plus tard à la fin du mois de juin, ce qu’elle accepte.
[21] Le Tribunal conclut que Mme Hage ne rencontre pas son fardeau de démontrer que l’entente entre les parties prévoit que les travaux seront complétés pour la fin avril 2013.
[22] Au contraire, Mme Hage admet que les autres entrepreneurs ne peuvent respecter le délai ou l'aurait fait à un prix supérieur et qu’Unique ne veut modifier son contrat pour l’inscrire.
[23] Mme Hage sait pertinemment qu’Unique demande moins cher que les autres entrepreneurs. Bien qu’Unique lui occasionne des délais importants en 2012 et qu’elle n’est pas fiable, Mme Hage décide en toute connaissance de cause de lui octroyer le contrat.
[24] Elle ne rencontre pas son fardeau de prouver qu'elle fait l'objet de pression au moment de la signature du contrat, d'autant plus que c'est elle qui communique plusieurs fois avec Unique pour retenir ses services.
[25] Mme Hage est libre de signer le contrat et c’est ce qu’elle fait. Si elle subissait des pressions au moment de la signature, elle aurait pu en demander l’annulation avant le début des travaux, ce qu’elle ne fait pas.
[26] Les travaux commencent donc et Mme Hage fait les paiements requis en respectant le contrat. Elle est, par contre, déçue par leurs rythmes d'exécution.
[27] La relation se détériore entre les parties à la fin du mois d'avril, car les travaux progressent trop lentement.
[28] Le 10 mai 2013, Mme Hage publie une annonce pour trouver un locataire, mais constate qu'il est difficile de trouver un locataire sans que les travaux ne soient terminés et également en raison du fait que ce moment de l’année est moins propice aux locations.
[29] Mme Hage constate que l'installation des armoires de cuisine ne progresse pas, que l'employé d'Unique est incapable de les installer et que certaines tablettes et portes sont ne sont pas livrées. Elle perd confiance qu'Unique finira les travaux dans un délai raisonnable.
[30] Le 26 mai 2013, Unique lui réclame le dernier versement prévu au contrat ainsi que le remboursement d’un fusible alors que les travaux ne sont pas terminés.
[31] Pour Mme Hage, cette demande est inacceptable et il s'en suit une dispute entre les parties.
[32] Elle voit bien que les travaux n'avancent plus depuis quelques semaines et s'inquiète qu'Unique ne finira pas les travaux si elle la paie au complet.
[33] Elle appelle donc à la Régie du bâtiment pour porter plainte et met en demeure Unique le 28 mai 2013.
[34] La tension est à son comble entre les parties et la relation entre les parties se détériore rapidement. Le représentant d'Unique devient de plus en plus agressif et intransigeant avec elle. Mme Hage craint des représailles en mettant fin au contrat.
[35] Elle change la serrure du logement pour qu'Unique ne puisse plus avoir accès au chantier.
[36] Le 30 mai 2013, le représentant d'Unique se présente sur le chantier et constate le changement de serrures. Il frappe à la porte du logement du rez-de-chaussée où Mme Hage habite. Il est furieux. La police intervient et lui demande de quitter les lieux.
[37] Le Tribunal conclut que c’est en raison de l’absence d’activité significative sur le chantier, de l’agressivité du représentant d’Unique à son égard et de son insistance d’obtenir le paiement complet avant la fin du contrat, que Mme Hage le résilie.
[38] Le Tribunal conclut que la demande de paiement avant la fin des travaux de l’ensemble du contrat est abusive dans les circonstances et que la résiliation du contrat est raisonnable.
[39] Cette situation cause un préjudice à Mme Hage. Elle est ébranlée, épuisée des tensions liées à ce chantier et doit coordonner l’achat de matériaux et la main d’œuvre pour achever les travaux et pouvoir louer son logement.
[40] La preuve est contradictoire sur les travaux qui restent à faire puisque le contrat est mal rédigé et ne décrit pas adéquatement le travail.
[41] Le Tribunal conclut que les travaux suivants ne sont pas complétés: pose des comptoirs de cuisine, du pas de la porte, du lavabo de la salle de bain, le contrepied des armoires, l’application de coulis dans la salle de bain et installation d'un luminaire.
[42] Mme Hage soutient qu'elle retient les services de plusieurs personnes qu'elle rémunère en argent comptant, mais ne fait pas la preuve du paiement à l'audience. Certains travaux effectués par ces personnes ne sont pas compris dans le contrat d’Unique, de sorte qu’elle doit de toute façon les assumer seule.
[43] Elle réclame le coût de certains matériaux achetés pour compléter le travail au montant de 513,67 $.
[44] Pour sa part, le représentant d’Unique reconnait qu’il manque 2 portes d’armoires de cuisine. Toutefois, il soutient que tous les matériaux pour finir les travaux sont dans le logement à son départ.
[45] Une analyse de ces factures permet de constater que certains objets réclamés par Mme Hage ne font pas partie du contrat, tels que des coupe-froid, une prise de sécheuse et un fusible.
[46] Le Tribunal conclut que Mme Hage met en preuve qu’elle dépense 469,38 $ de matériaux nécessaires pour terminer les travaux prévus au contrat.
[47] Quant à sa réclamation pour les frais d’électricité et les loyers impayés, Mme Hage estime qu'Unique doit les assumer pour les mois d'avril à juillet 2013 puisqu'à partir de la fin du mois d'avril, elle fait trainer de façon fautive l’exécution des travaux.
[48] Compte tenu de la preuve et du fait que l’entente ne prévoit pas que les travaux seront achevés à la fin du mois d’avril, le Tribunal ne lui accorde que la perte de loyer et les frais d'électricité pour le mois de juillet 2013 totalisant 804,76 $.
[49] Mme Hage réclame à Unique 638,79$ de dommages moraux, troubles et inconvénients en raison du contrat abusif, des fausses représentations d’Unique et des délais qu’elle engendre en ne terminant pas ses travaux.
[50] Elle rencontre son fardeau de preuve quant aux troubles et inconvénients qu'elle subit et le Tribunal lui accorde donc le montant réclamé de 638,79 $.
[51] Quant à la demande reconventionnelle d'Unique, le Tribunal conclut qu'elle ne peut réclamer le solde dû sur son contrat puisqu'il n'est pas entièrement complété.
[52] Unique réclame le remboursement du coût d'un escabeau laissé dans le logement après son expulsion du chantier, mais ne produit aucune facture.
[53] En l'absence de preuve de son coût de remplacement et compte tenu de la preuve contradictoire quant à la présence de l'escabeau sur le chantier, Unique ne rencontre pas son fardeau de preuve et cette réclamation est rejetée.
[54] Par contre, la preuve démontre que la perceuse reste sur les lieux et qu'Unique en rachète une nouvelle pour la remplacer.
[55] Le Tribunal condamne donc Mme Hage à en payer le coût de 170 $ à Unique.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
CONDAMNE
Général
Rénovation Unique Inc. à payer à Yola Hage 1 912,93 $ avec intérêts au
taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article
ACCUEILLE en partie la demande reconventionnelle;
CONDAMNE
Yola Hage à
payer à Général Rénovation Unique Inc. 170 $ avec intérêts au taux légal majoré
de l’indemnité additionnelle prévue à l’article
Opérant compensation,
CONDAMNE
Général Rénovation Unique Inc. à payer à Yola Hage 1 742,93 $ avec
intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article
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__________________________________ Emmanuelle Saucier, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
Le 30 juin 2015 |
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