RÉGIE DES ALCOOLS, DES COURSES ET DES JEUX

 

 

 

NUMÉRO DU DOSSIER

:

40-1512904-002

[ACCES]

 

DATES DE L’AUDIENCE

:

2015-06-16;

2015-09-15 à Montréal

 

RÉGISSEURE

:

M e Louise Marchand

TITULAIRE

:

Restaurant La Référence inc.

 

RESPONSABLE

:

M. Metiemo Elonga

 

NOM DE L’ÉTABLISSEMENT

:

Restaurant La Référence                                    

 

ADRESSE

:

808, rue Beaubien Est

Montréal (Québec)  H2S 1S9

 

PERMIS EN VIGUEUR

:

Restaurant pour vendre avec autorisation de danse et spectacles sans nudité

1 er étage (85 personnes)

N o 9817271

 

NATURE DE LA DÉCISION

:

Contrôle de l’exploitation

DATE DE LA DÉCISION

:

2015-12-22

 

NUMÉRO DE LA DÉCISION

:

40-0007133

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DÉCISION

 

[1]                Le 4 août 2015, par avis de report, la Régie des alcools, des courses et des jeux (la Régie) a convoqué la titulaire en audience en vue de procéder à une enquête et déterminer si elle avait commis quelque manquement à ses obligations légales en rapport avec les événements mentionnés à l’avis et, le cas échéant, aux fins de sanctionner tel manquement.

 

LES FAITS

[2]                Les faits qui ont donné ouverture à la convocation se résument comme suit :

[Transcription conforme]

Tolérer des boissons alcooliques acquises non conformément au permis

 

Le 12 avril 2012, les policiers ont saisi, dans votre établissement, le(s) contenant(s) de boisson(s) alcoolique(s) suivant(s) (Document 1)

 

- 25 bouteille(s) de bière de 330 millilitre(s) de marque Heineken, 5% alc./vol.

 

- 1 bouteille(s) de bière de 330 millilitre(s) de marque Duvel, 8,5% alc./vol.

 

Ce(s) contenant(s) n'était(ent) pas marqué(s) (mention CSP ou timbre)

 

Ce(s) contenant(s) a (ont) été trouvé(s) dans la cuisine.

 

Total en litres du (des) contenant(s)  : 8,58 litre(s)

 

Le 9 janvier 2014, les policiers ont saisi, dans votre établissement, le(s) contenant(s) de boisson(s) alcoolique(s) suivant(s) (Document 2)

 

- 20 bouteille(s) de bière de 330 millilitre(s) de marque Heineken, 5% alc./vol.

 

- 5 bouteille(s) de bière de 341 millilitre(s) de marque Budweiser, 5% alc./vol.

 

Ce(s) contenant(s) n'était(ent) pas marqué(s) (mention CSP ou timbre)

 

Ce(s) contenant(s) a (ont) été trouvé(s) dans la pièce barré.

 

Total en litres du (des) contenant(s)  : 8,31 litre(s)

 

Il est à noter que les policiers ont également trouvé 4 bières de marque Heineken et 1 bière de marque Budweiser vide mais encore froides.

 

 

 

Changement d’actionnariat non déclaré

 

Selon nos dossiers, les actionnaires de la compagnie titulaire, Restaurant La Référence inc., sont MM. Matiemo Elonga et Nkato Magloire Elonga.

 

Or, un relevé CIDREQ du Registraire des entreprises, indique un actionnariat différent, soit le retrait de MM. Matiemo Elonga en tant qu’actionnaire. Monsieur Matiemo Elonga étant désormais administrateur depuis au moins le 15 mars 2012. (Document 3)

 

 

 

*****

 

AUTRES INFORMATIONS PERTINENTES :

 

Restaurant La Référence inc. est autorisé(e) à exploiter cet établissement depuis le 16 décembre 2011.

 

Le 9 mai 2012, la Régie a fait parvenir un «Avis au titulaire» à Restaurant La Référence inc., pour ne pas avoir été muni d’un dispositif empêchant l’accès aux boissons alcooliques ainsi que pour avoir toléré la vente, le service ou la consommation de boissons alcooliques en dehors des heures permises.

 

Le 31 mars 2015, la Régie a fait parvenir un «Avis au titulaire» à Restaurant La Référence inc. pour avoir toléré une boissons alcoolique dans laquelle une autre substance avait été ajoutée.

 

La date d'anniversaire du(des) permis est le 16 décembre.

 

 

L’AUDIENCE

[3]                Une audience devait se tenir le 16 juin 2015, mais comme la titulaire n’était pas présence, son représentant étant à l’extérieur du pays selon un des préposés de l’établissement joint par téléphone, cette audience fut reportée au 15 septembre suivant, au Palais de justice de Montréal.

[4]                Lors de l’ouverture de l’audience du 15 septembre 2015, la titulaire Restaurant  La Référence inc. n’est toujours pas présente.

[5]                La Direction du contentieux de la Régie (le Contentieux) a délégué M e François Laurendeau.

[6]                La soussignée joint l’établissement par téléphone, directement de la salle d’audience et en présence du procureur du Contentieux, et parle au responsable qui s’identifie comme étant M. Tiya, et qui prétend ne pas avoir reçu notification de la convocation.

[7]                Il demande qu’on le rappelle pour lui laisser le temps de trouver un numéro de téléphone pour joindre M. Metiemo Elonga, représentant de la titulaire.

[8]                Lorsque la soussignée rappelle au même numéro, il n’y a aucune réponse et il est impossible de laisser un message.

 

Représentations du procureur du Contentieux

[9]                M e Laurendeau soutient que, compte tenu de l’absence de la titulaire et après une première remise, le tribunal doit procéder par défaut, tel que le lui permet l’article 20 des Règles de procédure de la Régie des alcools, des courses et des jeux [1] , qui édicte :

20.   Si, à la date fixée pour l'audience, une personne intéressée est absente, la Régie peut procéder sans autre avis ni délai ou ajourner l'audience à une date ultérieure.

 

[10]            Le procureur ajoute que l’avis de convocation a été dûment livré, par Purolato r, le 10 août 2015 et reçu par M. Magloire, dont la signature apparaît au récépissé.

[11]            La titulaire ayant donc été dûment informée de la tenue de l’audience, par l’avis de convocation et par la soussignée, au téléphone, le tribunal décide de procéder par défaut.

 

Preuve du Contentieux

[12]            Le procureur relate que, tel que décrit au Rapport d’infraction général (Document 1), les policiers ont saisi, le 12 avril 2012, dans la cuisine de l’établissement de la titulaire, 25 bouteilles de bière de marque Heineken et 1 bouteille de bière de marque Duvel, toutes dépourvues de la marque Consommation sur place (CSP).

[13]            Des bouteilles étaient dans le congélateur, dans une chaudière de plastique sous un sac à ordures et une autre dans un bac à glace.

[14]            De plus, le 9 janvier 2014, les policiers ont saisi, dans une glacière rouge placée dans une pièce verrouillée du même établissement, 20 bouteilles de bière de marque Heineken et cinq (5) bouteilles de bière de marque Budweiser, également dépourvues de la marque CSP (Document 2).

[15]            Pour pénétrer dans la pièce verrouillée, les policiers ont dû utiliser un tournevis, le responsable affirmant qu’il n’avait pas de clé.

[16]            Il convient de souligner que les policiers relatent que lors de cette deuxième inspection, ils ont identifié le responsable des lieux, M. Tiya Muaza Mudada, et qu’ils l’ont vu, par la porte de la cuisine, tenter de vider des bouteilles de bière dans le lavabo.

[17]            Les policiers se sont approchés et ils ont constaté que M. Mudada tentait aussi de cacher des bouteilles sous un chaudron de métal.

[18]            Les policiers ont également trouvé quatre (4) bouteilles de marque Heineken et une bouteille de bière de marque Budweiser vides, mais encore froides, non marquées CSP.

[19]             Il appert par ailleurs que, selon les dossiers de la Régie, les actionnaires de la compagnie titulaire Restaurant La Référence inc. sont MM. Matiemo Elonga et Nkato Magloire Elonga.

[20]            Or, un relevé CIDREQ, extrait du Registre des entreprises, en date du 9 septembre 2015, indique un actionnariat différent, soit le retrait de M. Metiemo Elonga en tant qu’actionnaire, ce dernier n’étant maintenant qu’un administrateur de la société, et ce, depuis au moins le 15 mars 2012.

[21]            Le CIDREQ indique également que la fin de la charge d’administrateur de M. Metiemo Elonga était le 20 mai 2015.

[22]            Or, ces changements n’ont jamais été déclarés à la Régie.

 

Plaidoirie du procureur du Contentieux

[23]            La preuve de la présence des bouteilles de bière dépourvues de la marque CSP a été faite par les rapports d’infraction généraux (Documents 1 et 2).

[24]            Cette preuve induit une présomption de tolérance d’alcool qui n’aurait pas été acquis conformément au permis de la titulaire, le tout, en contravention de l’article 72.1 de la Loi sur les permis d’alcool [2] (LPA).

[25]            Le tribunal doit intervenir en vertu de l’article 86, alinéa 2, paragraphe 4 de la même loi et révoquer ou suspendre le permis de la titulaire.

[26]            Le procureur suggère une suspension de trois (3) jours pour la première infraction, compte tenu du fait qu’en outre de ne pas être marquées, les bouteilles étaient cachées.

[27]            Lors de la seconde saisie, effectuée deux ans plus tard dans une pièce attenante de l’établissement, qui répond à la définition de « circonstance et dépendance de l’établissement » précisée à l’article 2, paragraphe 13 ° de la Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques [3] (LIMBA), les policiers ont trouvé 25 bouteilles de bière non marquées CSP.

[28]            De plus, le responsable sur les lieux, M. Tiya Muaza Mudada, a tenté de vider des bouteilles, d’une part, et d’en cacher, d’autre part, en outre d’induire les policiers en erreur, ce qui constitue un facteur aggravant.

[29]            Le procureur suggère donc une suspension de 6 jours, pour notamment tenir compte des éléments aggravants.

[30]            À cela, il suggère d’ajouter une suspension se situant entre 1 et 3 jours, pour l’omission de déclarer le changement d’actionnariat.

 

LE DROIT

[31]            Les dispositions légales qui s'appliquent dans le présent dossier sont les suivantes :

Loi sur les infractions en matière de boissons alcooliques (LIMBA)

82.1         Sous la réserve des droits qui lui sont conférés par la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13), à titre de titulaire de permis de boisson artisanale ou de producteur artisanal de bière, un titulaire de permis ne peut garder, posséder ou vendre dans son établissement : (…)

3°      de la bière qui n'a pas été achetée directement de la Société, d'un titulaire d'un permis de brasseur ou de distributeur de bière délivré en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec, ou d'un agent d'un titulaire de permis de brasseur ou de distributeur de bière; (…)

Loi sur les permis d'alcool

38.           Dans le cas d'une société ou d'une personne morale, la délivrance d'un permis est subordonnée à l'obligation, qu'outre la société ou la personne morale, chacun des associés ou chacun des administrateurs et des actionnaires détenant 10% ou plus des actions comportant plein droit de vote de la personne morale en respecte toutes les conditions sauf, si elle est inscrite à une bourse canadienne, celles prévues à l'article 36.

72.           Une société ou une personne morale visée dans l'article 38, qui est titulaire d'un permis, doit faire connaître à la Régie, au moyen d'un formulaire prescrit par celle-ci, tout renseignement pertinent relatif à un changement parmi les personnes mentionnées dans cet article, dans les dix jours du changement.

72.1.        Un titulaire de permis autorisant la vente ou le service de boissons alcooliques ne doit tolérer dans son établissement que la présence de boissons alcooliques acquises, conformément à son permis, de la Société ou d'un titulaire de permis de brasseur, de production artisanale, de distributeur de bière ou de fabricant de cidre, délivrés en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S - 13), ou d'un agent d'un tel titulaire de permis.

(…)

86.           (…) La Régie peut révoquer ou suspendre un permis si :

                8° le titulaire du permis contrevient à une disposition des articles 70 à 72, 73, 74.1, 75, du deuxième alinéa de l'article 76, des articles 78, 82 ou 84.1 ou refuse ou néglige de se conformer à une demande de la Régie visée à l'article 110;


86.          (…) La Régie doit révoquer ou suspendre un permis si :

(…)

4°      le titulaire du permis a contrevenu à l’article 72.1;

(…)

La Régie, dans la détermination de la sanction administrative pour contravention à l’article 72.1, tient compte notamment des facteurs aggravants suivants :

a)      la quantité de boissons alcooliques ou d’appareils de loterie vidéo;

b)      le fait que les boissons alcooliques sont de mauvaises qualité ou impropres à la consommation;

c)      le fait que les boissons alcooliques sont fabriquées frauduleusement ou falsifiées;

d)      le fait que le titulaire du permis a contrevenu à l’article 72.1 dans les cinq dernières années;

e)      le fait que les boissons alcooliques ne sont pas commercialisées par la Société des alcools du Québec et qu’elles ne sont pas fabriquées, embouteillées ou livrées conformément à un permis délivré en vertu de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13)

ANALYSE

[32]            Comme l’a plaidé le procureur du Contentieux, la preuve de la présence dans l’établissement de la titulaire des bouteilles de bière dépourvues de la marque CSP a été faite par les Rapports d’infraction généraux (Documents 1 et 2).

[33]            Cette preuve induit une présomption qu’il y a eu tolérance d’alcool qui n’aurait pas été acquis conformément au permis de la titulaire, en contravention de l’article 72.1 de la LPA et sous réserve d’une preuve par prépondérance qui renverse cette présomption, une sanction doit être imposée en vertu de l’article 86, alinéa 2, paragraphe 4 de la même loi.

[34]            Le procureur du Contentieux a raison de souligner qu’au-delà de l’infraction elle-même, certains éléments constituent, dans notre cas, des éléments aggravants.

[35]            Ainsi, lors de la première saisie, les bouteilles étaient cachées dans un congélateur, dans un sceau, sous un sac de plastique. Dans le deuxième cas, les policiers ont vu le responsable des lieux tenter de vider une partie des bouteilles dans le lavabo et d’en cacher d’autres sous un chaudron de métal, sans compter qu’il ait tenté d’induire les policiers en erreur.

[36]            Dans cette perspective, le tribunal est d’avis que la suggestion du procureur du Contentieux est raisonnable et qu’il y a lieu de suspendre le permis de la titulaire pour une période de 9 (neuf) jours.

[37]            En ce qui concerne le changement d’actionnariat non déclaré, la suspension sera d’une période d’une journée (1).

[38]            En outre, le tribunal ordonnera à la titulaire de produire les documents régularisant sa situation dans les dix (10) jours de la réception de la présente décision.

[39]            En conséquence, le permis de la titulaire sera suspendu pour une période de dix (10) jours.

 

PAR CES MOTIFS,

la Régie des alcools, des courses et des jeux :

 

SUSPEND                               pour une période de dix (10) jours , le permis de restaurant pour vendre avec autorisation de danse et spectacles sans nudité no 9817271 dont Restaurant La Référence inc. est titulaire, et ce, à compter de la mise sous scellés des boissons alcooliques par un inspecteur de la Régie ou par le corps de police dûment mandaté à cette fin;

ORDONNE                            la mise sous scellés des boissons alcooliques se trouvant sur les lieux par un inspecteur de la Régie ou par le corps de police dûment mandaté à cette fin pour la période de la suspension ci-dessus mentionnée.

ORDONNE                            la production des documents pour mettre à jour la situation de l’actionnariat dans les dix (10) jours suivant la réception de la présente décision.

 

 

 

 

 

                                                          

                                                           LOUISE MARCHAND, avocate                          

                                                           Régisseure                                                                 

                                                          

 

 

 

 



[1] RLRQ, chapire R-6.1, r. 2.

[2] RLRQ, chapitre P-9.1.

[3] RLRQ, chapitre I-8.1