Delorme c. Lucas

2015 QCCQ 10232

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

GATINEAU

LOCALITÉ DE

GATINEAU

« Chambre civile »

N° :

550-32-022413-154

 

 

 

DATE :

23 octobre 2015

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SOUS LA PRÉSIDENCE DU

JUGE JEAN FAULLEM, J.C.Q.

 

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FERNAND DELORME

 

Demandeur

c.

 

DONALD LUCAS

-et-

JOANNE VILLENEUVE

 

Défendeurs

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JUGEMENT

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JF 1075

 

 

[1]            Le demandeur réclame aux défendeurs, faisant tous deux affaires sous la dénomination Entretien DJ, 317,44 $ en dommages-intérêts résultant d’une mésentente survenue dans l’interprétation d’un contrat de déneigement.

[2]            En contestation, les défendeurs plaident qu’ils ont respecté toutes leurs obligations contractuelles.

 

I-          QUESTIONS EN LITIGE

[3]            Les questions de faits et de droit auxquelles le Tribunal doit répondre dans le dossier à l’étude sont les suivantes :

            a)         Le demandeur est-il en droit d’annuler ou de résilier le contrat de                                    déneigement intervenu avec les défendeurs?

            b)         Le cas échéant, quel est le montant des dommages auxquels a droit le                          demandeur?

 

II-         CONTEXTE ET ANALYSE

[4]            La preuve pertinente retenue par le Tribunal aux fins de l’analyse du dossier à l’étude consiste en ce qui suit.

[5]            Le 17 novembre 2014, les parties signent un contrat par lequel les défendeurs s’engagent à procéder au déneigement du stationnement de la résidence du demandeur. Le demandeur s’engage, en contrepartie, à payer aux défendeurs 287,44 $ pour les services convenus au contrat.

[6]            Le demandeur paye aux défendeurs la somme complète de 287,44 $ à la signature du contrat.

[7]            La période de validité du contrat de déneigement s’étend du 1 er novembre 2014 au 31 mars 2015, soit sur une période de cinq mois.

[8]            Puisqu’un abri d’auto temporaire à deux places de marque Tempo recouvre l’entièreté de la surface du stationnement, les tâches des défendeurs consistent à déblayer l’entrée de l’abri d’auto ainsi qu’à enlever la neige qui s’accumule sur le toit de celui-ci.

[9]            Au 14 janvier 2015, les défendeurs ont effectué à quatre reprises les travaux prévus au contrat.

[10]         À cette même date, le demandeur appelle les défendeurs pour se plaindre que la neige qui s’accumule sur les deux côtés extérieurs de l’abri d’auto n’a pas été enlevée. Les défendeurs lui mentionnent que l’enlèvement de la neige sur les côtés de l’abri d’auto ne fait pas partie du contrat.

[11]         Insatisfait, le demandeur avise les défendeurs qu’il met fin au contrat, et ce, à compter du jour même.

[12]         Le 9 février 2015, les défendeurs envoient une lettre au demandeur afin de lui confirmer qu’à sa demande, ils acceptent de mettre un terme à l’entente. Ils l’informent qu’aucun remboursement ne sera effectué.

[13]         Le 12 février 2015, le demandeur envoie aux défendeurs une mise en demeure afin de réclamer le remboursement total de la valeur du contrat, soit 287,44 $, ainsi qu’une somme supplémentaire de 30 $ représentant les services de déneigement payés à une tierce partie pour des travaux effectués le 16 janvier 2015.

[14]         Le 24 février 2015, le demandeur introduit au dossier de la Cour sa demande judiciaire.

[15]         Plus précisément, le demandeur requiert du Tribunal l’annulation du contrat de déneigement. Il réclame, à titre de dommage le remboursement de la somme de 287,44 $ payée en contrepartie des services offerts par les défendeurs, en plus d’une somme de 30 $ payée par le demandeur à une tierce partie pour les travaux effectués à la suite de sa décision de mettre un terme au contrat.

 

III-        LE DROIT ET L’ANALYSE

[ 16 ]         Le contrat signé par les parties est régi notamment par la Loi sur la protection du consommateur ( LPC ). De plus, puisqu’il s’agit d’un contrat d’entreprise ou de services à durée déterminée, les articles 2098 et subséquents du Code civil du Québec ( CCQ ) s’applique également à la relation contractuelle des parties.

[17]         L’article 8 LPC prévoit que le consommateur peut requérir la nullité du contrat en cas de disproportion considérable des prestations des parties qui équivaut à de l’exploitation du consommateur ou lorsque l’obligation du consommateur est excessive, abusive ou exorbitante.

[18]         Dans le dossier à l’étude, cette situation n’est pas le cas et le demandeur ne peut pas obtenir l’annulation du contrat pour les motifs prévus à la Loi sur la protection du consommateur .

[19]         Il est d’ailleurs à noter que le demandeur admet, au procès, être satisfait du travail des défendeurs effectué lors de leurs trois premières visites.

[20]         Le litige des parties résulte de l’accumulation de la neige aux abords de l’abri d’auto et de l’interprétation différente qu’ils proposent des termes du contrat.

[21]         Pour le demandeur, la neige rejetée sur les côtés de l’abri d’auto doit être enlevée par les défendeurs. Puisque ces derniers refusent d’exécuter ce travail, le demandeur décide de mettre un terme au contrat.

[22]         Or, le contrat intervenu entre les parties stipule clairement que le « transport de la neige » n’est pas inclus à celui-ci.

[23]         Ainsi, l’obligation des défendeurs consiste au déblaiement de la neige qui se trouve sur le stationnement du demandeur. Compte tenu de la présence de l’abri d’auto, qui recouvre la totalité de la superficie du stationnement, les obligations des défendeurs consistent donc à enlever la neige qui s’accumule sur le toit de l’abri ainsi qu’à l’avant de celui-ci, le tout afin de permettre l’accès des véhicules au stationnement.

[24]         Il est de connaissance judiciaire que la Ville de Gatineau interdit à quiconque de déposer de la neige dans les rues ou sur les trottoirs de son territoire, sous peine d’imposition d’une amende.

[25]         Ainsi, puisque le contrat exclut le « transport de la neige » par les défendeurs, ceux-ci doivent entreposer la neige qui provient du stationnement et de l’abri d’auto sur le terrain du demandeur, afin de respecter la réglementation municipale. Cette interprétation du contrat découle de la nature de celui-ci et des circonstances dans lesquelles il a été conclu, conformément aux règles d’interprétation des contrats prescrits à l’article 1426 CCQ.

[26]         Dans ces circonstances, les défendeurs ne sont donc pas responsables de l’enlèvement de la neige situé sur les côtés de l’abri d’auto, puisque cette neige ne se trouve pas sur le stationnement, mais bien à l’extérieur de celui-ci.

[27]         En conséquence, le demandeur ne peut pas exiger l’annulation du contrat pour cause de non-respect par les défendeurs de leurs obligations contractuelles.

[28]         En revanche, l’article 2125 CCQ permet au client, c’est-à-dire au demandeur dans le dossier à l’étude, de résilier unilatéralement le contrat de déneigement intervenu avec les défendeurs, et ce, même sans motif valable.

[29]         En cas de résiliation unilatérale par le client, celui-ci doit toutefois payer aux défendeurs, en proportion du prix convenu, la valeur des travaux exécutés avant la notification de la terminaison de l’entente, conformément à l’article 2129 CCQ. Les défendeurs, pour leur part, doivent rembourser toutes les avances reçues en excédant de ce qu’ils ont gagné.

[30]         Au moment où le demandeur informe les défendeurs de la résiliation du contrat, environ la moitié de la durée de celui-ci est atteinte. En conséquence, les défendeurs sont tenus de restituer au demandeur la moitié de la somme payée à la signature du contrat, soit 143,72 $ (287,44 ÷ 2).

[31]         Le demandeur n’a pas le droit d’exiger la somme supplémentaire de 30 $ qui découle des travaux exécutés par une tierce partie à la suite de l’annulation du contrat, puisque cette dépense découle de sa propre décision et qu’elle ne constitue pas un préjudice subi résultant du défaut des défendeurs de respecter leurs obligations contractuelles.

[32]         Finalement, compte tenu du résultat mitigé, tant de la demande que la contestation, chaque partie assume ses propres frais judiciaires.

 

[33]         POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[34]         ACCUEILLE PARTIELLEMENT la demande judiciaire;

[35]         CONDAMNE les défendeurs à payer au demandeur 143,72 $ avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 CCQ à compter du 22 février 2015, date d’échéance de la mise en demeure.

[36]         LE TOUT , sans frais.

 

 

 

 

 

 

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JEAN FAULLEM, J.C.Q .

 

 

 

 

 

Date d’audience :

14 septembre 2015