S.G. c. Beaudoin

2015 QCCQ 13238

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

LAVAL

LOCALITÉ DE

LAVAL

« Chambre civile »

N° :

540-32-026957-140

 

 

 

DATE :

16 décembre 2015

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

JULIE MESSIER, J.C.Q.

 

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S... G...

Partie demanderesse

c.

JOHANNE BEAUDOIN

-et-

VILLE DE LAVAL

Partie défenderesse

 

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JUGEMENT

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[1]            S... G... (G...) réclame 7 000 $ à l’intervenante sociale Johanne Beaudoin (Beaudoin) et à Ville de Laval.

[2]            G... reproche aux défendeurs d’avoir posé des actions légales pour l’obliger à subir un examen psychiatrique à la Cité de la Santé, et ce, sans au préalable avoir obtenu une expertise médicale ou d’avoir constaté en personne son état.

[3]            Il réclame 7 000 $ pour les préjudices subis, soit d’avoir passé une journée à la Cité de la Santé.

[4]            Les défendeurs nient avoir commis quelque faute que ce soit, soulèvent l’absence de preuve de préjudice. Subsidiairement, il indique que s’il y a preuve de faute extracontractuelle, il y a prescription, la demande ayant été prise 3 ans moins 1 jour des faits, soit bien après le délai de 6 mois prévu à l’article  586 de la Loi sur les cités et villes .

LES FAITS

[5]            Johanne Beaudoin est intervenante sociale, c’est en 2010 qu’elle rencontre G... pour la première fois. G... est aux prises avec des problèmes de santé et des problèmes financiers. Beaudoin est aussi en contact avec la mère de G....

[6]            En 2011, la mère de G... inquiète que son fils ait des pensées suicidaires appelle Beaudoin qui l’aide à préparer une Requête pour évaluation psychiatrique.

[7]            Le 17 mars 2011, une audience a lieu en cour municipale et, après avoir entendu la preuve, le juge donne droit à la Requête et ordonne à G... de se soumettre à un examen psychiatrique.

[8]            Le 18 mars 2011, des policiers se présentent chez G..., Beaudoin les accompagne. G... sera examiné à l’Hôpital Cité de la Santé et ne sera pas gardé.

[9]            Le 1 er  mars 2014, soit presque trois ans après les événements G... transmet une mise en demeure aux défendeurs. Dans ce document, il leur reproche de l’avoir diffamé , et ce, en émettant des prétentions médicales et diagnostiqués devant la cour municipale, alors qu’ils ne sont pas médecins.

[10]         Lors de l’ouverture du dossier le 17 mars 2014, G... a initialement inscrit le mot diffamation qu’il a enlevé pour « fait des actions ».

[11]         Dans ses moyens de défense, Ville de Laval indique que G... tente d’obtenir une compensation pour diffamation auprès de la cour des petites créances, alors que la diffamation ne relève pas de sa juridiction.

[12]         À l’audience, G... a ajouté des motifs de demande jamais jusque-là mentionnés. Il invoque que Beaudoin ne l’a pas laissé mangé avant de quitter la maison, et ne lui a pas laissé apporter ses médicaments ce qui a engendré un débalancement de sa glycémie, lui qui est affecté de diabète.

[13]         Ce débalancement ne se serait rétabli qu’après plusieurs semaines. G... témoigne être affecté du diabète, de fibromyalgie, d’apnée et d’hypertension. G... ne dépose aucun dossier médical quant à sa condition physique au moment des faits.

[14]         Ville de Laval conteste l’ajout de ces motifs de demande qui la prenne par surprise et soulève l’absence de preuve quant à l’existence de ces maladies au moment des faits, et quant aux symptômes décrits par G....

[15]         Beaudoin reconnaît que G... n’a pas déjeuné avant de quitter la maison, car le protocole est à l’effet que la personne sujette à l’ordonnance soit amenée sans délai afin d’éviter tout risque de décompensation. Quant au médicament, elle ne se souvient pas qu’il y ait eu quelque conversation que ce soit à ce sujet.

[16]         Arrivés à l’hôpital, après la prise en charge par cette dernière, Beaudoin et les policiers ont quitté. G... reproche à Beaudoin de ne pas s’être assurée qu’il soit nourri avant qu’elle quitte. Il dit que l’hôpital ne lui a rien donné à manger et qu’il ne se sentait pas bien lorsqu’il a quitté les lieux vers 16 h.

[17]         Beaudoin mentionne qu’à cette heure G... l’a appelée pour avoir un transport de retour et qu’en aucun temps lors de la conversation, il ne s’est plaint d’être mal en raison d’un manque de nourriture.

ANALYSE ET DÉCISION

[18]         La réclamation du demandeur est refusée pour les motifs suivants.

[19]         Premièrement, il appert de la mise en demeure et de la rédaction corrigée de la demande écrite qu’il s’agit d’une réclamation en diffamation pour avoir diffusé de l’information fausse et non vérifiée auprès de la cour municipale.

[20]         En vertu de l’article 954 du Code de procédure civile la cour des petites créances n’a pas juridiction pour entendre des poursuites en diffamation. Mais, même si le Tribunal avait retenu que la poursuite ne correspondait pas à une réclamation en diffamation, mais à une réclamation en responsabilité extracontractuelle G... n’aurait pas eu gain de cause.

[21]         En effet dans ses écrits, il reproche à Beaudoin et Ville de Laval d’avoir commis une faute en présentant à la cour municipale des « prétentions et diagnostics, sans communiquer avec moi. »

[22]         Or, la preuve est à l’effet que ce n’est ni Beaudoin, ni Ville de Laval qui a présenté la Requête pour évaluation psychiatrique, mais la mère de G... qui, d’ailleurs selon le témoignage de G..., aurait ferait l’objet d’une réclamation à ce sujet de la part de ce dernier. N’étant pas les auteurs de la Requête leur responsabilité à ce sujet ne peut être retenue.

[23]         Finalement, quant aux nouvelles allégations de fautes présentées le matin de l’audience elles ne peuvent être admises considérant la tardivité et le fait qu’elles prennent par surprise la partie défenderesse.

[24]         Le Tribunal a tout de même permis à G... d’exposer l’ensemble de sa réclamation à ce sujet, et il appert qu’elle n’est pas supportée d’aucune preuve. Il n’y a aucune preuve prépondérante qu’il fut empêché de prendre sa médication.

[25]         Ensuite un des actes reprochés, soit le refus que G... prenne le temps de déjeuner est justifié dans les circonstances où les policiers font une intervention en respect d’une ordonnance leur enjoignant  d’escorter G... à un centre hospitalier pour y subir un examen. Cette mesure est raisonnable considérant le danger potentiel que présente une personne sous ordonnance d’évaluation psychiatrique.

[26]         La Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui prévoit à l’article 8 que l’établissement médical prend en charge la personne dès son arrivée.

[27]         Le Tribunal ne retient pas le témoignage de G... qui dit s’être vu refuser soins et aide par l’établissement de santé au motif qu’il n’a jamais été admis .

[28]         Il est de connaissance judiciaire que dès l’arrivée de la personne avec les policiers, elle est prise en charge, tel que prévu à l’article 8. Si tel que le prétend G... son taux de glycémie aurait dangereusement fluctué, de l’aide médicale lui aurait été procurée.

[29]         Le fait qu’il n’a jamais parlé au préalable avant le jour de l’audition de ce problème, le fait qu’il n’a déposé aucune preuve médicale documentant son état de santé en 2011 et les maladies l’affectant, et finalement la description non crédible du traitement reçu font en sorte que le Tribunal n’aurait de toute façon pas retenu la réclamation.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL  :

REJETTE la demande avec frais.

 

 

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JULIE MESSIER, J.C.Q.

 

 

 

 

 

 

 

Date d’audience :

Le 24 novembre 2015