Essaied c. Boucher |
2015 QCCQ 12160 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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« Chambre civile » |
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N° : |
500-32-140539-133 |
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DATE : |
LE 6 OCTOBRE 2015 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
JULIE VEILLEUX, J.C.Q. |
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CHOKRI ESSAIED […] Montréal, Québec […] |
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Demandeur |
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c. |
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PIERRE-PAUL BOUCHER […] Montréal, Québec […] |
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Défendeur |
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JUGEMENT |
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[1] Le demandeur réclame des dommages-intérêts de 6 500 $ à la suite d'un mandat lié à la garde de ses enfants confié au défendeur, avocat. Ce dernier conteste au motif que le dossier s'est déroulé normalement, qu'il n'a commis aucune faute et que sa conduite n’est pas causale des dommages réclamés.
CONTEXTE
[2] En 2011, le demandeur dépose une requête pour obtenir la garde partagée égale de ses enfants dans le dossier de la Cour Supérieure portant le numéro 500-04-055626-114.
[3] Le 3 mai 2013, une convention d'honoraires et mandat professionnel (la convention) intervient entre les parties. Le défendeur est mandaté par le demandeur pour agir au nom de ce dernier dans ce même dossier.
[4] À la suite de la première rencontre entre les parties, l'expertise psychosociale effectuée quelques mois plus tôt est déposée. Selon le demandeur, le résultat de cette expertise est positif puisque la garde partagée égale des enfants est recommandée.
[5] Le 19 juin 2013, le procureur de l'ex-conjointe du demandeur interroge ce dernier. Des engagements de fournir des documents liés au statut matrimonial du demandeur en Tunisie sont pris.
[6] Le 26 juin 2013, le demandeur et son ex-conjointe, tous deux représentés par avocat, préparent une Déclaration commune pour fixation d'une audience avec enquête et argumentation de plus de deux heures (la Déclaration commune). Cette Déclaration commune n'est pas déposée au dossier de la Cour puisque les engagements pris par le demandeur à la suite de son interrogatoire ne sont pas encore remplis.
[7] À cette même date, la requête du demandeur pour la garde des enfants est reportée au 12 juillet 2013 et le défendeur transmet une lettre au demandeur pour l’en informer et pour confirmer qu'il est en attente de documents, à savoir les engagements pris lors de l'interrogatoire du 19 juin 2013.
[8] Il appert du plumitif que le 12 juillet 2013, la requête du demandeur a été remise sine die.
[9] Selon le demandeur, les documents liés à ses engagements sont d'abord transmis au défendeur par fax, puis par courriel. Selon le défendeur, ce n’est que le 22 août qu'il est possible d’ouvrir ces documents rédigés en arabe. Il demande alors au demandeur de lui fournir une copie en français mais cela n'est pas possible. Le défendeur informe ensuite la partie adverse qu'il a reçu les documents en arabe.
[10] Dans les trois semaines qui suivent, le défendeur est occupé si bien que le demandeur, qui l'appelle à plusieurs reprises et qui lui envoie des courriels, n'arrive pas à le joindre pour connaître l’état de son dossier. Les parties se parlent le 17 septembre mais peu après, le demandeur se présente au bureau du défendeur pour reprendre possession de son dossier. Une plainte contre le défendeur est déposée au syndic du Barreau du Québec et une mise en demeure lui est envoyée le 1 er octobre 2013.
[11] Le demandeur reproche ce qui suit au défendeur :
- Il ne l'a pas informé que la Déclaration commune n'était pas déposée au dossier de la Cour le 26 juin 2013;
- Il ne l'a pas informé que la requête qui devait être présentée le 26 juin 2013 avait été reportée au 12 juillet 2013;
- Il ne l'a pas informé de la remise sine die de sa requête le 12 juillet 2013.
[12] En outre, le demandeur plaide que les délais encourus par le défendeur pour recevoir et transmettre les engagements pris lors de son interrogatoire et la remise sine die de sa requête le 12 juillet 2013, ont entraîné des dommages qu’il évalue à 6 500 $ et qui se résument ainsi :
- Stress lié à l'attente d'un dénouement;
- Complément d'expertise psychosociale qui a été ordonnée par une juge de la Cour supérieure en juin 2014 avec une garde partagée égale à compter de cette date;
- Des frais d'experts additionnels.
[13] Le défendeur plaide pour sa part que les procédures se sont somme toute déroulées normalement et que les délais évoqués par le demandeur n'ont pas causé les dommages réclamés.
ANALYSE
[14] La responsabilité professionnelle de l'avocat envers son client est fondée sur une obligation de moyens et non de résultat. En d’autres termes, l’avocat doit agir de façon consciencieuse et rendre des services conformes aux règles de l’art. [1]
[15] La preuve offerte par le demandeur permet au Tribunal de conclure ce qui suit :
- Il a initié devant la Cour supérieure une requête pour garde partagée égale de ses enfants en avril 2011;
- Il a mandaté le défendeur en mai 2013 pour agir en son nom dans le cadre de cette même requête;
- Cette requête a été remise à deux reprises avant d'être remise sine die en juillet 2013 et ce, en raison du fait que les engagements pris par le demandeur n’étaient pas remplis;
- Le défendeur a obtenu les engagements du demandeur à la fin du mois d'août 2013;
- Les engagements ont ensuite été transmis à la partie adverse.
[16] Il appert de la chronologie évoquée ci-dessus que le demandeur, qui avait le fardeau de démontrer l'inexécution des obligations qu'avait le défendeur à son égard, a négligé de faire cette démonstration.
[17] Même si le défendeur a laissé courir un délai de quelques semaines à la suite de la réception des engagements pris par le demandeur, ce délai n’est pas causal des dommages réclamés par le demandeur. En effet, ces dommages sont plutôt les irritants et frustrations intrinsèquement liés aux procédures pour obtenir la garde partagée égale des enfants du demandeur qu’il a intentées en 2011.
[18] Le Tribunal ne voit, dans la conduite du défendeur, aucun motif pouvant entraîner sa responsabilité professionnelle.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:
REJETTE la réclamation de Chokri Essaied contre Pierre-Paul Boucher;
LE TOUT, avec les frais (156$).
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__________________________________ JULIE VEILLEUX, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
Le 21 septembre 2015 |
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BAUDOUIN, Jean-Louis et Patrice Deslauriers.