Wozniak c. Lemaçon |
2015 QCCQ 9087 |
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JG2338
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
BEAUHARNOIS |
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LOCALITÉ DE VAUDREUIL-DORION « Chambre civile » |
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N° : |
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DATE : |
2 octobre 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
CÉLINE GERVAIS, J.C.Q. |
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JOHN WOZNIAK et ANTONIA SHEGALOV |
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c. |
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JACQUES LEMAÇON et HÉLÈNE ADAMS ET JONATHAN MAILHOT |
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JUGEMENT |
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[1] Il s'agit d'une réclamation de 3753,04 $, représentant le coût de remplacement d'un adoucisseur d'eau non fonctionnel qui se trouvait dans la résidence achetée par les demandeurs, John Wozniak et Antonia Shegalov. Ceux-ci poursuivent les vendeurs de la maison, Jacques Lemaçon et Hélène Adams, ainsi que le courtier immobilier, Jonathan Mailhot.
LES FAITS :
[2] Le 2 juin 2014, John Wozniak et Antonia Shegalov achètent la propriété de Jacques Lemaçon et Hélène Adams située sur la rue de la Plantation à St-Lazare pour la somme de 480 000 $. Monsieur Wozniak et Mme Shegalov font inspecter la maison avant de l'acheter.
[3] Bien que l'acte de vente intervienne en juin 2014, ce n'est qu'au mois d'octobre suivant que M. Wozniak et Mme Shegalov prennent possession de la propriété. Lorsqu'ils emménagent, M. Wozniak tente de mettre en fonction l'adoucisseur d'eau qui se trouvait au sous-sol, mais ne peut y parvenir. Il requiert alors les services de Système d'eau-vie R.O. inc., qui se rend sur place le 25 octobre 2014. La facture de l'inspection dénote que le système est non fonctionnel, que le sel contenu dans le bac à saumure a saisi et qu'il s'agit d'un problème majeur. Le coût de réparation étant très élevé, on recommande de remplacer l'unité au complet.
[4] L'entreprise ajoute également sur sa facture qu'elle avait fait la même recommandation à l'ancien propriétaire le 14 juillet 2010. C'est alors que M. Wozniak et Mme Shegalov réalisent que M. Lemaçon et Mme Adams étaient au courant du fait que ce système n'était pas fonctionnel, et que cette situation ne leur a pas été déclarée.
[5] Ils produisent comme pièce P-2 une soumission de la même entreprise qui évalue au montant de 3095,22 $ plus taxes le coût de remplacement du système, de même calibre, soit 3558,73 $ au total. Monsieur Wozniak et Mme Shegalov réclament également le coût de l'inspection de 194,31 $.
[6] Dans leur contestation, M. Lemaçon et Mme Adams allèguent leur bonne foi, reconnaissant qu'ils étaient parfaitement au courant du fait que le système n'était pas fonctionnel, mais ajoutent ne jamais avoir voulu cacher cette situation. Ils indiquent qu'il était visible que le système était débranché et qu'il n'est pas mentionné au document de promesse d'achat que l'adoucisseur d'eau fait partie des inclusions. Ils indiquent qu'une autre personne qui avait présenté une offre d'achat avait exigé le retrait de l'appareil, ce qu'ils étaient prêts à faire. Ils soulignent qu'ils n'ont eu aucune intention de tromper les acheteurs.
[7] Madame Adams était présente lors des visites faites par M. Wozniak, Mme Shegalov et des membres de leurs familles, et était disponible pour répondre aux questions. Aucune discussion relative à l'adoucisseur d'eau n'a cependant eu lieu lors des visites.
[8] Dans son rapport, l'inspecteur ne traite pas de l'état de l'adoucisseur d'eau.
[9] Monsieur Lemaçon et Mme Adams ont été les seuls propriétaires de cette résidence, qu'ils ont fait bâtir en 2002.
[10] Monsieur Lemaçon et Mme Adams étaient déjà propriétaires de ce système d'adoucisseur d'eau, qui était installé dans leur résidence précédente, et qu'ils ont transféré dans leur nouvelle maison. Il s'agit donc d'un système qui avait environ 14 ans d'âge au moment de la vente, mais qui n'était plus fonctionnel depuis plusieurs années.
[11] Quant au courtier immobilier, il allègue dans sa contestation avoir agi selon les règles de l'art.
[12] Un élément essentiel dans le présent dossier est cependant le fait que la fiche descriptive de l'immeuble mentionne spécifiquement sous la rubrique "equipment/services" la présence d'un adoucisseur d'eau, avec l'échangeur d'air, l'aspirateur central et l'ouvre porte de garage électrique.
[13] Par ailleurs, le formulaire obligatoire de déclaration du vendeur comporte une question précise sur la présence d'un adoucisseur d'eau, à son item d) 8.5. Aucune case n'a été cochée à ce sujet. Il s'agit par ailleurs de la seule question à laquelle aucune réponse n'est apportée.
ANALYSE ET DÉCISION :
[14]
Pour en arriver à la conclusion qu'un problème
décelé dans un immeuble constitue un vice caché, il doit répondre à un certain
nombre de critères, dont celui de la gravité. Les parties ont expliqué au
Tribunal la raison pour laquelle il était utile de posséder un adoucisseur
d'eau, notamment quant à l'entretien des robinets et pommeau de douche, ainsi
que pour faciliter le lavage des vêtements. Il faut néanmoins constater que M.
Wozniak et Mme Shegalov vivent sans la présence d'un adoucisseur d'eau depuis
qu'ils ont acheté la maison. Le Tribunal n'est pas nécessairement prêt à
considérer que le fait que l'adoucisseur d'eau ne soit pas fonctionnel
constitue un vice caché au sens de l'article
[15] Cependant, ce n'est pas le seul angle sous lequel il faut analyser la réclamation de M. Wozniak et Mme Shegalov, dans la mesure où la fiche descriptive de l'immeuble mentionnait spécifiquement la présence d'un tel adoucisseur, qui était effectivement sur les lieux.
[16] On peut certes se demander quelle était l'utilité de conserver un adoucisseur d'eau qui n'était pas fonctionnel, mais de surcroit irréparable. Au-delà de cette considération, cependant, on peut se demander la raison pour laquelle on mentionne à la fiche descriptive la présence de cet adoucisseur, alors que le courtier savait pertinemment qu'il n'était pas fonctionnel.
[17] Si le Tribunal croit que M. Wozniak et Mme Shegalov, de même que les membres de leurs familles qui étaient présents sur les lieux n'ont pas été informés du non-fonctionnement de l'appareil, le Tribunal est loin d'être convaincu que le courtier des acheteurs n'en était pas informé. Il a en effet indiqué dans son témoignage qu'on lui avait mentionné que l'appareil n'était pas utilisé, tout en ajoutant qu'il savait bien ce qu'une telle mention pouvait signifier. Il ne semble pas avoir attiré l'attention de ses clients sur ce sujet.
[18] Monsieur Lemaçon et Mme Adams ont indiqué ne pas comprendre pourquoi l'adoucisseur d'eau était inclus à la fiche descriptive, croyant même que leur courtier avait pu utiliser une fiche plus ancienne confectionnée par d'autres courtiers à l'occasion d'une tentative antérieure de vente de leur résidence.
[19] Le courtier a cependant indiqué dans son témoignage qu'il avait lui-même préparé la fiche descriptive et y avait inclus l'adoucisseur d'eau, même s'il n'était pas fonctionnel, en indiquant que cela pourrait servir d'élément de négociation.
[20] Le Tribunal a eu la très nette impression que les courtiers jouaient sur les mots quant à savoir si l'adoucisseur était non utilisé ou non fonctionnel.
[21] Le Tribunal ne croit pas que M. Lemaçon et Mme Adams aient voulu tromper les acheteurs, et accepte leur témoignage quant au fait qu'ils étaient prêts à enlever le système à la demande de l'autre acheteur, à qui ils avaient indiqué l'état du système.
[22] Le Tribunal ne peut cependant se convaincre qu'il n'y avait pas une telle intention dans l'esprit du courtier qui a vraisemblablement inclus l'adoucisseur d'eau afin de rendre plus attrayante la maison de ses clients et améliorer les chances d'obtenir une promesse d'achat.
[23] C'est pour cette raison que le Tribunal retient la responsabilité du courtier, qui a sciemment inscrit à la fiche descriptive de l'immeuble une information qu'il savait inexacte. [1]
[24] Reste à évaluer le quantum des dommages. Il est certain que M. Wozniak et Mme Shegalov ne peuvent obtenir la valeur d'un système neuf, dans la mesure où, s'ils avaient acquis la maison avec un adoucisseur d'eau fonctionnel, celui-ci aurait eu à son actif plusieurs années d'usage. Il y a donc lieu de réduire la valeur de la réclamation de M. Wozniak et Mme Shegalov, que le Tribunal évalue, dans l'exercice de sa discrétion, à la somme de 1500 $.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE en partie l'action;
CONDAMNE
le défenderesse,
Jonathan MAILHOT, à payer aux demandeurs, John WOZNIAK et Antonia SHEGALOV, la
somme de 1500 $, en plus des intérêts au taux légal et de l'indemnité
additionnelle prévue à l'article
LE TOUT avec les frais judiciaires de 138 $;
REJETTE l'action contre Jacques LEMAÇON et Hélène ADAMS sans frais.
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__________________________________ CÉLINE GERVAIS, J.C.Q. |
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