NUMÉRO DE LA DÉCISION                           :       2015 QCCTQ 2886

 

DATE DE LA DÉCISION                                  :       20151126

 

DATE DE L’AUDIENCE                                   :       20151104, à Montréal

 

NUMÉRO DES DEMANDES                           :       305270 et 281527

 

OBJET DES DEMANDES                                 :       Vérification de comportement

                                                                                   Évaluation du comportement du conducteur de véhicules lourds

 

MEMBRE DE LA COMMISSION                    :       Rémy Pichette

 

 

M. Flores & Fils Transport inc.

NIR : R-572773-1

- et -

Miguel A. Flores (conducteur et administrateur)

                       Personnes visées

 

DÉCISION

[1]                La Commission des transports du Québec (la Commission) examine le comportement de M. Flores & Fils Transport inc., (FFT) afin de décider si les déficiences qui lui sont reprochées affectent son droit de mettre en circulation ou d’exploiter un véhicule lourd, conformément aux dispositions légales de la Loi concernant les propriétaires, les exploitants et les conducteurs de véhicules lourds [1] (la Loi ).

[2]                La Commission des transports du Québec (la Commission) examine le comportement de Miguel A. Flores (M. Flores), afin de décider si les déficiences qui lui sont reprochées peuvent affecter son droit de conduire des véhicules lourds, conformément aux dispositions de la Loi.

 

LES FAITS

[3]                Les déficiences reprochées à FFT sont énoncées dans l’avis d’intention et de convocation (l’avis) daté du 13 juillet 2015 que la Direction des Services juridiques et secrétariat de la Commission des transports du Québec (DSJS) ont transmis par messagerie [2] le 30 septembre 2015, conformément au premier alinéa de l’article 37 de la Loi .

[4]                Les déficiences reprochées à M. Flores sont énoncées dans l’Avis daté du 9 juin 2015 et émis par la DSJS, qui lui a été transmis par messagerie le 30 septembre 2015 [3] , conformément à l’article 5 de la Loi sur la justice administrative [4] .

[5]                FFT et M. Flores sont été convoqués en audience publique le 4 novembre 2015. À cette date, son président, principal dirigeant et conducteur M. Flores est présent et non représenté. La DSJS est représentée par M e Marie-Andrée Gagnon Cloutier.  

Le dossier de l’entreprise et le dossier du conducteur

[6]                Étant donné que les infractions au dossier propriétaires et exploitants de véhicules lourds (dossier PEVL) ont été contractées par le président de l’entreprise, l’évaluation du dossier PEVL et l’évaluation du dossier de conduite du conducteur de véhicules lourds (dossier CVL) seront effectuées en commun.

[7]                Les événements pris en considération pour démontrer ces déficiences sont énumérés dans le dossier PEVL de FFT pour la période du 31 mars 2013 au 30 mars 2015.

[8]                Le dossier PEVL est constitué par la Société de l’assurance automobile du Québec (la SAAQ), sur tout propriétaire et exploitant de véhicules lourds, selon sa politique administrative d’évaluation des propriétaires et des exploitants de véhicules lourds (la politique), conformément aux articles 22 à 25 de la Loi .

[9]                La Commission est saisie du dossier PEVL [5] de FFT, car l’entreprise a atteint le seuil applicable dans la zone de comportement «  Sécurité des opérations  » en accumulant treize (13) points pour la période de deux ans se terminant le 30 mars 2015.

[10]            Les événements inscrits pour la zone de comportement sont les suivants :

« Sécurité des opérations »

Section 8  

Date de l’infraction

N o plaque

Description détaillée/

NI transporteur

Référence légale

Province

Nombre de points

2013-04-24

L566635

Feu jaune

CSR 361

QC

3

2013-10-31

L566635

Signalement inadéquat

CSR 372

QC

2

2013-10-31

L566635

Virage dangereux

CSR 351

QC

2

2014-03-04

L566635

Signalisation non respectée

CSR 310

QC

2

2014-11-13

L566635

Signalement inadéquat

CSR 372

QC

2

2015-03-12

L566635

Signalement inadéquat

CSR 372

QC

2

Nombre total de points

13

[11]            L’avocate de la DSJS verse au dossier une mise à jour [6] du dossier PEVL de FFT datée du 19 octobre 2015 et couvrant la période du 20 octobre 2013 au 19 octobre 2015. Elle fait entendre madame Julie Fournier , technicienne en administration à la SAAQ, q ui en présente les points saillants et indique les ajouts depuis le dossier PEVL pour la période se terminant le 19 octobre 2015.

[12]            Cette mise à jour du dossier PEVL indique le retrait d’une infraction concernant un feu jaune en raison du déplacement de la période mobile d’évaluation de deux ans.

[13]            Aucun ajout n’est constaté par la Commission.

[14]            Ce retrait diminue le nombre de points accumulé dans la zone de comportement «  Sécurité des opérations  » à dix (10) alors que le seuil à ne pas atteindre est de treize (13) points.

[15]            L’avocate de la DSJS dépose le suivi du comportement du conducteur [7] (CVL) daté du 12 décembre 2014 et une mise à jour [8] du CVL datée du 21 octobre 2015.

[16]            L’avocate de la DSJS verse également le rapport [9] d’intervention auprès d’un conducteur de véhicule lourd du 31 mars 2015 , préparé par Jean Michaud , inspecteur à la Direction des services à la clientèle et de l’inspection (DSCI) .

Témoignage du dirigeant et conducteur de l’entreprise

[17]            La Commission entend le témoignage de M. Flores, administrateur et conducteur de l’entreprise.

[18]            M. Flores est le seul conducteur de l’entreprise et possède un permis de conduire de classe 3 et conduit un véhicule lourd depuis 1995.

[19]            Il travaille à titre de sous-traitant d’ Airport Courier & Cargo Specialists Inc. (A.C.C.S.) qui lui prépare la documentation, incluant les connaissements, et lui fournit des clients. M. Flores déclare être payé à pourcentage du chiffre d’affaires. 

[20]            M. Flores conduit un véhicule de marque International 1999 d’une longueur de 24 pieds.

Les explications de FFT quant aux événements

·            Le 24 avril 2013, feu jaune : À l’intersection de la rue Papineau et de l’avenue du Mont-Royal. M. Flores tournait à droite. Celui-ci déclare qu’il a dû attendre que les piétons traversent l’intersection pendant que le feu de circulation était au vert et lorsqu’il a effectué le virage, le feu de circulation est passé au jaune. M. Flores déclare qu’un policier lui a dit de ne pas franchir l’intersection.

·            Le 31 octobre 2013, signalement inadéquat et virage dangereux : M. Flores explique que son véhicule lourd était immobilisé derrière des automobiles tandis que le feu était rouge. M. Flores affirme qu’il n’avait pas d’espace pour se ranger complètement dans la voie de droite en raison de travaux routiers et qu’il avait l’intention d’actionner ses feux clignotants pour indiquer son intention de tourner à droite, lorsqu’il se serait rapproché de l’intersection.  Un policier circulant en voiture dans la voie de droite l’a interceptée après son virage afin de lui remettre deux constats d’infraction, l’un pour signalement inadéquat et l’autre pour virage dangereux.   Un troisième constat concernant une plaque d’immatriculation non lisible lui a aussi été remis à la même occasion. M. Flores déclare qu’il n’a pas contesté les infractions, car il ne voulait pas perdre une journée de travail.

·            Le 4 mars 2014, signalisation non respectée : M. Flores déclare qu’il avait les papiers requis pour effectuer une cueillette de marchandises dans une zone où les camions sont interdits de circuler.  Aucune preuve documentaire à cet effet n’est produite à l’audience.  Il n’a pas contesté le constat d’infraction.

·            Le 13 novembre 2014, signalement inadéquat : M. Flores admet avoir circulé dans une zone où les camions sont interdits.

·            Le 13 février 2015, signalement inadéquat : M. Flores déclare qu’il ne se souvient plus de l’événement.

[21]            M. Flores déclare qu’il est plus prudent sur la route, car il ne veut pas perdre son travail.

 

LE DROIT

[22]            Les articles 26 à 30 de la Loi habilitent la Commission à attribuer une cote de sécurité de niveau «  insatisfaisant  », lorsqu’elle évalue notamment qu’une personne met en péril ou en danger de façon répétée la sécurité des usagers des chemins ouverts à la circulation publique ou compromet l'intégrité de ces chemins par des déficiences qui, à son avis, ne peuvent être corrigées par l’imposition de conditions.

[23]            Elle peut également attribuer une cote de sécurité de niveau «  conditionnel  », lorsqu’elle évalue qu’il peut être remédié par des mesures aux déficiences constatées.

[24]            D ans certains cas particuliers, elle peut aussi suspendre le droit d’une personne d'exploiter des véhicules lourds ou de les faire circuler.

[25]            Quant à l’article 28 de la Loi ,  il permet à la Commission de prendre toute mesure appropriée et raisonnable lorsqu’elle attribue ou maintient une cote de sécurité de niveau «  conditionnel  ».

[26]            La Commission peut imposer des conditions afin de corriger une déficience. Ces conditions peuvent viser les véhicules lourds, la qualification des associés, des administrateurs, des dirigeants et des employés ou la gestion et l'exploitation de l'entreprise ou de toute entreprise acquise.

[27]            Suivant les articles 26, 32.1 et 42 de la Loi , la Commission peut faire enquête pour déterminer si les pratiques d’un conducteur de véhicules lourds mettent en danger la sécurité des usagers sur les chemins ouverts à la circulation publique ou compromettent l’intégrité de ces chemins. Les événements pris en considération pour démontrer les déficiences d’un tel conducteur sont établis à partir des données obtenues du dossier de conduite que constitue la SAAQ sur tout conducteur de véhicules lourds.

[28]            Le premier alinéa de l’article 31 de la Loi habilite la Commission à imposer à un conducteur de véhicules lourds des conditions afin de corriger un comportement déficient et à prendre toute autre mesure qu’elle juge appropriée et raisonnable.

[29]            Le deuxième alinéa de l’article 31 de la Loi permet à la Commission d’ordonner à la SAAQ d’interdire la conduite d’un véhicule lourd à un conducteur qu’elle juge inapte à conduire en raison d’un comportement déficient qui ne peut être corrigé par l’imposition de conditions. Une personne ainsi interdite ne peut plus conduire un véhicule lourd tant que la Commission n’a pas levé son interdiction.

 

L’ANALYSE

[30]            Il appartient à la Commission d’analyser la preuve soumise, de décider des mesures nécessaires et, le cas échéant, de les appliquer. Les dossiers de la SAAQ et les rapports de l’inspecteur établissent les faits.

[31]            Toutefois, le rôle de la Commission ne se limite pas à constater des déficiences. La Commission doit apprécier un comportement ainsi que, le cas échéant, les mesures mises en place pour remédier aux déficiences.

[32]            La preuve aux dossiers PEVL et CVL démontre que les infractions inscrites au  dossier de comportement de l’entreprise sont principalement dues en raison du comportement de son conducteur et dirigeant. En effet, M. Flores est responsable de l’ensemble des six événements apparaissant au dossier PEVL.

[33]            La Commission constate que l’état du dossier PEVL de FFT s’est amélioré légèrement passant de treize (13) points accumulés à la zone de comportement «  Sécurité des opérations  » à dix (10) points en raison de l’absence de nouvelles infractions constatées depuis mars 2015.

[34]            De l’avis de la Commission, FFT et son principal dirigeant ont pris conscience de l’importance de se conformer à la réglementation et de respecter le Code de la sécurité routière. 

[35]            La Commission est d’avis que FFT assume maintenant de façon acceptable ses obligations en regard au respect de la Loi et, en conséquence, il n’y a pas lieu de modifier sa cote de sécurité routière.

[36]            La Commission considère que le dossier de conduite de M. Flores ne présente pas un risque pour la sécurité des usagers de la route.

[37]            La Commission considère que M. Flores a pris les mesures requises afin de corriger son comportement sur la route.

[38]            Il apparaît clairement à la Commission que nous avons affaire à une prise de conscience de la part de M. Flores et que le maintien ou non de son privilège de conduire un véhicule lourd ne dépend que de lui. Il ne s’agit pas ici d’une déficience pouvant être corrigée par une formation, mais d’une modification de comportement que seul M. Flores peut maintenir.

 

LA CONCLUSION

[39]            La Commission en vient à la conclusion que la cote de sécurité de Transport FFT inc. ne sera pas modifiée et va rejeter la demande.

[40]            La Commission est d’avis que M. Flores ne représente pas un danger pour la sécurité routière et pour les usagers du réseau public et qu’il n’y pas lieu de lui imposer de mesures ou de sanctions.

 

PAR CES MOTIFS,        la Commission des transports du Québec :

REJETTE                        les demandes ;

MAINTIENT                   la cote de sécurité de M. Flores & Fils Transport inc., portant la mention «  satisfaisant  ».

 

 

 

 

                                                                            Rémy Pichette, MBA

                                                                            Membre de la Commission

 

 

 

c. c .   M e Marie-Andrée Gagnon Cloutier, avocate de la Direction des Services juridiques et secrétariat de    la Commission des transports du Québec.

         



[1] L.R.Q. c. P-30.3.

[2] Récépissé de Postes Canada PG339619504CA

[3] Récépissé de Postes Canada PG339619495CA

[4] L.R.Q., c. J-3.

[5] Pièce CTQ-1

[6] Pièce CTQ-2

[7] Pièce CTQ-3

[8] Pièce CTQ-4

[9] Pièce CTQ-5