COMMISSION DES RELATIONS DU TRAVAIL |
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Dossier : |
271845 |
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Cas : |
CM-2015-0068 |
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Référence : |
2015 QCCRT 0480 |
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Québec, le |
18 septembre 2015 |
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DEVANT LES COMMISSAIRES : |
Marie-Claude Grignon, juge administrative |
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Myriam Bédard, juge administratif |
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Jean Paquette, juge administratif |
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Robert Paquette
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Requérant |
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c. |
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Toitures Couture et associés inc.
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Intimée |
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DÉCISION |
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[1]
Le 7 janvier 2015, Robert Paquette, s’appuyant sur le paragraphe 3
o
du premier alinéa de l’article
[2] Monsieur Paquette contestait ainsi son congédiement qu’il allègue être fait sans cause juste et suffisante le 3 octobre 2013 par Toitures Couture & associés inc . (l’ employeur ). Dans la décision contestée, la Commission conclut qu’il n’a pas été congédié, mais qu’il a fait l’objet d’un licenciement en raison des difficultés financières éprouvées par l’entreprise.
[3] Toitures Couture & associés inc. est spécialisée dans l’installation, la réparation et l’entretien de toitures dans les secteurs commercial, industriel, institutionnel (ou public, comme les hôpitaux, écoles, bâtiments municipaux) et en génie civil. Elle n’œuvre pas dans le secteur résidentiel. L’entreprise compte environ 150 employés.
[4] Le 3 octobre 2013, on met fin à l’emploi d’estimateur de monsieur Paquette. Il est alors au service de l’entreprise depuis plus de cinq ans. Le motif invoqué est ainsi exprimé dans la lettre qu’on lui remet et dont l’objet est « mesure administrative » :
En raison du contexte économique difficile que nous rencontrons et de la décision qui a été prise par la direction de ne plus soumissionner au public, nous avons le regret de vous annoncer que nous abolissons votre poste d’estimateur et que nous mettons fin à votre emploi en date de ce jour.
[5] Monsieur Paquette allègue qu’il s’agit là d’un prétexte pour mettre fin à son emploi.
[6] Depuis 2008, il travaille comme estimateur de projets dans le secteur public, de 40 à 60 % de son temps. Il agit aussi comme représentant technique et gérant de projets.
[7] Au moment de son départ, il reçoit une indemnité de préavis de quatre semaines comme prévu à la LNT, période pendant laquelle l’employeur ne lui demande pas de travailler. Il doit au contraire quitter les lieux le matin même immédiatement après l’annonce.
[8] À l’exception de son chef estimateur, il est le salarié de son équipe qui reçoit le salaire le plus élevé et aussi celui qui justifie du plus grand nombre d’années de service. Aucun effort n’a cependant été fait pour le maintenir en emploi. La Commission le note au paragraphe 13 de la décision contestée :
[13] Au cours de la rencontre, on ne lui donne aucune information détaillée quant à la situation financière de l’entreprise, se contentant de lui dire qu’il s’agit d’une décision de la direction. Le plaignant affirme qu’on ne lui offre pas de réduire son temps de travail ni sa rémunération ni d’occuper un autre poste au sein de l’entreprise, notamment celui de gérant de projets pour lequel il détient pourtant les qualifications requises.
[9] D’autres salariés de l’entreprise ont été remerciés et certains, dont deux estimateurs, ont quitté leur emploi ou ont été déplacés dans d’autres services. Après la fin d’emploi de monsieur Paquette, un nouveau représentant technique est embauché.
[10] L’employeur affirme qu’il ne soumissionnera plus dans le secteur public qui serait moins rentable, mais selon monsieur Paquette, les derniers contrats ont été profitables pour l’entreprise. Au surplus, dans les mois qui suivent sa fin d’emploi, entre décembre 2013 et mai 2014, 25 soumissions ont été présentées pour ce type de contrats au public qui ont rapporté un chiffre d’affaires de plus de 1 300 000 $. Il ne s’agirait selon l’employeur que de la suite du travail déjà amorcé.
[11] Après avoir relaté ces faits, la Commission fait une revue du droit applicable qu’elle résume en ces termes :
[37] En d’autres termes, le licenciement est une rupture complète du lien d’emploi pour des raisons qui ne sont pas imputables à l’employé tandis que le congédiement implique que l’employeur a toujours besoin de services, mais qu’il ne désire plus qu’ils soient rendus par celui-ci .
[38] Il revient à l’employeur de faire la preuve de ses difficultés économiques et d’établir que les motifs utilisés sont objectifs, impartiaux et non inspirés d’éléments subjectifs propres à la personne ciblée. La Commission doit aussi se pencher sur les critères de sélection retenus afin de vérifier s’ils ne cachent pas un prétexte.
[39] Une fois cette preuve faite, il revient au plaignant d’établir que, contrairement aux apparences, la terminaison de son lien d’emploi est fondée sur des critères partiaux, illicites ou discriminatoires. Il doit démontrer des indices ou des éléments révélant que le licenciement constitue un prétexte visant à camoufler un congédiement.
[40] En ce qui concerne la nature de la preuve
requise pour établir les difficultés financières de l’entreprise, l’employeur
n’a pas l’obligation de fournir ses états financiers. Dans
Hélie
c.
Groupe
de sécurité M.G.M. inc.
,
[46] Afin de démontrer ses difficultés
financières, M.G.M. n’a pas l’obligation de déposer ses états financiers. Sa
preuve doit toutefois être convaincante. (Voir
Paulynice
c.
Sous-vêtements
Yvez Martin inc.
, AZ-5083024 (T.T.),
Hernande
z c.
Entreprises
Oerlikon Contraves inc.
,
[41] Enfin, quant aux critères de l’ancienneté ou
des années de service, et à «
moins que la
pratique dans l’entreprise ne le démontre, le critère d’ancienneté n’est pas un
critère déterminant
» (Jean et Désir c. Beco Industries limited
partnership Industries Beco société en commandite,
[12] Puis, appliquant le droit aux faits, elle conclut que l’employeur a démontré les difficultés financières alléguées par une preuve non contredite, malgré le fait que les états financiers de l’entreprise n’aient pas été déposés. Cette conclusion est justifiée par son appréciation de la preuve et est exprimée en ces termes :
[42] L’employeur a démontré l’existence d’une situation financière difficile pour l’entreprise. Le licenciement de six employés, l’impartition de certains services corporatifs et le non remplacement de plusieurs salariés en absence de maladie en sont d’éloquentes manifestations.
[43] Le fait que cette démonstration repose uniquement sur le témoignage de la DRH et non sur les états financiers de l’entreprise n’y change strictement rien, cela n’ayant aucunement pour effet de rendre cette preuve moins crédible ou probante. Celle-ci n’a d’ailleurs pas été contredite.
[13] En ce qui a trait aux critères de l’employeur qui ont mené au choix du salarié dont l’entreprise devait se départir, la Commission précise qu’ils ne sont pas clairement identifiés et que les explications ne sont pas détaillées :
[44] Il est vrai que l’employeur n’a pas clairement identifié les critères retenus pour procéder à l’abolition du poste du plaignant et qu’aucune explication détaillée n’a été fournie pour justifier le fait que c’est lui, plutôt que madame Todd, monsieur Munger ou encore monsieur Dumas, qui a été licencié.
[45] Toutefois, à la lecture de la lettre du 3 octobre 2013, on comprend aisément que l’employeur a choisi d’abolir le poste du plaignant non seulement en raison du contexte économique difficile que connaît l’entreprise , mais surtout parce qu’il a été décidé « de ne plus soumissionner au public ». Or, la preuve révèle que le plaignant consacrait de 40 % à 60 % de son temps à ce secteur d’activités. Il s’agit donc là d’un critère objectif et raisonnable parce qu’il est rationnellement lié aux besoins particuliers de l’entreprise.
[46] Par ailleurs, aucune preuve n’a été présentée pour démontrer que les fonctions qu’accomplissait le plaignant existent toujours. Bien au contraire, celle-ci révèle que madame Todd n’est plus au service de l’entreprise et que monsieur Munger ne travaille plus comme estimateur puisqu’il se retrouve désormais au service des ventes.
[47] Cela étant, il n’appartient pas à la Commission de substituer aux critères retenus par l’employeur ceux qui lui sembleraient plus appropriés, tels que les années de service du plaignant. Son rôle se limite à s’assurer que les motifs invoqués sont réels, objectifs et qu’ils ne sont pas inspirés d’éléments subjectifs propres au plaignant.
[14] La Commission conclut en ces termes :
[48] En l’espèce, le plaignant n’a pas réussi à démontrer que les explications fournies par l’employeur sont des prétextes pour se débarrasser de lui. Le fait qu’il n’ait constaté aucune diminution de son travail ni réduction des activités de l’entreprise avant son congédiement, que la société a continué à soumissionner dans le secteur public jusqu’en mai 2014, malgré le contenu de la lettre du 3 octobre 2013, et que l’employeur a embauché un représentant technique après son départ ne constituent pas des indices suffisants qui permettent de conclure à un congédiement déguisé.
[49] Ainsi, il faut conclure que le plaignant a fait l’objet d’un licenciement.
[15] Robert Paquette demande à la Commission de réviser cette décision, d’accueillir sa plainte, d’annuler son congédiement et de retourner le dossier à un juge administratif pour la détermination des mesures de réparation appropriées.
[16]
Les dispositions pertinentes de l’article
127. La Commission peut, sur demande, réviser ou révoquer une décision, un ordre ou une ordonnance qu'elle a rendu:
(…)
3° lorsqu'un vice de fond ou de procédure est de nature à l'invalider.
[17]
La décision phare en la matière,
Syndicat canadien de la fonction
publique, section locale 4479
c.
Syndicat des travailleurs et
travailleuses des Centres jeunesse de Montréal
(
[24] Donc, lorsqu’on demande à la Commission de réviser une de ses propres décisions en vertu du paragraphe 3 du 1 er alinéa de l’article 127, on ne peut pas lui demander de substituer son interprétation à celle déjà faite, on doit plutôt lui démontrer la présence d’un vice fondamental et sérieux qui doit nécessairement entraîner la nullité de la décision.
[25] La doctrine et la jurisprudence enseignent que, peuvent entre autres constituer un vice de fond ou de procédure une erreur grossière, un accroc sérieux et grave à la procédure, une décision ultra vires , c’est-à-dire rendue sans que la Commission ait eu la compétence pour le faire, une décision rendue en l’absence de preuve ou en ignorant une preuve évidente. Il faut aussi que soit démontrée la nécessité d’une correction à cause de ce vice sérieux.
[18] Ainsi, une demande de révision n’est pas de la nature d’un appel. Une formation en révision ne doit pas évaluer de nouveau la preuve déjà présentée afin d’y substituer son appréciation. Le requérant doit établir non seulement que la décision contestée est entachée d’un vice de fond ou de procédure, mais que celui-ci est de nature à l’invalider.
[19] Monsieur Paquette reproche à la Commission d’avoir appliqué erronément le fardeau de preuve comme il a été établi par la jurisprudence et d’avoir occulté un pan de la preuve qui lui a été présentée. Il invoque l’absence d’une preuve convaincante de difficultés économiques et ajoute n’avoir subi aucune baisse de son niveau d’activités.
[20] Dans un premier temps, la Commission, dans la décision contestée, évalue la preuve et conclut que l’employeur a démontré les difficultés financières alléguées. Il aurait été possible de conclure autrement. Toutefois, cette conclusion est motivée et ne présente aucun vice de fond de nature à l’invalider.
[21] Ensuite, elle s’attarde à la question des critères de sélection utilisés par l’employeur pour décider de la personne qui devait perdre son emploi. La Commission reconnaît, dans la décision attaquée, que les critères retenus ne sont pas clairement identifiés et qu’aucune explication détaillée n’a été fournie pour justifier le choix de mettre fin à l’emploi de monsieur Paquette qui, à l’exception de son chef, est le plus ancien de son équipe. Cependant, elle conclut comme suit :
[45] Toutefois, à la lecture de la lettre du 3 octobre 2013, on comprend aisément que l’employeur a choisi d’abolir le poste du plaignant non seulement en raison du contexte économique difficile que connaît l’entreprise , mais surtout parce qu’il a été décidé « de ne plus soumissionner au public ». Or, la preuve révèle que le plaignant consacrait de 40 % à 60 % de son temps à ce secteur d’activités. Il s’agit donc là d’un critère objectif et raisonnable parce qu’il est rationnellement lié aux besoins particuliers de l’entreprise.
(caractères gras ajoutés)
[22] Ainsi, le critère qui justifie le choix de monsieur Paquette est le fait que l’employeur cesse de soumissionner au public et la Commission estime qu’il s’agit d’un critère objectif et raisonnable puisqu’il est rationnellement lié aux besoins de l’entreprise. Encore là, cette conclusion est motivée et ne présente aucun vice de fond de nature à l’invalider.
[23] Puisque l’employeur a établi les motifs économiques et le critère de sélection pour justifier le licenciement, il appartenait alors à monsieur Paquette de démontrer des indices ou des éléments révélant un prétexte visant à camoufler un congédiement déguisé. Or, sur la preuve administrée à cet égard, la Commission conclut comme suit :
[48] En l’espèce, le plaignant n’a pas réussi à démontrer que les explications fournies par l’employeur sont des prétextes pour se débarrasser de lui. Le fait qu’il n’ait constaté aucune diminution de son travail ni réduction des activités de l’entreprise avant son congédiement, que la société a continué à soumissionner dans le secteur public jusqu’en mai 2014, malgré le contenu de la lettre du 3 octobre 2013 , et que l’employeur a embauché un représentant technique après son départ ne constituent pas des indices suffisants qui permettent de conclure à un congédiement déguisé .
[49] Ainsi, il faut conclure que le plaignant a fait l’objet d’un licenciement.
(caractères gras ajoutés)
[24] Ce faisant, la Commission donne ses conclusions, mais n’expose pas son raisonnement. Elle n’explique pas pourquoi ces indices ne sont pas suffisants pour constituer un prétexte. Qui plus est, la preuve révèle que les soumissions se sont maintenues après le départ de monsieur Paquette à raison de 25 soumissions générant 1 300 000 $ de chiffre d’affaires. De plus, un représentant technique est embauché, ce qui faisait partie des tâches de monsieur Paquette. Pourquoi cela serait insuffisant pour constituer des indices de prétexte? La Commission ne le mentionne pas et monsieur Paquette n’est pas en mesure d’en comprendre les motifs. Or, il s’agit d’un aspect déterminant de la décision, car l’arrêt des soumissions au public est le critère objectif et raisonnable justifiant le choix de monsieur Paquette. Ce critère est retenu par la Commission et ne peut être invalidé.
[25] Ce manque de motivation et l’absence d’explications sur l’insuffisance des indices font en sorte qu’on ne peut comprendre pourquoi la continuité des soumissions publiques et l’embauche d’un représentant technique ne constituent pas un indice de prétexte suffisant. À cela s’ajoutent d’autres faits mis en preuve par monsieur Paquette à titre d’indice de prétexte qui ne sont pas commentés ou expliqués, comme l’absence d’effort pour le garder au service de l’employeur et son départ subit immédiatement après l’annonce du licenciement.
[26]
Sur la question de la motivation, la jurisprudence relève qu’il s’agit
d’une composante des règles de la justice naturelle. De plus, l’article
[27]
Dans l’affaire
La Brasserie Molson-O’keefe
c.
Boucher
,
[1993]
Il appert donc que les critères à retenir, quand un justiciable invoque une motivation inadéquate affectant la validité d'une sentence arbitrale, seraient de déterminer si la décision est intelligible, et si elle a été suffisamment motivée pour qu'on puisse comprendre ses fondements . L'arbitre n'a pas besoin de commenter tous les faits mis en preuve devant lui, ni de trancher tous les arguments que les parties lui ont présentés, et il n'est pas tenu de s'expliquer en grand détail, pourvu qu'une lecture de la décision permette qu'on comprenne son raisonnement.
[28] Même si cette obligation n’entraîne pas celle de reprendre tous et chacun des éléments invoqués, elle impose de faire état du raisonnement de façon à permettre aux parties de comprendre la décision.
[29]
Par ailleurs, dans l’affaire
Syndicat des professionnelles en soins
de Québec (SPSQ)
c.
Fortier
,
[42] Une décision ne permettant pas au juge de révision de comprendre sa justification ou une décision qui ne serait ni transparente ni intelligible quant au processus décisionnel ou au raisonnement qui a mené à ce qu’elle soit rendue , rendrait impossible l’exercice du contrôle judiciaire.
[43] Pour reprendre les termes de la juge Grenier dans l’affaire Ozanam, la « motivation logique constitue pour le justiciable une garantie que la décision qui affecte ses droits n’est pas le résultat d’une appréciation arbitraire » et « permet au justiciable d’exercer pleinement les recours qui sont mis à sa disposition ».
[44] Dans le contexte d’une révision judiciaire, les motifs de la décision doivent donc permettre au juge de révision de déterminer si celle-ci se situe parmi les issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ou si elle est correcte, selon la norme de contrôle applicable aux questions dont elle dispose.
[45] Si le juge de révision n’est pas en mesure d’exercer son rôle, la décision est insuffisamment motivée et pourra être annulée et renvoyée afin qu’une décision motivée soit rendue par un autre arbitre ou décideur.
(caractères gras ajoutés, références omises)
[30] Bien que ces décisions concernent la révision judiciaire, leur enseignement s’applique en l’espèce. En effet, l’absence de raisonnement expliquant la conclusion voulant que les indices de prétexte mis en preuve par monsieur Paquette ne sont pas suffisants pour conclure à un congédiement déguisé fait en sorte que la présente formation n’est pas en mesure de comprendre la justification qui sous - tend cette conclusion.
[31]
Dans l’affaire
Les
Professionnel(le)s
en soins de santé unis (FIQ)
c.
Hôpital
Maisonneuve-Rosemont
,
[ 24 ] Il y a lieu de distinguer l’absence totale de motifs, ce qui pourrait conduire à une violation des principes de justice naturelle, et donc constituer un vice de fond fondamental, et l’insuffisance des motifs. Dans ce dernier cas, c’est uniquement si l’insuffisance est telle qu’on ne peut suivre un raisonnement intelligible ayant mené à la conclusion que la décision comporte un vice de fond qui permet la révision. (…)
[ 27 ] Ainsi, une décision peut être succincte, ne pas reprendre tous les éléments de preuve ou les arguments, voire comporter des lacunes, sans que cela constitue un vice de fond irrémédiable. Elle doit cependant permettre de comprendre le raisonnement qui mène aux conclusions .
(caractères gras ajoutés)
[32] Puis, statuant sur le fond de la requête présentée devant elle, la Commission ajoute ce qui suit :
[ 42 ] La décision contestée n’explique pas pourquoi les lois invoquées par le requérant ne sont pas « utiles » pour trancher la question soulevée par le requérant. Il s’agit plutôt de l’énoncé d’une conclusion, sans démonstration du raisonnement qui a pu l’y mener.
(…)
[ 44 ] Même en considérant la décision dans son ensemble et en laissant place à l’implicite, le processus décisionnel est à ce point lacunaire qu’on ignore le raisonnement qui a conduit au rejet de la requête en vertu de l’article 39.
(caractères gras ajoutés)
[33] La preuve des indices de prétexte constitue la défense de monsieur Paquette à la preuve de l’employeur sur les motifs économiques et sur le critère de sélection. Ce dernier doit pouvoir comprendre le raisonnement suivi par la Commission pour conclure à son insuffisance.
[34] Or, l’absence de raisonnement qui permettrait de comprendre la conclusion sur l’insuffisance des indices de prétexte vicie l’intelligibilité de l’ensemble de la décision, puisqu’elle concerne un aspect déterminant de celle-ci. En effet, il est impossible de comprendre pourquoi la continuité des soumissions au public et l’embauche d’un représentant technique, ainsi que les autres faits mis en preuve par monsieur Paquette, ne révèlent pas un prétexte. Cela est d’autant plus vrai que le critère qui a été retenu pour mettre fin à l’emploi du plaignant se fonde sur la décision de cesser les soumissions auprès du secteur public. Il y a ainsi une incohérence et l’absence de motivation empêche d’en connaître la justification, ce qui a pour effet de constituer un vice de fond de nature à invalider la décision.
[35] Ainsi, la décision contestée est, de ce fait, entachée d’un vice fondamental et sérieux et doit être invalidée.
[36] Dans l’affaire Hôpital Maisonneuve-Rosemont , précitée, la Commission conclut comme suit :
[ 46 ] La présente formation n’a pas non plus à rendre la décision qui aurait dû être rendue, comme le lui demande le requérant. Pour cela, il faudrait qu’elle procède à l’analyse de la preuve et des arguments en lieu et place de la première instance ce qui n’est pas son rôle. Le dossier doit être retourné au greffe afin qu’un autre commissaire en soit saisi et détermine avec les parties la marche à suivre pour la suite.
[37] En l’espèce, il y a lieu de rendre les mêmes ordonnances pour la suite du dossier.
EN CONSÉQUENCE, la Commission des relations du travail
ACCUEILLE partiellement la demande de révision;
RÉVOQUE la décision rendue le 15 décembre 2014;
RETOURNE le dossier au greffe afin que les parties soient convoquées à une audience devant un autre commissaire pour décider de la plainte de Robert Paquette .
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________________________________ __ Marie-Claude Grignon, présidente de la formation
________________________________ __ Myriam Bédard
________________________________ __ Jean Paquette
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M e Sara Poisson |
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RIVEST, TELLIER, PARADIS |
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Représentante du requérant |
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M. François Voisine |
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Représentant de l’intimée |
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Date de la mise en délibéré : |
23 juin 2015 |
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