Proulx c. Courtemanche |
2015 QCCQ 8498 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
BEDFORD |
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LOCALITÉ DE |
GRANBY |
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« Chambre civile » |
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N° : |
460-32-007503-153 |
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DATE : |
16 septembre 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
SERGE CHAMPOUX, J.C.Q. |
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ESTELLE PROULX |
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Demanderesse |
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c. |
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FRANÇOIS COURTEMANCHE |
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-et- |
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SONIA COURTEMANCHE |
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Défendeurs |
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JUGEMENT |
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[1] Estelle Proulx poursuit son fils François Courtemanche et sa fille Sonia Courtemanche pour la somme de 12 500 $ estimant avoir subi des dommages s'élevant à ce montant, en raison de leurs agissements fautifs.
[2] En juillet 2014, Estelle Proulx, alors âgée de 73 ans est hospitalisée à Sherbrooke en raison de divers problèmes de santé. Jusqu'à ce moment, elle demeure à Valcourt en logement.
[3] Sa prétention est à l'effet que pendant son hospitalisation, ses enfants, les défendeurs, en auraient été avisés. Ils se seraient rendus à son chevet puis l'auraient assisté pour son retour à la maison. Toutefois, pendant son séjour à l'hôpital et après son retour, ils auraient pris sur eux de faire un ménage radical de son logis, jetant aux rebuts l'essentiel sinon tous ses meubles, ses vêtements, ses biens personnels et ses souvenirs.
[4] Ils auraient également fait disparaître une somme importante qu'elle conservait en argent liquide et l'auraient engagé dans de grandes dépenses, notamment avec l'achat d'électroménagers dispendieux. Elle allègue également qu'ils se seraient approprié de nombreux outils, lui appartenant.
[5] De manière détaillée, elle réclame 1 350 $ pour un mobilier de salon, 2 000 $ pour la perte d'un matelas, un lit, une commode et une table de chevet, 800 $ pour une table de cuisine et quatre chaises, 500 $ d'accessoires de cuisine, 1 050 $ pour une laveuse et une sécheuse, 200 $ en draperie et accessoires de toilette, 5 000 $ d'outils de travail et 1 600 $ en argent comptant qui serait disparu, pour un total de 12 500 $.
[6] Il n'y a pas de description très précise de ce qui aurait été perdu, ni de la valeur de ces objets. Par exemple, la somme de 800 $ pour la table et les quatre chaises provient du coût d'achat de cette table et de ces chaises 20 ans auparavant, selon Estelle Proulx, qui ne dépose pas de factures à ce sujet.
[7] La somme de 1 050 $ pour la laveuse et la sécheuse provient du coût actuel d'un tel ensemble, tel qu'on le voit annoncé dans la publicité d'un marchand. Aucune preuve de marque, de modèle, d'âge ou de factures des objets disparus n'est produite.
[8] Quant au 5 000 $ d'outils, Estelle Proulx est incapable d'en faire (ou d'en produire) un inventaire. Le Tribunal ignore en pratique de quoi il s'agit, comment avait été acquis ces outils, leur âge, leur prix, leur condition. Des généralités ont été avancées pour les décrire.
[9] Si elle réclame 1 600 $ en argent, à la Cour elle allègue plutôt qu'une somme de 10 000 $ serait en cause. Le chiffre est avancé, mais aucun relevé bancaire ne le justifie, et aucune provenance expliquant une telle somme n'est non plus avancée.
[10] De nombreux témoins sont venus corroborer le fait que François Courtemanche et Sonia Courtemanche ou encore d'autres membres de la famille seraient venus dans le logis d'Estelle Proulx. Ils disent avoir assisté à la mise aux rebuts de nombreux objets qu'eux-mêmes considéraient en bon état. Ils affirment même en avoir récupéré certains.
[11] En défense, François et Sonia Courtemanche expliquent s'être rendus au chevet de leur mère à l'occasion de son hospitalisation. La preuve révèle clairement que ceux-ci ont une relation difficile avec la demanderesse, tout comme l'autre fils de celle-ci. Ils assurent qu'ils voulaient bien faire, leur mère sortant alors d'hôpital et le médecin ayant indiqué qu'elle souffrait, notamment, de difficultés pulmonaires. Ils avaient décidé de faire le ménage de son appartement, lequel était fortement affecté par les traces de fumée de cigarette qui étaient imprégnées partout.
[12] En arrivant sur place, ils constatent l'état de malpropreté qui règne, l'encombrement de l'endroit et la décrépitude de certains de ses biens. Pendant la période où ils sont demeurés sur place ou dans les alentours, ils ont donc complètement nettoyé et repeint l'appartement de leur mère avec son consentement.
[13] Ils affirment aussi s'être rendu avec elle pour magasiner une nouvelle laveuse et sécheuse, lesquelles ne fonctionnaient plus du tout correctement, de même qu'un réfrigérateur. Dans tous les cas, la demanderesse Proulx était avec ses enfants, tant au moment du choix que de la livraison des appareils. Les vieux appareils ont été ramassés par le vendeur, Brault & Martineau.
[14] Quant aux meubles jetés et aux vêtements, ils assurent qu'ils n'ont jeté que ce que leur mère indiquait expressément ne plus vouloir, conservant tout le reste. Quant aux outils, François Courtemanche indique les avoir amenés chez lui, puisqu'ils encombraient le logis de sa mère.
[15] Un item préoccupant fortement les défendeurs était que leur mère conserve plus de 17 000 $ en argent comptant chez elle. Au point de vue de sa sécurité et informés des visites d'un certain locataire ou de sa conduite, les enfants Courtemanche craignaient que le bien-être de leur mère ne soit en péril. Il semble en effet qu'Estelle Proulx ait pris la décision depuis un certain nombre d'années de conserver avec elle des sommes importantes, de crainte d'une saisie de son compte de banque. Cette crainte serait relative à un litige fiscal qu'elle avait.
[16] En conséquence, François Courtemanche aurait amené l'argent avec lui et ouvert des CELI au nom de sa mère pour la protéger.
[17] Lorsque sa mère a manifesté, contrairement à son attitude originale, ne plus consentir à l'aide offerte par ses enfants, ceux-ci y ont mis fin. Les outils ont été rapportés, l'argent retourné et les enfants se sont complètement retirés de tout contact avec elle.
[18] En conséquence, ils soutiennent ne rien s'être appropriés qui soit à elle, avoir toujours agi dans son intérêt et avec son consentement et lui avoir entièrement remis ce qui leur avait été temporairement confié.
ANALYSE ET DÉCISION
[19] Toute personne qui réclame d'une autre supporte le fardeau de prouver le bien-fondé de sa réclamation. Le Code civil du Québec s'exprime ainsi à ce sujet:
2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.
Celui qui prétend qu'un droit est nul, a été modifié ou est éteint doit prouver les faits sur lesquels sa prétention est fondée.
1991, c. 64, a. 2803.
2804. La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.
1991, c. 64, a. 2804.
[20] La preuve offerte par la demanderesse Proulx est vague, imprécise et jusqu'à un certain point confuse. Ces témoins, qui d'un côté semblent bien offusqués des objets qui auraient été jetés, ont pourtant, pour certains, récupéré ces objets pour les conserver pour eux-mêmes, et même dans certains cas, pour les revendre à leur profit.
[21] La demanderesse Proulx produit, notamment, à l'appui de sa réclamation, des enregistrements subreptices qu'elle a fait des rencontres avec François et Sonia Courtemanche. Elle affirme que ces enregistrements démontrent qu'elle était presque terrorisée par ses enfants qui criaient, la harcelaient et l'ont forcé à agir.
[22] L'écoute attentive de ces conversations, avec respect, prouve tout le contraire. En général, ce sont François et Sonia Courtemanche qui demeurent remarquablement calmes et sensibles, attentifs aux désirs et commentaires de leur mère, même patients avec elle, alors qu'elle s'emporte et leur adresse de nombreux reproches.
[23] La preuve dans son ensemble ne révèle donc aucunement que les défendeurs auraient agi malhonnêtement à l'endroit d'Estelle Proulx, ni qu'ils auraient exercé sur elle des pressions indues ni qu'ils lui auraient causé quelque dommage.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[24] REJETTE la demande.
[25] LE TOUT AVEC FRAIS .
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__________________________________ Serge Champoux, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
24 août 2015 |
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