Fontaine c. Pierre

2015 QCCQ 14170

   JG2338

 
 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

BEAUHARNOIS

LOCALITÉ DE VAUDREUIL-DORION

« Chambre civile »

N° :

760-32-016648-158

 

 

 

DATE :

Le 6 octobre 2015

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE 

L’HONORABLE

 CÉLINE GERVAIS, J.C.Q.

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IAN FONTAINE et SOPHIE VÉZINA

demandeurs

 

c.

 

MARTIN PIERRE et VIVIENNE ZHAO

défendeurs

 

 

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JUGEMENT

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[1]            Il s'agit d'une réclamation de 7165,86 $, représentant la valeur des dommages subis à la suite de la découverte de vices cachés dans l'immeuble acheté.

LES FAITS :

[2]            Le 26 mai 2014, Ian Fontaine et Sophie Vézina achètent la maison de Martin Pierre et Vivienne Zhao située sur la rue des Colibris à L'Île-Perrot pour la somme de 380 000 $.  Monsieur Fontaine et Mme Vézina font inspecter la maison avant l'achat, même s'il s'agit d'une maison construite quatre ans auparavant.

[3]            Dès leur arrivée, M. Fontaine et Mme Vézina constatent plusieurs problèmes.  À l'ouverture de la piscine, ils réalisent que celle-ci coule et que la pompe est rouillée.  Le cadre d'une fenêtre du sous-sol est brisé.  Le système d'air climatisé a une fuite et cause un dégât d'eau.

[4]            Monsieur Fontaine et Mme Vézina communiquent d'abord verbalement avec M. Pierre et Mme Zhao, et leur transmettent ensuite une mise en demeure en date du 2 juillet 2015.  Après l'institution de l'action, ils réalisent que les marches de ciment de l'escalier avant perdent leur crépi et sont endommagées.  Ayant contacté Qualité-Habitation, puisque la maison était encore sous garantie, ils obtiennent de celle-ci un rapport d'inspection qui avait déjà été effectué relativement à ce problème, qui avait été examiné le 29 novembre 2012.

[5]            Monsieur Fontaine et Mme Vézina réalisent aussi après leur arrivée que la maison n'est pas équipée d'une thermopompe, contrairement à ce qui était indiqué dans la fiche descriptive de l'immeuble, mais plutôt d'un climatiseur.

[6]            La réclamation de M. Fontaine et de Mme Vézina s'établit ainsi :

-        Coût de réparation des marches de ciment de l'escalier avant :

1967,80 $

-        Coût de réparation de la piscine :

1954,56 $

-        Différence de coût entre une thermopompe et un climatiseur :

1495,00 $

-        Troubles, ennuis et inconvénients :

1000,00 $

-        Réparation du climatiseur :

  360,30 $

-        Réparation du cadre de la fenêtre du sous-sol :

  300,00 $

-        Frais de Poste Canada pour envois par courrier recommandé :

    88,64 $

 

[7]            Dans leur contestation, M. Pierre et Mme Zhao indiquent que la piscine fonctionnait bien à leur départ, et qu'ils n'avaient pas de problème avec la pompe de la piscine, qui était seulement un peu rouillée, ce qui est normal selon eux.

[8]            Ils admettent que le cadrage de la fenêtre était craqué.  Ils admettent également l'erreur quant à la description du système d'air climatisé, qui n'est pas une thermopompe tel qu'indiqué.  Ils ajoutent que le système d'air climatisé fonctionnait bien à leur départ.

[9]            S'ils admettent l'erreur dans la description du système de climatisation, ils contestent le montant de la réclamation à ce sujet.  Quant aux marches, ils ajoutent qu'il s'agit d'une situation qui était visible et qui ne constitue pas un vice caché.

ANALYSE ET DÉCISION :

[10]         Pour conclure à l'existence d'un vice caché, on doit retrouver la présence des quatre éléments suivants :

-        Le vice doit être grave, c'est-à-dire qu'il doit causer des inconvénients sérieux à l'usage du bien de sorte que l'acheteur n'aurait pas payé le prix convenu s'il l'avait connu;

-        Le vice doit être inconnu de l'acheteur au moment de la vente;

-        Le vice doit être caché, c'est-à-dire qu'il ne peut être constaté par un acheteur prudent et diligent sans devoir recourir à un expert;

-        Le vice doit être antérieur à la vente, puisque la garantie porte sur l'état du bien au moment de la vente.

 

Les marches de l'escalier avant :

[11]         Le rapport de Qualité-Habitation, produit comme pièce P-25, démontre que le 29 novembre 2012, Mme Zhao et M. Pierre ont demandé l'intervention du constructeur pour réparer trois fissures dans la fondation, ce qui a été fait selon les règles de l'art.  Au moment de l'inspection, Mme Zhao et M. Pierre indiquaient que "le béton s'écaille et le crépi des contre-marches tombe."   Ceux-ci auraient reconnu avoir mis du sel d'hiver à deux reprises dans les marches, et l'entrepreneur prétendait que les dégâts étaient dus à l'application du sel en question.  Qualité-Habitation a conclu que malgré le fait que des sections de béton avaient « explosées », il s'agissait d'un dommage qui était exclu de la garantie, vu l'application de sel sur le béton.

[12]         Dans son témoignage, M. Fontaine indique que les marches s'effritaient après le premier hiver et continuent de s'effriter.

[13]         On peut croire que l'état des marches s'est détérioré après que M. Fontaine et Mme Vézina ont pris possession de la maison, puisque la réclamation pour les marches a été ajoutée par un amendement à la demande effectuée le 8 juillet 2015.

[14]         La production du rapport de Qualité-Habitation démontre cependant que le problème était antérieur à la vente, puisqu'il avait déjà été signalé par M. Pierre et Mme Zhao deux ans auparavant.

[15]         Il est cependant difficile de qualifier l'état des marches comme un vice caché, même si M. Fontaine & Mme Vézina disent ne pas l'avoir remarqué à cause de la neige.  On ne peut que conclure que la situation était visible, puisqu'elle a été dénoncée à Qualité-Habitation et affecte une composante extérieure apparente de la résidence.

La piscine :

[16]         Monsieur Fontaine et Mme Vézina ont déposé en preuve une clé USB contenant un vidéo démontrant la fuite d'eau importante qui provenait de l'écumoire de la piscine, ainsi que les accumulations d'eau qui se sont formées à l'extérieur de leur terrain.  Ce vidéo était éloquent.

[17]         Par ailleurs, M. Pierre a indiqué qu'il savait que la piscine perdait de l'eau, mais il ne semble pas avoir considéré qu'il s'agissait là d'un problème majeur.  Il dit qu'il devait réajuster le niveau de la piscine deux ou trois fois par été.  Il indique qu'en général, l'ouverture était faite par une entreprise spécialisée, mais que la fermeture de la piscine était faite par des gens qu'il connaissait.  Il dit qu'il était néanmoins possible d'utiliser la piscine.

[18]         Monsieur Fontaine et Mme Vézina pouvaient certes utiliser la piscine, mais l'ampleur de la perte d'eau était telle qu'on peut soupçonner que d'autres problèmes en auraient découlé s'ils n'avaient pas réagi rapidement pour procéder aux réparations.

[19]         Cette situation constitue un vice caché qui, de surcroît, était à la connaissance des vendeurs, même s'ils n'en soupçonnaient pas la gravité.

[20]         Monsieur Fontaine et Mme Vézina peuvent obtenir compensation pour la valeur des réparations à la piscine, soit 1954,56 $ .

Différence de coût entre une thermopompe et un climatiseur :

[21]         Monsieur Fontaine et Mme Vézina ont demandé à l'entreprise Chauffage Air-Expert d'établir la différence de coût d'achat entre une thermopompe et un climatiseur et réclament cette différence, Mme Vézina ayant indiqué qu'elle aurait négocié le prix de la maison à la baisse si elle avait su que la maison était munie d'un climatiseur et non d'une thermopompe.

[22]         Le Tribunal a demandé à M. Fontaine et Mme Vézina, au cours de l'audition, de lui transmettre copie de l'offre d'achat, ainsi que du rapport d'inspection.  On constate en lisant la page 28 du rapport en question que l'inspecteur identifie clairement que le système en place est un climatiseur.  L'inspection a eu lieu le 29 mars 2014.  La promesse d'achat était conditionnelle à l'inspection de l'immeuble, et la connaissance par l'inspecteur, qui a transmis un rapport écrit à M. Fontaine et Mme Vézina fait en sorte que ceux-ci ne peuvent aujourd'hui prétendre qu'ils ignoraient l'absence de thermopompe, l'information étant disponible.

[23]         Cette partie de leur réclamation ne peut être accueillie.  Vu cette conclusion, il n'y a pas lieu de déroger à la règle habituelle voulant qu'il n'y a pas d'attribution de frais d'experts en division des petites créances.

Coût de réparation du climatiseur :

[24]         Le Tribunal a entendu le témoignage du représentant de Chauffage Air-Expert, qui a expliqué les réparations qu'il avait dû effectuer à l'appareil à la suite du dégât d'eau qui était survenu.  Le Tribunal a même eu le bénéfice d'examiner l'appareil en question, et de constater que le filtre n'avait pas été entretenu adéquatement, et qu'il y avait de la rouille à l'intérieur de l'appareil.

[25]         Cette réclamation de 360,30 $ est recevable.

Fenêtre brisée au sous-sol :

[26]         Le bris du cadrage de la fenêtre ne constitue pas un vice caché, vu l'absence du critère de gravité.  Cette réclamation ne peut être accueillie.

Frais de courrier recommandé :

[27]         Monsieur Fontaine et Mme Vézina peuvent récupérer la somme de 88,64 $, représentant les coûts de transmission de la mise en demeure, celle-ci étant requise par la Loi. 

Troubles, ennuis et inconvénients :

[28]         Il s'agit ici d'un cas où les vendeurs étaient au courant de l'existence de certains problèmes.  Bien que le Tribunal croit qu'ils n'ont pas agi de mauvaise foi ou qu'ils ne soupçonnaient pas nécessairement la gravité des problèmes, il s'agit néanmoins d'un cas où les faits relatifs à la piscine auraient dû être dévoilés aux acheteurs, ce qui donne ouverture à une réclamation en dommages-intérêts au sens de l'article 1728 du Code civil du Québec .

[29]         Dans l'exercice de sa discrétion, le Tribunal évalue ces dommages pour troubles, ennuis et inconvénients à la somme de 300 $ .

 

 

La valeur de la réclamation :

[30]         L'action doit donc être accueillie pour la somme de 2703,50 $.

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE en partie l'action;

CONDAMNE les défendeurs, Martin PIERRE et Vivienne ZHAO, solidairement, à payer aux demandeurs, Ian FONTAINE et Sophie VÉZINA, la somme de 2703,50 $, en plus des intérêts au taux légal et de l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec depuis le 8 septembre 2014, date de réception de la mise en demeure;

LE TOUT avec les frais judiciaires de 171 $.

 

 

 

 

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CÉLINE GERVAIS, J.C.Q.