Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal (SCFP-301) et Montréal-Ouest (Ville de) (Pierre-Alexandre Daoust) |
2015 QCTA 1055 |
TRIBUNAL D’ARBITRAGE
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
No de dépôt : 2016-0669
Date: 18 décembre 2015
SOUS LA PRÉSIDENCE DE : Me Pierre Laplante
ENTRE
Le syndicat des cols bleus regroupés de Montréal
(SCFP-301)
Ci-après appelé le syndicat
ET
Ville de Montréal Ouest
Ci-après appelé l ’employeur
Griefs : 11-0982 et 11-0983
(M. Pierre-Alexandre Daoust)
Pour l’employeur : Me Pascal Rochefort
Dunton Rainville
Pour le syndicat : Mme Camille Dagenais
Conseillère syndicale SCFP
DÉCISION ARBITRALE INTERLOCUTOIRE
(Quantum)
(En vertu du Code du travail du Québec, art. 100 et ss)
PRÉLIMINAIRES
[1] Le 8 septembre 2011, l’employeur a congédié le plaignant.
[2] Le 19 octobre 2011, le syndicat a contesté par voie de grief le congédiement du plaignant.
[3] Le 16 août 2012, j’ai été saisi du grief de congédiement du plaignant.
[4] Le 21 octobre 2014, j’ai rendu une décision [1] annulant le congédiement et ordonnant la réintégration du plaignant. Pour les fins de la présente affaire, les principales conclusions de cette décision arbitrale se lisent comme suit :
ANNULE le congédiement du plaignant;
ORDONNE la réintégration du plaignant dans ses fonctions;
ORDONNE à l’employeur de rembourser au plaignant toutes les sommes d’argent dont il a été privé des suites de son congédiement;
ORDONNE à l’employeur de compenser le plaignant pour tous les bénéfices et avantages dont il a été privé des suites de son congédiement;
CONSERVE COMPETENCE pour décider de toute question relative à l’application de la décision arbitrale dont notamment celle des sommes dues au plaignant.
[5] Les parties ne se sont pas entendues sur les sommes dues au plaignant et le syndicat a demandé que soit décidé du quantum par arbitrage.
[6] D’où la présente affaire.
LES FAITS
[7] Le plaignant, ayant été pendant une longue période de temps sans travail avant son congédiement, n’a pas eu droit à plusieurs semaines de prestations d’assurance-chômage. Deux ou trois, devait dire le plaignant lors de son témoignage sur le quantum.
[8] Père de trois enfants, dont un autiste, et vivant avec une conjointe qui travaillait peu, le plaignant s’est rapidement mis en frais de trouver du travail. « C’était la panique générale, fallait que j’aie de l’argent là-là » , devait-il dire.
[9] Au mois d’octobre 2011, à la suite d’une rencontre fortuite avec son ami Meloche, le plaignant a eu l’idée de démarrer une entreprise de publicité avec ce même ami.
[10] C’est ainsi qu’est née en octobre 2011 l’Agence Bing Bang inc.
[11] Le plaignant s’activa dans cette entreprise au cours des trois années qui suivirent son congédiement.
[12] L’agence Bing Bang inc. obtint notamment des contrats de télé, de radio, d’imprimerie, d’infographie.
[13] Pendant cette même période de temps, le plaignant dit avoir postulé à la suite de plusieurs affichages de postes de cols bleus dont à l’arrondissement de LaSalle et à Ville Mercier.
[14] Il a également tenté d’obtenir un emploi dans des entreprises autres que municipales, comme Bravo Location là où il avait déjà travaillé dans le passé.
[15] En 2011, le plaignant a eu un revenu de 5 399,78 $. Ce revenu provient de deux sources distinctes, à savoir 655,00 $ en prestations d’assurance-chômage et 4 944,78 $ en retraits de son régime d’épargne-retraite.
[16] En 2012, le plaignant a reçu des dividendes de 15 000,00 $ de son agence de publicité.
[17] En 2013, le plaignant a également reçu 15 000,00 $ en dividendes de son agence de publicité.
[18] En 2014, le plaignant a reçu 32 563,96 $. Cette somme provient de trois sources, à savoir : 10 000,00 en dividendes de sa compagnie d’agence de publicité, 20 000,00 $ en salaire et 2 563,96 $ en retraits de son régime d’épargne-retraite.
[19] La réclamation salariale du plaignant s’établit comme suit :
1) 2011 : 14 233,32 $ (540 heures);
2) 2012 : 27 492,24 $ (1 573 heures moins le 15 000,00$ de dividendes);
3) 2013 : 30 534,42 $ (1 645 heures moins le 15 000,00 $ de dividendes).
[20] Il n’y a pas de réclamation salariale pour l’année 2014 puisque le plaignant a compensé totalement sa perte de revenus.
[21] La réclamation salariale totale s’élève donc à 72 259,98 $.
[22] À cette somme, sont également réclamés un montant équivalent à la contribution de l’employeur au régime de retraite du plaignant, des dommages pour aggravation du préjudice et des intérêts légaux.
L’ARGUMENTATION PATRONALE
[23] Les représentants de l’arrondissement de LaSalle et de Ville Mercier n’ont pas trouvé trace des demandes d’emploi du plaignant.
[24] Ce dernier dit avoir postulé à de nombreux endroits et pourtant il n’a pu déposer que quelques demandes d’emploi tout au plus.
[25] Il y a là matière à douter du sérieux de ses recherches d’emplois.
[26] Les quelque 6 demandes d’emploi déposées par le plaignant sont nettement insuffisantes et sa réclamation devrait être réduite pour cette raison.
[27] Le fait que le plaignant ait démarré une compagnie de publicité a nécessité beaucoup de temps et d’énergie, temps et énergie qu’il aurait dû mettre au service d’une recherche d’emploi de cols bleus ou d’un emploi comparable de col bleu.
[28] Conséquemment, sa réclamation devrait également être réduite à ce chapitre.
[29] Enfin, il y a eu des dividendes en 2012 et 2013, il y en a certainement eu en 2014 et ces bénéfices non répartis devraient également être déduits de la réclamation du plaignant.
L’ARGUMENTATION SYNDICALE
[30] Les heures ne sont pas contestées par l’employeur.
[31] Ce jeune père de famille a été proactif dans sa recherche d’emploi.
[32] Il n’avait pas une obligation de résultat, mais bien une obligation de moyen et il a pris tous les moyens à sa disposition pour se trouver un emploi. De toute façon, dans sa situation, il n’avait pas le choix.
[33] Les témoins de l’employeur n’ont rien dit de pertinent dans le cadre de la requête en fixation de quantum.
[34] C’est en l’an 2000 que le plaignant a définitivement cessé de travailler pour son père. Cela n’a aucune pertinence pour le dossier du quantum.
[35] Il n’y a pas de preuve de bénéfices autres que les dividendes produits par le plaignant. Il n’y a pas de preuve de bénéfices autres que les dividendes produits par le plaignant. Il n’y a pas lieu de tenir compte de dividendes non répartis. La preuve reposait sur les épaules de l’employeur et, de toute façon, il ne l’a pas fait si tant est qu’il y ait des bénéfices non répartis.
[36] Cette demande de l’employeur est une autre manœuvre dilatoire pour éviter de compenser équitablement le plaignant.
[37] L’employeur est de mauvaise foi.
[38] Il faut que les sommes dues au plaignant soient déterminées avant la fin de l’année parce qu’il est sans revenu depuis trop longtemps.
LA DÉCISION
[39] La période visée par la requête en fixation de quantum s’échelonne du 8 septembre 2011, date du congédiement, jusqu’à l’automne 2014.
[40] Le plaignant étant le plus ancien auxiliaire, les heures réclamées ne sont pas contestées.
[41] La contestation se situe au niveau des efforts déployés pour mitiger les pertes monétaires et la soustraction de revenus gagnés dans l’entre-temps. De façon plus spécifique, l’employeur a soutenu :
1) Le plaignant n’a pas fait d’efforts raisonnables pour mitiger ses dommages;
2) L’employeur devrait être autorisé à soustraire un certain montant des sommes dues au plaignant en raison du fait que le plaignant a consacré beaucoup de temps à la création d’une corporation en publicité;
3) Le plaignant a travaillé pour son père qui agit comme consultant en imprimerie;
4) L’employeur doit être déchargé d’une année de salaire dû au plaignant parce que les procédures en arbitrage ont été retardées d’un an en raison du fait que le syndicat a été incapable ou négligent dans sa recherche d’un procureur pouvant agir en langue anglaise;
5) L’Agence Bing Bang inc. a des bénéfices non distribués pour l’année 2014. Ces bénéfices devraient être déduits de la somme due par l’employeur.
[42] Avant d’entrer dans le vif du sujet, il convient de disposer d’un argument relevant d’une preuve circonstancielle et qui tendrait à miner la crédibilité du plaignant. L’employeur a souligné que le plaignant, au moment de la réintégration, avait refusé de travailler plus d’une journée par semaine. Pour l’employeur cela constitue un élément permettant de douter des revenus réels du plaignant au cours des dernières années et jette un discrédit sur l’ensemble du témoignage du plaignant dans le cadre de sa réclamation monétaire.
[43] L’employeur lui a offert de travailler les vendredis, samedis et dimanches et le plaignant n’a accepté de travailler que le vendredi, de jour.
[44] Il est donc vrai que le plaignant a refusé de travailler plus d’une journée par semaine lors de sa réintégration.
[45] Cela étant dit, il faut connaître le contexte de ce refus, lequel fut fort bien expliqué par le plaignant. Au moment de la réintégration d’octobre 2014, le plaignant sortait à peine de la séparation d’avec sa conjointe des 13 dernières années. L’ex-couple partageait la garde des enfants. Ayant peu de revenus et pas de travail régulier, le plaignant s’occupait lui-même de la garde de ses 3 enfants. Dès l’annonce de l’offre d’emploi de Montréal-Ouest, le plaignant avait besoin de temps, 1 mois selon son estimé, pour trouver une gardienne pour sa fille et, surtout, trouver une institution spécialisée pour son garçon autiste.
[46] Le plaignant dit que l’employeur ne lui a pas donné ce temps. L’employeur lui aurait trouvé un emploi de concierge à une journée par semaine et aurait confié le travail à l’aréna à d’autres temporaires. Finalement, le plaignant aurait été de nouveau mis à pied.
[47] Pour ce qui est de la requête en fixation de quantum, les paragraphes précédents clarifient les raisons qui ont fait que le plaignant n’a accepté que de travailler une journée par semaine au moment de sa réintégration.
[48] Ce qui nous ramène au débat principal.
[49] Le plaignant a déclaré avoir effectué de nombreuses demandes d’emploi tout au long de sa période de congédiement.
[50] Il a expliqué qu’il se servait de son ordinateur pour rédiger lesdites demandes d’emploi. Ces demandes étaient postées par la suite. Son ex-conjointe a confirmé que le plaignant avait postulé à de nombreux affichages. Mme Corriveau a dit avoir elle-même posté plusieurs de ces demandes d’emploi pendant les nombreux mois qui ont suivi le congédiement et qui ont mené à la décision arbitrale de réintégration.
[51] L’employeur a mis en doute la version du plaignant sur ses nombreuses demandes d’emploi. Il a principalement souligné que ce dernier n’avait été en mesure que de déposer six copies de cesdites nombreuses demandes d’emploi.
[52] Le plaignant a expliqué qu’il avait créé un formulaire de demandes d’emploi à l’ordinateur et qu’il utilisait le même formulaire pour toutes les demandes d’emploi, ne changeant que les données spécifiques à la demande d’emploi en rédaction.
[53] J’ai lu en parallèle les 6 demandes d’emploi déposées soit celles :
1) Du 6 décembre 2011 à Ville de LaSalle comme journalier;
2) Du 2 février 2012 à Ville de LaSalle comme journalier;
3) Du 2 février 2012 à Ville de Châteauguay comme journalier;
4) Du 2 février 2012 à Ville de Mercier comme journalier;
5) Du 21 mars 2012 à Ville de Châteauguay comme journalier temporaire;
6) Du 2 juin 2012 à Ville de Châteauguay comme journalier.
[54] Ce sont effectivement des demandes issues d’un formulaire type où ne changent, pour l’essentiel, que les espaces réservés à :
1) Le poste recherché;
2) L’intitulé de l’emploi;
3) Le nom de « l’équipe » visée.
[55] Pour le reste, le texte de 10 lignes est identique d’une demande à l’autre.
[56] il résulte que le plaignant a effectivement utilisé un gabarit commun à toutes les demandes d’emploi et qu’il n’avait qu’à ajouter les informations qui distinguaient une demande d’emploi d’une autre. Plus rapide, plus efficace. Un papier-coller pourrait-on dire.
[57] Dans cette même perspective, il apparaît normal que le plaignant n’ait pas sauvegardé toutes et chacune de ces demandes d’emploi. Il n’y avait ni obligation, ni utilité. De plus, d’aucuns comprendront facilement qu’à l’époque pertinente l’accent reposait sur l’urgence de trouver un emploi afin d’avoir un revenu permettant de satisfaire les besoins hebdomadaires des 5 personnes composant la cellule familiale du plaignant. Un éventuel débat, quelque 4 années plus tard, sur une requête en fixation de quantum, et pour laquelle serait importante la production de toutes les demandes d’emploi, n’était certes pas un sujet de préoccupation à l’époque du congédiement.
[58] Le témoignage du plaignant est corroboré par Mme Corriveau, l’ex-conjointe du plaignant. Mme Corriveau a déclaré avoir été témoin des nombreuses demandes d’emploi rédigées et postées par le plaignant tout au long de la durée de son congédiement et jusqu’à leur séparation en juin 2014. Elle a même précisé avoir elle-même posté plusieurs de ces demandes d’emploi.
[59] Les deux témoins produits par la partie patronale à ce sujet, soit Mmes Bérubé et Laforêt, toutes deux responsables au service des ressources humaines à l’arrondissement LaSalle de Montréal. pour l’une, et à Ville Mercier, pour l’autre, ne sont pas des témoignages directs pouvant confondre ou discréditer le témoignage du plaignant.
[60] Mme Bérubé n’a pas traité personnellement des demandes d’emploi du plaignant et son témoignage, à l’effet que toute demande d’emploi doit être effectuée par internet et que les postulants en sont tous avisés, n’est pas suffisant pour renverser le témoignage direct et corroboré du plaignant.
[61] De la même manière, le témoignage de Mme Laforêt qui n’a pas retracé de demande d’emploi du plaignant n’est pas suffisant pour démontrer que le plaignant a menti en déclarant avoir postulé à un emploi à Ville Mercier. Cela est d’autant plus vrai que le plaignant a témoigné à l’effet qu’il a été convoqué en entrevue et que, subséquemment, il a dû passer des examens médicaux lors d’une deuxième entrevue à Ville Mercier. Il n’a pas été contredit à ce sujet.
[62] Finalement, le pénible contexte familial dans lequel fut plongé le plaignant milite en faveur de sa version des faits.
[63] En effet, il est tout à fait plausible et réaliste qu’une personne étant pratiquement le seul gagne-pain d’une famille de trois enfants, n’ayant pas droit à des prestations d’assurance-chômage, se débatte à tout vent pour trouver un emploi.
[64] Je suis d’avis que le plaignant a bel et bien effectué les nombreuses demandes d’emploi qu’il dit avoir faites.
[65] Dans un autre ordre d’idée, il est certain que le plaignant a dû consacrer beaucoup de temps à la mise sur pied et au développement de l’entreprise Agence Bing Bang inc. De l’avis du soussigné, ce travail s’assimile à une recherche active d’emploi.
[66] L’objectif du plaignant, ayant perdu son emploi et ne trouvant pas d’autre emploi, a été de créer son propre emploi, de générer son propre revenu. Pour ce faire, il a mis à profit des habiletés et ses contacts hors secteur municipal pour y arriver. De fait, il a obtenu des contrats provenant notamment du milieu des communications et de l’imprimerie.
[67] Dans le cas sous étude, la création de l’entreprise Agence Bing Bang inc. fut une excellente initiative en ce sens qu’elle a permis au plaignant d’obtenir rapidement des contrats, lesquels se sont traduits en revenus.
[68] Ces contrats ont généré des revenus intéressants et ont grandement contribué à diminuer la compensation que doit verser l’employeur pour ce congédiement injustifié.
[69] Si on cumule la recherche active d’un emploi similaire à celui qu’il avait perdu à la ville de Montréal-Ouest à la création de l’entreprise Bing Bang inc., à la recherche de clients, à l’obtention de contrats rémunérateurs, force nous est de constater que la conduite du plaignant dans le cadre de la mitigation des dommages a été exemplaire.
[70] Dans un autre ordre d’idée, la preuve a révélé que, pour la période pertinente à la présente affaire, le plaignant n’avait nullement travaillé pour l’entreprise de son père.
[71] Quant au délai d’un an, en 2013, alors que l’employeur était prêt à procéder et que le syndicat a requis une suspension afin de pouvoir requérir les services d’un procureur pouvant œuvrer en anglais, je considère que cela n’est nullement la faute du plaignant et, qu’au surplus, les deux parties partagent la responsabilité de ce délai. L’employeur a consenti à la remise. L’employeur n’est pas intervenu pour dénoncer le délai qui courait, ni pour demander de reprendre le processus d’arbitrage.
[72] Reste la dernière question soulevée par la partie patronale, celle des bénéfices non répartis.
[73] La preuve n’est pas concluante à ce sujet.
[74] Le comptable-témoin Pierre Lussier a déclaré qu’au 7 décembre 2015, l’exercice comptable de l’Agence Bing Bang inc. pour la période s’échelonnant du 1 er octobre 2013 au 30 septembre 2014 n’était toujours pas terminé et qu’il lui était impossible de dire s’il y avait encore des bénéfices non répartis et, si oui, quels étaient-ils.
[75] La question est particulièrement pertinente pour la période du 1 er octobre 2013 au 31 décembre 2013, période qui fait partie de l’année fiscale 2013 du plaignant et pour laquelle année fiscale le plaignant a déclaré des revenus de dividendes de 15 000,00 $.
[76] Le fardeau de la preuve repose sur les épaules de l’employeur, certes. Ceci dit, la partie patronale a assigné le témoin idoine par sub poena duces tecum. C’est ce qu’elle devait faire. Le comptable de la compagnie Agence Bing Bang inc. a déclaré qu’il y avait possiblement des bénéfices non répartis, non connus, pour l’année fiscale s’échelonnant du 1 er octobre 2013 au 30 septembre 2014. Or, au 7 décembre 2015, plus d’une année plus tard, la comptabilité de l’Agence Bing Bang inc. pour cette année n’est pas encore terminée. On ne peut rien reprocher à l’employeur qui ne pouvait pas deviner que les états financiers de Bing Bang inc. ne seraient complétés 14 mois après la fin de l’année fiscale de cette entreprise.
[77] Quitte à me répéter, il se peut qu’il y ait des bénéfices non répartis qui s’appliquent à la période couvrant les trois derniers mois de l’année 2013, i.e. octobre, novembre et décembre 2013.
[78] Conséquemment, avant de conclure la présente affaire, le Tribunal d’arbitrage se doit d’être éclairé sur ces possibles bénéfices non répartis.
[79] Cela étant dit, pour l’année 2013, le plaignant a déjà déclaré des dividendes de 15 000,00 $. Selon la preuve entendue, les bénéfices non connus pour les trois derniers mois de l’année 2013, dans le cadre de l’année fiscale de l’Agence Bing Bang inc., si tant est qu’il y en a, ne sauraient représenter une somme importante. De talle sorte, qu’il est inutile de priver le plaignant de la totalité de la somme à parfaire qui lui est due, d’autant plus que les préjudices subis par le plaignant sont importants et s’étalent sur une plage de temps anormalement longue pour un arbitrage de grief.
[80] Enfin, le syndicat a demandé des dommages pour aggravation du préjudice.
[81] La partie syndicale a soulevé la mauvaise foi de Montréal-Ouest dans cette affaire, des délais anormaux imputables à la négligence de l’employeur et l’entêtement de l’employeur à ne pas respecter les droits du plaignant.
[82] La preuve a révélé que Montréal-Ouest avait commis une erreur de bonne foi en congédiant le plaignant.
[83] La preuve a également révélé que les deux parties étaient responsables des délais dans cette affaire.
[84] Enfin, tous les arguments invoqués par l’employeur à l’encontre des demandes du plaignant avaient appuis tant dans la convention collective que dans la jurisprudence. En ce sens, faire valoir ses droits, même si on fait erreur, n’équivaut pas à une quelconque forme d’entêtement à ne pas vouloir respecter les droits du plaignant.
[85] Comme il n’y a pas eu de preuve à ce chapitre des dommages, la réclamation pour aggravation des dommages est rejetée.
[86] Pour tous ces motifs, après avoir étudié la preuve, la jurisprudence et sur le tout délibéré, le tribunal d’arbitrage
DÉCLARE que le montant dû par l’employeur au plaignant s’élève à 72 259,98 $;
DÉCLARE que cette somme de 72 259,98 $ est à parfaire en retranchant, le cas échéant, le montant des bénéfices non répartis de l’année 2013;
DÉCLARE qu’à cette somme à parfaire susmentionnée doit s’ajouter les intérêts légaux;
DÉCLARE que l’employeur doit également verser une somme correspondant à sa contribution au régime de retraite du plaignant;
ORDONNE au syndicat de produire au Tribunal d’arbitrage et à l’employeur, dans les 30 jours de cette décision arbitrale, les états financiers de l’Agence Bing Bang inc. y incluant, le cas échéant, l’état des bénéfices non répartis pour l’année fiscale du 1 er octobre 2013 au 30 septembre 2014 et la partie applicable de ces bénéfices non répartis à la période s’échelonnant du 1 er octobre 2013 au 30 décembre 2013;
ORDONNE à l’employeur de verser au plaignant, dans les 10 jours de la réception de cette décision arbitrale, la somme de 36 129,99 $, avec intérêts légaux; soit l’équivalent de 50% de la somme due à parfaire;
CONSERVE compétence pour décider du montant final dû au plaignant en raison de la décision arbitrale du 21 octobre 2014;
CONVOQUE les parties à audience pour la continuité de cette affaire le mardi 2 février 2016 à un endroit à être déterminé ultérieurement
Blainville, ce 18 décembre 2015
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Me Pierre Laplante
Arbitre de grief
Annexe I
DESCRIPTIF
Date du mandat :
- Le 20 juin 2015
Date d’audience :
- Le 7 décembre 2015
Lieu d’audience :
- Montréal
Les témoins :
1) Mme Carole Bérubé, chef division ressources humaines;
2) Mme Karine Laforêt, directrice des ressources humaines Ville de Mercier;
3) M. Pierre Daoust, retraité et père du plaignant;
4) M. Pierre-Alexandre Daoust, col bleu et plaignant;
5) M. Chris Kearnay, gérant de l’aréna et coordonnateur des loisirs;
6) Mme Isabelle Corriveau, ex-conjointe du plaignant;
7) M. Pierre Lussier, comptable de l’Agence Bing Bang inc.
Annexe II
AUTORITÉS PATRONALES
1.
Standard
Radio inc.
c.
Ginette Doudeau,
2 . Limocar de la Vallée enr. et Union des chauffeurs de camions, hommes d’entrepôts et autres ouvriers. Teamsters Québec, section locale 106 et Ghislaine Parent, 2009 CanLII 86723 (QC SAT)
3
.
Paul
Brisson
et
Claire Brisson
et
9027-4580 Québec inc.,
4
.
Les
Technologies Kree inc.
c.
Gilberte Bechara et Pierre Karch,
5.
Édith
Pelletier
c.
Aisa Corporation,
6. Experts Verts inc. et Nathalie Fleurant, 2005 CanLII 68532 (QC CLP)
7.
Samuel
Borero
c.
Investigation et sécurité Protec inc.,
Annexe III
AUTORITÉS SYNDICALES
1. François Carrier c. Mittal Canada inc. et Commission des relations du travail
(C.A.) Jacques Chamberland, Marie-France Bich, Martin Vauclair JJJ.C.A., 14 avril 2014
2. Marie-Claude Caron c. Robert Daigneault , cabinet d’avocats et Daigneault, avocats inc.
(CRT) Esther Plante, juge administrative, 5 janvier 2011
3. Sheldon Moses c. La compagnie commerciale Francis international (Canada) inc.
(CRT) Alain Turcotte, juge administratif, 16 février 2010
4. Daniel Morissette c. Camion-Remorque Révan inc.
(C.Q.) Pierre A. Gagnon, J.C.Q., 25 février 2014
5 . Hugh Bieber c. Nutech inc.
(C.S.) Gérard Lebel, J.C.S., 10 juin 1998
6
.
Brisson
et
9027-4580 Québec inc..
(C.T., 1998-10-14),
[1] Syndicat des cols bleus regroupés de Montréal, - (SCFP-301) et Ville de Montréal-Ouest (T.A. - Me Pierre Laplante - 21.10.2014)